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224 pages
Ernest Flammarion, Editeur (01/06/1920)
5/5   1 notes
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Premier roman d'André Birabeau, "Le Bébé Barbu" est comme son titre l'indique une fantaisie littéraire tout à fait typique des années 20. Après la tragédie de la Première Guerre Mondiale, et sa victoire amère, la population française avait envie de retrouver un peu de joie de vivre, sans avoir nécessairement l'inspiration nécessaire. Aussi beaucoup de comédies, littéraires, cinématographiques, théâtrales ont exploité avec une grande créativité cette envie de rire de tout et de s'amuser dont nos ancêtres avaient désespérément besoin. C'est de cette joie hédoniste, souhaitée au fond par tous ceux qui n'avaient que trop versé de larmes en quatre ans, que naîtront les joyeuses Années Folles.
André Birabeau est l'un des premiers à s'élancer, dès 1920, via la collection "Les Auteurs Gais" de Flammarion. Au même moment, il démarre aussi une carrière prolifique d'auteur de pièces de boulevard, comédies légères et grinçantes qui rencontreront un franc succès. Il est probable d'ailleurs que ce "Bébé Barbu" ait finalement hérité d'une forme romancée, à cause de l'impossibilité d'adapter l'intrigue au théâtre.
La scène se passe néanmoins dans un lieu presque unique : l'appartement cossu d'un couple de bourgeois parisiens, les Houssinet. Après de nombreuses tentatives, ils sont enfin parvenus à avoir un enfant, le petit Odilon. Or, le problème de ce petit bébé, c'est qu'il dort, ou plus exactement il ne fait que dormir. En fait, il ne s'est pas réveillé une seule fois depuis sa naissance. Les plus grands médecins de la capitale se penchent avec curiosité et enthousiasme sur cette étrange léthargie que rien n'explique. Aucun des examens fait sur le nourrisson ne témoignent d'une maladie ou d'une malformation. Odilon est un bébé resplendissant de santé, seulement il dort sans cesse, il est impossible de le réveiller et, chose curieuse, il ne semble pas le moins du monde avoir besoin de se nourrir. Loin de dépérir au fil des mois, le bébé dormeur devient un beau bébé, puis un petit enfant, dont il faut régulièrement renouveler les pyjamas au fur et à mesure qu'ils deviennent trop petits. le berceau est bientôt remplacé par un grand lit... Peu à même de comprendre la situation de leur enfant, les Houssinet se laissent finalement convaincre par des grands médecins de maintenir chez eux cet enfant dans l'attente que peut-être, un jour, il se réveille... Pour le couple qui vit une existence très mondaine, c'est une épreuve douloureuse, même si Odilon ne nécessitant presque aucun soin, il est assez facile pour eux de le consigner dans une chambre et de continuer à recevoir leurs amis.
Il en est ainsi pendant vingt-deux ans. Un soir, alors que les Houssinet reçoivent, une longue plainte mâle émane de la chambre où repose Odilon. Tout le monde s'y précipite et découvre, allongé dans ses pyjamas, avec les cheveux longs jusqu'à la taille et une barbe noire de patriarche lui courant sur le ventre, un jeune homme enfin éveillé et qui se met à hurler, comme tous les bébés, mais avec un organe qui a beaucoup mué depuis sa naissance. Sa mère toute émue se précipite vers lui, mais comme Odilon, malgré sa pilosité, reste un bébé, il a surtout faim et tente de dégrafer le corsage de sa mère pour pouvoir téter. Comme celle-ci se débat et lui échappe, Odilon se met à pleurer puis, doucement, se rendort. Mais une grosse tâche de pipi qui parait sous lui, accompagné d'un sourire béat en suçant son pouce, ne laisse aucun doute sur la temporalité désormais normale du sommeil d'Odilon. le garçon a 22 ans, il est enfin réveillé, mais ce n'est pourtant qu'un bébé.
Pour les Houssenet, ce réveil final est bien plus dramatique que si leur enfant était resté un légume jusqu'à la fin de ses jours. Les voilà avec sur les bras un bébé barbu qu'ils ont à peine regardé grandir et pour lequel ils n'éprouvent aucun sentiment filial. Et pourtant, il s'agit de leur fils, et il faut bien s'en occuper.
