Ne disons rien des incarnations de Charlus au cinéma qui, quels que soient par ailleurs les mérites des comédiens (Alain Delon chez Volker Schlöndorff, John Malkovitch chez Paul Ruiz, Didier Sandre dans le téléfilm de Nina Companeez), étaient voués à décevoir, non seulement parce qu'une heureuse fatalité propre à la littérature condamne les mêmes mots à suggérer chez les lecteurs des images différentes, mais aussi parce que les notations proustiennes sur le corps du personnage sont si riches et si précises qu'il est sans doute impossible de les reproduire toutes à la lettre dans le corps d'un interprète, quel qu'il soit. Et c'est fort bien ainsi, puisqu'au lieu de proposer une tautologie servile, le cinéma, avec ses moyens propres, laisse le dernier mot, le plus libre et le plus irresponsable, au texte qui l'a sécrété. On en arrive presque à se réjouir que Visconti (qui avait songé à Marlon Brando pour Charlus) ou Losey n'aient jamais pu mettre à exécution leurs projets d'un film tiré d'À la recherche du temps perdu.
Hiéroglyphes, p. 32 - 33
Pastichant la fière devise des Rohan ("Roi ne puis, Prince ne daigne, Rohan je suis"), Roland Barthes disait que celle de l'artiste pourrait être : "Fou ne puis, sain ne daigne, névrosé je suis"*.
C'est celle de Charlus.
Le chevalier à la név(rose), p. 71
* Le Plaisir du texte, Seuil, 1973, p. 13
Qui du cul d'un chien s'amourose,/ Il lui paraît une rose.
Françoise dixit (La Recherche, Gallimard 1987/89, I, 122)
Risibles amours, p. 131.
En jargon de tréteaux, Charlus est un de ces comédiens qui "en font des tonnes" et poussent à bout les signaux de la théâtralité.
Monstre sacré, p. 51