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Critique de CDemassieux


C'est une histoire du bien, du mal ordinaire – celui qui n'a pas pris une ride depuis que Balzac écrivait ! – et de Dieu. Mélange détonnant qui montre, une fois de plus, le génie romanesque de l'auteur, lequel, à partir d'une poignée d'idées, échafaude une histoire exceptionnelle.

Le bien est ici incarné par une figure romantique idéale, Ursule, jeune orpheline raffinée, recueillie par un vieux docteur fortuné dont les héritiers légitimes tournent autour, tels des charognards jaloux et venimeux. Des héritiers d'une ignorance crasse, particulièrement illustrée lors d'une scène où Ursule interprète la symphonie N°7 de Beethoven et dont ils écorchent joliment le nom et l'oeuvre au passage :
« – Elle dit que c'est de Bethovan, qui passe cependant pour un grand musicien, dit le receveur, il a de la réputation.
– Ma foi, ce ne sera pas à Nemours, reprit madame Crémière, et il est bien nommé Bête à vent.
– Je crois que notre oncle l'a fait exprès pour que nous n'y revenions plus, dit Massin, car il a cligné des yeux en montrant le volume vert à sa petite mijaurée.
– Si c'est avec ce carillon-là qu'ils s'amusent, reprit le maître de poste, ils font bien de rester entre eux. »

Car, chez ces gens-là – comme chantait Jacques Brel –, seul le matérialisme compte. Il n'entre aucune spiritualité dans leur esprit, qu'elle vienne de Dieu ou des Arts. Et ce goût de la possession, cette obsession quand on songe à un personnage comme Minoret-Levrault, connaîtra la justice de l'au-delà comme rempart à cette bassesse bien humaine qui motive à commettre le pire pour de l'argent. Parce qu'Ursule Mirouët est aussi un récit fantastique. Ce qui tord le cou à cette affirmation restrictive qui veut que Balzac soi un écrivain réaliste.
Récit fantastique donc, où les vengeances se rencontrent et s'entrechoquent. À ce propos, Balzac brosse un personnage digne du Iago de Shakespeare (dans Othello) ; un certain Goupil : « Armé des prétentions que comportait sa laideur, il avait ce détestable esprit particulier à ceux qui se permettent tout, et l'employait à venger les mécomptes d'une jalousie permanente. »

Face à Goupil et aux héritiers, se dresse ainsi l'innocente Ursule, jeune femme amoureuse et vertueuse à l'excès. Je disais d'elle plus haut qu'elle était une figure romantique. En voici la preuve : « On avait mis Ursule sur la bergère de son tuteur, et tel était le caractère de sa beauté, que, dans son deuil et dans sa souffrance, elle parut plus belle qu'en aucun moment de sa vie heureuse. »

Mais par-dessus tout, Ursule Mirouët est un roman de la foi. Une foi qui s'exprime particulièrement dans la conversion du bienfaiteur d'Ursule : « L'édifice bâti chez cet homme par le matérialisme craquait de toutes parts, il ne fallait plus qu'une secousse ; et, quand son coeur fut mûr pour Dieu, il tomba dans la vigne céleste comme tombent les fruits. »

Enfin, comme dans tous ses romans, Balzac nous gratifie de ses aphorismes et dont voici deux exemples remarquables : « Une pensée vraie porte avec elle sa finesse » ; « Pour un homme passionné, toute femme vaut ce qu'elle lui coûte ».



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