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Critique de Biblioroz


Son père en est le directeur, la prison, sa maison, assiégée !
1958, une petite ville d'Algérie. Terrée dans sa chambre, une petite fille de cinq ans ne doit pas bouger. Elle raconte l'assaut qu'elle vit sans le comprendre. Il faut se cacher, les matelas sont contre les fenêtres, les balles sifflent. Ses yeux ont vu des fusils qui doivent riposter face aux bérets noirs.
Deux clans, les Français, les Arabes, et eux au milieu.

Les souvenirs éclatés de la petite occupent ces chapitres courts, tels des flashs du passé qui refont surface. On pourrait croire à des anecdotes si presque tous ces souvenirs n'étaient pas aussi tristes, tristes, tristes. Chacun renferme une vérité pénible, dérangeante, rarement directement écrite mais souvent habilement cachée dans les brefs faits évoqués.
On a l'impression que le sort s'acharne à briser les rêves de cette petite dernière, détruire ses moments de joie. On a du mal à imaginer qu'une si petite fille soit déjà si mûre, jamais dupe, mais jamais rebelle, jamais cruelle.

L'enfant s'adresse à sa soeur aînée qui se sert d'elle et de son autre soeur pour justifier, auprès du père, une sortie, dont le but est d'assouvir sa passion pour un militaire, dans le dortoir de la caserne. Les pièces en chocolat achetées pour que les petites ne caftent pas alors que la mère est complice.
Puis les « tu » se succèdent, ce sera pour son frère, sa mère, son père.
Elle lance un cri muet vers sa mère qui ne la remarque pas, qui ne lui parle pas. Sa demande d'attention et de chaleur coule douloureusement entre les mots et serre le coeur. Pourquoi cette indifférence de la mère envers la benjamine de cette fratrie ?
Elle est sensible à la tristesse intérieure du père pour qui elle adopte le comportement d'une petite fille parfaite.
Les évènements explosent dans un style haché. Les hommes égorgés, les pleurs de la mère, le port détesté du départ où un bateau les attend, l'installation dans un appartement trop vaste et froid…

On découvre la présence de l'écriture, un cahier, un « faux » journal romancé pour que celui qui le découvrira et ne respectera pas la consigne ne comprenne pas : « Toi qui ouvres ce cahier, referme-le sans le regarder, il ne t'appartient pas. » Masquer la révolte intérieure, la souffrance.
Ce roman serait-il l'envers du faux journal ? Ce microcosme familial ne serait-il pas une reproduction de notre société : indifférence, mensonge, faux-semblants, dissimulation ?
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