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Critique de torpedo


Mon coup de coeur du jour se nomme Mademoiselle de la Ferté, par Pierre Benoit. Pierre Benoit, cet illustre inconnu ? L'expression convient en effet fort bien à cet auteur inconnu des manuels scolaires et tombé dans l'oubli.

Après avoir goûté la poésie et écrit quelques monographies, Pierre Benoit publie Koenigsmark en 1918, un succès populaire suivi d'une quarantaine de romans. Il est élu à l'Académie française en 1931. A l'époque, il est célèbre pour ses frasques galantes, les canulars et facéties qu'il organise (écrire des billets aux journaux ; organiser des courses de tortues dans les couloirs du Palais Royal ; prétendre avoir été enlevé par le Sein Fein ; être membre de l'association "Le Bassin de Radoub" qui récompense le plus mauvais livre de l'année et couronne le vainqueur d'un aller simple en train dans son village natal accompagné d'une lettre lui demandant de ne plus jamais en revenir). Il est aussi réputé pour être un homme de droite nationaliste et conservateur, marqué par Maurras et Barrès, et qui affiche des convictions antigermanistes (ce qui ne lui évite malheureusement pas la prison à la Libération pour collaboration avec l'ennemi à cause de fausses affirmations).

Pour en revenir à notre auteur, la recette de son succès ? Emmener le lecteur dans un décor exotique, lui faire fréquenter une femme troublante (le tout saupoudré d'une pointe d'érotisme sous-jacent) et mettre le héros devant le choix cornélien entre l'amour et le devoir.

Mademoiselle de la Ferté joue cependant dans un registre différent. Il nous emmène dans la campagne de la région de Dax à la fin du 19ème siècle. le coup de théâtre apparaît dès le début du roman. Car la réalité que nous dévoile Pierre Benoit est rapidement différente des apparences du début de l'histoire. Anne de la Ferté doit épouser Jacques. Son fiancé est sur le point de la quitter car il doit acquérir dans les îles (Haïti) la maîtrise des techniques du commerce du rhum vendu par l'entreprise de négoce de sa famille. Un an plus tard, il se mariera avec elle. Ce que Pierre Benoit confirme (après 5 pages d'attertoiements) avec une phrase laconique : l'année suivante Jacques convole effectivement en justes noces - mais avec une autre.
Dès lors, que vont contenir les 200 pages suivantes ? La description d'une femme de caractère qui a choisi de vivre dans un coin perdu en évitant toute vie sociale. La situation change sensiblement lorsque la maison voisine est occupée par la jeune veuve de son ex-fiancé.

Pierre Benoit alterne de longues descriptions de la vie rurale (assorties de petites leçons de choses, de descriptions ornithologiques, de maximes vaguement philosophiques) et de changements brutaux de rythme. Nous assistons dès lors aux relations de Anne de la Ferté et de Galswinthe de Saint-Sèlves, en nous demandant sans cesse qui de la veuve ou de l'ex-fiancée est la plus jalouse des deux. Jusqu'à la chute finale inattendue.

Vous l'avez compris, j'ai beaucoup apprécié ce roman, certes pas le plus connu de Pierre Benoit (on se souvient généralement de l'Atlantide ou de Koenigsmark). J'ai aimé que cette femme ne soit pas soumise, mais décide de sa vie quelles qu'en soient les conséquences. le mot de la fin par Pierre Benoit : "Ainsi vécut, ainsi mourut, cette fille qui, épouse et mère, eût été sans doute le modèle des mères et des épouses".
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