Aucune industrie extractive ne se passe de produits toxiques, aucune n'embellit les paysages, ne rend l'air plus pur ni l'eau plus cristalline. Les extractivistes le savent bien, mais il est rare de voir une entreprise affirmer publiquement qu'elle compte détruire un territoire pour enrichir ses actionnaires.
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Qu'est-ce que l'extractivisme ? C'est un programme pour utiliser la terre et non pour vivre avec elle ; pour extraire et absorber ses biens comme matières premières à échelle industrielle. Il se contente de comptabiliser les lieux à ressources et les lieux de consommation et reste aveugle aux régions, aux peuples, aux cultures, aux valeurs humaines. Il est exclusivement régi par des variables économiques, symboles du développement. Seuls comptent pour lui les résultats à court terme, mesurables dans les bourses de valeurs ; les conséquences sur le long terme n'importent pas.
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Mourir d'un cancer à 18 ans ou être intoxiqué au plomb à 9 ans est " normal " dans certains lieux de la planète ; tout comme peut sembler " normale " l'obligation de quitter ses terres du jour au lendemain parce qu'une entreprise ou l’État ont conçu pour elles d'autres destins.
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Parfois, les termes du dilemme sont plus clairs : 67% de l'or extrait sert par exemple à fabriquer des bijoux, pour lesquels on creuse de gigantesque cratères, traite le minerai au cyanure, accapare l'eau des zones arides, pollue les sources d'eau, parfois irrémédiablement. Celles et ceux qui refusent d'être sacrifiés pour le sourire de la mariée ou la retraite paisible d'un bijoutier d'Anvers affirment que " l'eau vaut plus que l'or ". Peut-on, en bonne conscience, contester leur point de vue ?
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Comment peut-on encore courir derrière la croissance, alors que les limites matérielles et écologiques rendent l'expansion de l'économie industrielle de plus en plus insoutenable ? Comment peut-on ne pas se rendre compte que ce comportement est suicidaire ?
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En France, une loi nationale d'interdiction de la fracturation hydraulique a été conçue et adoptée en toute urgence dès 2011, en réaction à la contestation menée par près de 300 collectifs de riverains et riveraines de futures plateformes pétrolières et gazières. Mais les collectifs n'ont pas gagné la guerre. Les industriels se maintiennent prêts en attendant que la conjoncture économique [...] et politique [...] leur soit plus favorable. Ils ont continué à préparer le terrain, au sens propre du terme, avançant dans les premières phases des travaux d'exploration. Dès le début de l'année 2013, des travaux de forage ont été menés sur des plateformes clairement identifiées comme portant sur du pétrole de schiste dans le Bassin parisien, et il est difficile d'imaginer que ces opérations coûteuses soient entreprises sans aucun espoir de retour sur investissement, fût-il, dans un premier temps, de nature essentiellement spéculative.
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Où doit-on placer les limites de la prise de risque ? La santé, la qualité de l'eau et de l'air, l'avenir de nos enfants et de nos territoires peuvent-ils faire l'objet d'expérimentations in situ, quand bien même la création d'emplois, une baisse des prix du carburant ou la croissance économique pourraient être au rendez-vous ?
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Les mouvement latino-américains sont nombreux à pouvoir témoigner des tentatives, ratées ou réussies, de corruption des autorités ou des contestataires.