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Critique de Shakespeare


« À présent, je sais tout sur le vagin de votre patronne » aura écrit François Mauriac à la revue des Temps modernes après avoir lu le Deuxième sexe. Si l'expression est moqueuse, il y a un tout de même un fond de vérité. Car lorsque Simone de Beauvoir se propose de comprendre la situation de la femme pour en expliquer sa condition, elle vise l'exhaustivité. En effet, après un premier tome présentant la femme d'aujourd'hui (deuxième moitié du XXème) sous sa condition biologique, historique, et psychologique, la philosophe poursuit son analyse afin de voir dans quelles mesures ladite condition peut changer.

De Beauvoir pousse ainsi l'analyse et l'interprétation encore plus loin dans ce deuxième tome. Elle n'en reste pas moins tout aussi exhaustive, multipliant les références artistiques et les témoignages. D'un style très accessible, Castor – comme l'appelait Sartre – justifie chaque observation. Maintes fois le lecteur semble découvrir une évidence qui lui avait jusqu'alors échappé. La philosophe réussit à capter l'attention tout au long de son ouvrage : de la remise en question du complexe d'Oedipe jusqu'aux études des femmes les plus névrosées. le seul regret, c'est qu'en tant que lecteur du XXIème siècle, on aurait aimé une actualisation de l'ouvrage. La naissance d'internet et le rapport des femmes à ce média auraient sûrement constitué un chapitre supplémentaire conséquent.

Ceci étant dit, De Beauvoir répond bel et bien à la problématique. Et si les femmes sont passées au crible sous la plume, les hommes ne sont pas en reste. Si bien que la critique touche aussi bien le premier que le deuxième sexe. Simone de Beauvoir n'est d'ailleurs pas tendre avec l'espèce humaine en général et un certain cynisme se dégage par moment : « ce que l'homme et la femme haïssent l'un chez l'autre, c'est l'échec éclatant de sa propre mauvaise foi et de sa propre lâcheté » affirme-t-elle d'ailleurs dans sa conclusion…

Pour autant, cynique ne veut pas dire fataliste. C'est alors que le courant existentialiste se fait sentir. A l'instar de Sartre, De Beauvoir ne croit pas au destin et considère que nous avons tous en nous la possibilité de décider de notre avenir. Seulement, lorsque Beauvoir présente les solutions dans sa conclusion, si l'utopie semble bel et bien possible, on peut y déceler un léger paradoxe amenant à un certain fatalisme. En effet De Beauvoir propose entre autre d'éduquer les enfants pareillement, sans distinction de sexe et de ne pas les abandonner aux parents mais de les faire éduquer par la communauté. L'idée est estimable, mais cela ne signifie-t-il pas que nous, adultes lecteurs, sommes déjà déterminés par notre éducation qui ne fut pas celle décrite ci-dessus ? Dès lors, comment infléchir le cours de notre destin, de notre situation d'homme ou de femme si nous avons été, notre enfance durant, influencés malgré nous ? Simone de Beauvoir semble proposer une solution pour les générations à venir, mais notre présent inégalitaire semble quelque peu perdu. Nous sommes dans une période évolutive, nous ne connaîtrons ainsi pas le fruit de nos actions. C'est en cela que la conclusion semble quelque peu fataliste, ce qui est paradoxal pour une existentialiste…
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