Désormais trop âgée, Mme Houssenet n'a plus de lait, et il faut bien recourir à une nourrice. Mais beaucoup s'enfuient en courant en voyant ce bébé chevelu et barbu se vautrer dans son lit dans le plus simple appareil. Elles sont peut-être plus censées qu'on ne le croit, car la seule nourrice qui accepte le poste manque de finir violée, car si Odilon est intellectuellement un bébé, ses hormones masculines ont atteint un point de non retour dans la maturation.
Enfin, les parents du bébé barbu découvrent qu'il est compliqué d'imposer son autorité à un enfant sur lequel on ne possède pas une supériorité physique. M. Houssinet en fait l'amère expérience en menaçant son fils d'une gifle, après qu'il ait fait une bêtise, et en recevant de sa part un coup de poing qui l'envoie au tapis.
Finalement, les Houssinet font appel à un tuteur recruté par petites annonces. Jean-Jacques Crespelin est un pédagogue habile et expérimenté qui comprend qu'Odilon est à la fois un bébé et un homme, et que de ce fait, il ne sera jamais un enfant. le tuteur parvient assez vite à se faire accepter de lui en le traitant, précisément, comme un homme. Il l'habille en adulte, le rase, lui coupe les cheveux, lui apprend la manière de se tenir, la manière de marcher. Il se doute bien que, privé de son enfance, Odilon n'aura jamais accès à l'apprentissage poétique ni à l'âme d'artiste qui naissent dans cette période-là de l'existence. Mais il n'est pas si difficile, selon Crespelin, de faire d'Odilon un imbécile comme les autres, en lui apprenant à parler, à lire et à l'écrire, en lui enseignant la valeur souveraine de l'argent et en lui donnant l'éducation stricte, bête et bornée, de la bourgeoisie parisienne.
Sa méthode sera couronnée de succès, et le couple des Houssinet ne remerciera jamais assez Crespelin d'avoir fait d'Odilon le fils qu'ils avaient toujours voulu avoir.
Odilon restera donc un imbécile, assez incapable de comprendre l'intérêt de lire un livre, de saisir l'émotion d'une musique ou même de comprendre pourquoi des gens vont au théâtre pour voir d'autres gens crier sur une scène. Mais pétri de bon sens et d'un amour souverain pour l'argent, il deviendra un respectable bourgeois, allant même jusqu'à épouser la fille d'un riche entrepreneur, tout en payant un appartement à une jeune femme émue de son histoire et qui s'est amourachée de lui. Il tient à faire sa maîtresse, puisque c'est elle qui lui plaît vraiment mais il est bien obligé d'en épouser une autre, puisqu'elle n'a pas suffisamment d'argent... Logique, non ?
On le voit, malgré le prétexte comique et la nombreuse présence de "gags" liés à la situation inédite de ce bébé barbu, André Birabeau n'en signe pas moins une satire cinglante de la bourgeoisie parisienne. Certes, le caractère boulevardier peut paraitre vieillot, et la bourgeoisie parisienne ne correspond plus guère à cette caricature. Néanmoins, André Birabeau parvient à signer un livre drôle et sans prétentions, mais qui se révèle étonnamment subtil au-delà de la farce, avec même un cynisme assumé et quelques gouttes d'anarchisme féroce. L'auteur s'autorise même - avec des mots choisis et convenables - un certain nombre de plaisanteries assez grivoises, voire ouvertement triviales. Décrire un homme se comportant comme un bébé permet, il est vrai, de franchir bien des interdits sans en avoir l'air.
Tout cela fait du "Bébé Barbu" une curiosité littéraire fort agréable à lire, et bien moins familiale et tous publics que l'on pouvait s'y attendre. Précisément parce que l'humour y est souvent grinçant, "Le Bébé Barbu" a gardé une grande partie de son potentiel comique. On rit vraiment en lisant ce livre, d'autant plus que l'auteur a un indéniable talent en mots d'esprits et en "punchlines", comme on dirait de nos jours.
Il est difficile de juger aujourd'hui de l'accueil qui a été fait à ce roman, mais il semble que Birabeau lui-même n'ait pas, par la suite, cherché à le rééditer, ni même indiqué l'existence de ce livre sur la plupart de ses biographies. Ainsi, seule l'édition originale de 1920 est trouvable, et encore fort difficilement.
