Je n'étais rien. Et brusquement toutes mes qualités et tous mes défauts rappliquaient force dix comme la tempête. Dans la tempête on se noie ou on passe. Je passerai.
Maman m'a embrassée. Et à travers ses larmes j'ai vu sa joie qui rayonnait. Elle a continué à parler avec le cancérologue pendant que je passais dans le service voisin. Chez le psychiatre je vais toute seule, bien sûr.
Et elle a le toupet de venir… Sans me laisser le temps de répondre, elle déclare sans hausser le ton :
– Je n’aime pas la vie. Je voudrais mourir, ne plus exister dans ce monde que j’ai en horreur.
– Suicide-toi donc !
Je l’ai dit avec hargne. Je me sens soudain remplie d’une force extraordinaire, capable de la faire passer par la fenêtre de mon septième étage. Je me soulève, m’assieds sur mon lit. Elle baisse enfin les yeux.
– Pas si facile que tu crois ! J’ai essayé, je me suis ratée.
– Tu m’envies parce que tu es sûre que je vais mourir. Mais tu te trompes, tu entends, tu te trompes. Je veux vivre, moi !
Et tout doucement, parce que je suis à bout de forces, je murmure :
– Je vais vivre… je le sais…
J'ai dit que j'étais sûre de vivre mais je n'ai pas précisé dans quel état. Je suis moins héroïque devant certaines possibilités.
Manon a un cancer au nom exotique mais grave. Pourtant, elle veut vivre, surtout depuis qu'elle sait que Quentin le plus beau et le plus timide garçon de sa classe, l'aime. La venue d'Eva, une fille triste et mystérieuse, qu'elle n'apprécie pas beaucoup, dans sa chambre d'hôpital, va transformer son quotidien lorsqu'Eva se révèle être la demie-soeur de Quentin.
"Je le trouve tellement beau, là, à cet instant. Il se penche encore jusqu'à toucher mon oreille. Ses cheveux bouclés carressent mon front nu. Il murmure que je lui plait depuis le premier jour. Il prétend qu'il aime tout de moi, même les choses qui l'agacent. Je me sens devenir belle à grande vitesse. Il me dit qu'il m'aime. Je ne rêve pas."