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Critique de 5Arabella


Le roman commence de nos jours. Une femme nommée Bérénice, est quitté par son amant, Titus, qui préfère rester avec sa femme, Roma. Bérénice est dévastée par le chagrin, et décide, en guise de thérapie, de se plonger dans l'oeuvre et la vie de Racine, qui de son point de vue, a décrit cette souffrance d'être quitté, du point de vue d'une femme, comme personne. La plus grande partie du roman va donc dérouler la vie de Racine, la création de ses oeuvres, une analyse de celles-ci.

La langue de Nathalie Azoulai dans ce roman est classique, dépouillée, elle tente de retrouver une forme d'épure, comme les pièces de Racine, tout en tentant de percer le mystère de la passion. C'est sans aucun doute très ambitieux, et cela n'est pas complètement tenu de mon point de vue dans le roman. le personnage de Racine m'a paru pendant la majeure partie du roman étrangement dépourvu de passion, tout au moins pour les femmes. Mais cette passion, le personnage de Racine imaginé par Nathalie Azoulai semble l'avoir ressenti pour un seul être, Louis XIV. Sans oublier un lieu peuplé de différents personnages, qui a été la matrice de toute sa personnalité, qu'il a renié avant d'une certaine manière y être ramené comme malgré lui vers la fin de sa vie : Port Royal. Une manière de concurrence s'instaure entre le souverain et le lieu saint et ses habitants. D'autant plus déchirant que Louis XIV semble jusqu'à un certain point partager les sentiments de Racine, et se montre d'une jalousie impitoyable vis à vis de l'homme des lettres, devenu son biographe. Et il a raison sans doute, au final, Racine semble faire un choix, et trahir le souverain pour un concept, une autre idée de l'humanité, de rapports entre les êtres, et d'idéal de vie. Ce conflit passionnel est ce qui m'a paru de plus vivant, de plus authentique, dans le livre.

C'est évidemment très contestable du point de vue historique, Racine n'a pas été cet interlocuteur privilégié, ce presque alter ego du roi que nous propose Nathalie Azoulai. Comme Molière n'a pas été ce buveur de lait aigri et pitoyable qu'elle nous dépeint. Connaissant un peu l'époque et l'histoire littéraire, j'ai été un peu gênée par moments par les inventions de l'auteure. Mais nous sommes dans un roman, et non une biographie, ce qui autorise les entorses à la vérité.

Plus gênante sont à mon sens quelques lieux communs sur l'amour, la passion. Comme par exemple : « Ce que l'on nomme amour n'est ni doux ni tendre, rien n'en est proche comme la haine, soupire-t-il. » Et il y un côté artificiel entre les deux parties du livre, la souffrance de la femme quittée, et la vie de Racine. Parce que même si ses pièces évoquent la passion, il y peu de passion amoureuse pour les femmes dans sa vie telle que nous la raconte Nathalie Azoulai, et j'aurais tendance à la suivre sur ce point, même si nous ne savons que très peu, par quelques rares lettres, de ce qu'il a pu éprouver. L'enjeu, comme je l'ai indiqué plus haut, paraît être une lutte entre le Roi, ce qu'il représente, ce qu'une allégeance implique, et Port Royal, son éthique, sa vision de la vie.

Je suis donc quelque peu mitigée suite à la lecture de ce roman, qui a d'indéniables qualités et qui se lit avec fluidité, certaines pages, vers la fin, sont très touchantes. Mais à mon sens tout cela manque d'unité, part dans des directions différentes, pas toutes convaincantes.

Je ne voudrais pas être trop négative, et ne pas décourager ceux qui voudraient lire ce roman, car encore une fois, il a de réels atouts et vaut la peine d'être découvert.
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