Les phénomènes d'inversion, d'abord : tripatouillage cruel des structures moléculaires... Les habits avaient pris brusquement possession des corps; les réseaux de laine étaient devenus intrications de fibres musculaires, les chemises en soie une tapisserie de nerfs, cravates et nœuds papillons s'étaient métamorphosés en artères, veines, les montres s'étaient ossifiées, les mouchoirs incrustés d'ongles, les dentelles de tissus pulmonaires. Et les corps s'étaient aplatis. Vides. Écrasés par des habits de chair...
La Terre a plus changé ces sept dernières années que pendant les cinq mille ans qui les ont précédées. La guerre a laissé derrière elle une planète saignante et boursouflée. Les plaies se remplissent au fil des années d’eau et de sable, transformant les villes en désert et les continents en îlots…
Certes, les armes chimiques et nucléaires avaient été utilisées au compte-gouttes. Et les plus optimistes pouvaient parler de guerre propre.
Mais la nature avait été tordue, malaxée, les bombes géoclimatiques n’avaient pas épargné un pouce de terrain. Et pour couronner le tout, les I.A. avaient charcuté les cervelles. Par le biais des relais plantés dans le corps calleux des soldats, bien sûr, mais aussi par l’intermédiaire des caissons chirurgicaux transformés en usines à monstres.
Inutile de te faire un dessin, n’est-ce pas ? C’est aussi mon frère, même si on se ressemble pas vraiment…