André Birabeau étant devenu par la suite homme de théâtre à succès, reconnu par ses pairs, il est peu probable que ce petit roman de jeunesse, cynique et inconvenant, aurait fait bonne impression s'il l'avait exhumé. D'autant plus qu'André Birabeau fut lui-même barbu toute sa vie...
Néanmoins, c'est un roman qui gagnerait à être redécouvert et réédité, tant non seulement, il reste d'une lecture très facile et très drôle pour des lecteurs du XXIème siècle, mais parce qu'il défend l'idée, pas si bête finalement, que les gens qui n'ont pas su garder en eux une nécessaire part d'enfance ne sont rien de plus que des gros bébés stupides.
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CHAPITRES : 0:00 - Titre
A : 0:06 - ACTE - Jacques Deval 0:16 - ACTION - Sacha Guitry 0:28 - ADMIRATION - Comtesse Diane 0:38 - ADULTÈRE - Daniel Darc 0:59 - ÂGE - Fabrice Carré 1:08 - AMI - Jean Paulhan 1:18 - AMIS - Madame du Deffand 1:30 - AMOUR - André Birabeau 1:40 - AMOUR - Madeleine de Scudéry 1:51 - AMOUR DES FEMMES - Edmond Jaloux 2:03 - AMOUR ET FEMMES - Paul Géraldy 2:16 - AMUSEMENT - Jean Delacour 2:36 - ANIMAL - André Suarès 2:47 - APPARENCE - Nathalie Clifford-Barney 2:57 - ARGUMENT - Léonce Bourliaguet 3:07 - AVARICE - Abel Bonnard 3:19 - AVENIR - Gustave Flaubert 3:28 - AVIS - Marie d'Arconville
B : 3:37 - BAISER - Tristan Bernard 3:49 - BEAUTÉ - Fontenelle 4:00 - BÊTISE - Valtour 4:13 - BIBLIOTHÈQUE - André de Prémontval 4:24 - BLASÉ - Louise-Victorine Ackermann 4:35 - BONHEUR - Henri Barbusse 4:45 - BUT - Richelieu
C : 4:54 - CAPITAL - Auguste Detoeuf 5:10 - CERVEAU - Charles d'Ollone 5:20 - CHANCE - Pierre Aguétant 5:31 - COMPRENDRE - Charles Ferdinand Ramuz 5:42 - CONSEIL - Maurice Garçot
5:55 - Générique
RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE : Jean Delacour, Tout l'esprit français, Paris, Albin Michel, 1974.
IMAGES D'ILLUSTRATION : Jacques Deval : http://www.lepetitcelinien.com/2013/06/lettre-inedite-louis-ferdinand-celine-jacques-deval.html Sacha Guitry : https://de.wikipedia.org/wiki/Sacha_Guitry#/media/Datei:Sacha_Guitry_1931_(2).jp Comtesse Diane : https://www.babelio.com/auteur/Marie-Josephine-de-Suin-dite-Comtesse-Diane/303306 Jean Paulhan : https://jeanpaulhan-sljp.fr/ Madame du Deffand : https://fr.wikipedia.org/wiki/Madame_du_Deffand#/media/Fichier:Mme_du_Deffant_CIPA0635.jpg André Birabeau : https://fr.wikipedia.org/wiki/André_Birabeau#/media/Fichier:André_Birabeau_1938.jpg Madeleine de Scudéry : https://www.posterazzi.com/madeleine-de-scudery-n-1607-1701-french-poet-and-novelist-wood-engraving-19th-century-after-a-painting-by-elizabeth-cheron-poster-print-by-granger-collection-item-vargrc0078786/ Edmond Jaloux : https://excerpts.numilog.com/books/9791037103666.pdf Paul Géraldy : https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Géraldy#/media/Fichier:Paul_Géraldy_by_André_Taponier.jpg André Suarès : https://www.edition-originale.com/fr/litterature/divers-litterature/suares-correspondance-1904-1938-1951-79921 Nathalie Clifford-Barney : https://www.amazon.fr/Eparpillements-Natalie-Clifford-Barney/dp/B081KQLJ87 Léonce Bourliaguet : https://www.babelio.com/auteur/Leonce-Bourliaguet/123718/photos Abel Bonnard : https://twitter.com/wrathofgnon/status/840114996193329153 Gustave Flaubert : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/e/ea/
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