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Critique de vilvirt


Je trouve intéressant de revenir aux fondamentaux. J'ai toujours aimé faire ça. Découvrir les récits qui remontent aux origines des genres que j'aime lire. C'est comme ça qu'à une époque (bon ok, il y a vingt ans), je me suis passionnée pour la littérature gothique, cherchant à dénicher des pépites méconnues pour comprendre un peu mieux comment ce type d'histoire avait pu évoluer au cours des siècles. Avec la volonté de tout lire, absolument tout, y compris les oeuvres les moins connues comme celle-ci.

Le moins qu'on puisse dire c'est que Vathek, un conte arabe, est une sacré pépite dans le genre. Son héros est sombre, cruel, délirant, excessif dans tout et résolument mauvais, dans la plus pure tradition des antagonistes du roman gothique. Si vous aimez le genre, si vous êtes fan de Melmoth, du Moine de Lewis, des récits d'Ann Radcliffe, de Bram Stoker, du Château d'Otrante ou encore de l'inégalable trilogie de Gormenghast (un chef d'oeuvre du genre écrit par Mervyn Peake, pour ceux qui seraient intéressés); si vous n'avez pas peur de vous frotter à l'immoralité, aux décors étranges et morbides, aux malédictions, à la magie noire et aux esprits tortueux; si vous voulez plonger dans un monde oriental fantasmé avec son lot d'aberrations et de merveilles, il faut lire Vathek.

L'histoire est elle d'un despote, un calif tyrannique soumis à sa nature violente et à sa soif de pouvoir sans commune mesure. Secondé par une mère diabolique qui s'adonne volontier à la magie noire, Vathek perpétue crimes et sacrifices au nom de son ambition démesurée. Sa rencontre avec un mystérieux ermite le pousse à vouloir rejoindre la cité perdue d'Istakhar et ses fabuleux trésors. Mais pour ça, il devra renoncer à sa propre religion sur ordre du diable lui-même – le giaour. Malgré son intelligence et ses connaissance, ses désirs vont le mener bien évidemment à sa perte. Et c'est bien de folie, d'excès et de soif de pouvoir dont il est question dans Vathek.

Le décor est planté, à grands renforts de palais somptueux et labyrinthiques, de fumées d'encens, de séances ésotériques, de prophéties mystiques et de harems peuplés de femmes mystérieuses. Histoire de pouvoir, de corruption, de désirs inassouvis, Vathek est une oeuvre sulfureuse qui souffre, malgré tout, des faiblesses de son époque avec ses clichés et ses exagérations (Vathek est "formidable" et son oeil noir suffit à terrasser les hommes qui s'opposent à lui.)
Pourtant, en dépit de cela, c'est cette plongée en apnée dans une aventure cauchemardesque où le style de l'auteur rehausse la force des péripéties qui fait toute la beauté de cette lecture. C'est là qu'on retrouve le souffle du roman noir du XVIIIème avec ses drames, ses défis, ses figures abominables, sa nature sauvage, ses personnages secondaires parfois absurdes et ce mélange fascinant d'enfer et de beauté, de féérie et d'émerveillement, de pointes d'humour irrévérencieuses et de moralité naïve à travers des personnages aux motivations cruelles.

À mes yeux, c'est en ça que ce roman est magnifique. À la fois dérangeant, suranné, profondément surréaliste, excessif sous certains aspects, c'est une petite merveille de gothique fantastique qui a dû en choquer plus d'un à son époque. Même si, aujourd'hui, l'aspect immoral pourra sembler bien peu effrayant.

Une belle découverte qui me donne envie de reprendre mon exploration de l'époque.
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