Personne pour l’accueillir. C’était de bonne guerre :les responsables du bureau de Montréal prenaient sans doute mal qu’on ait confié le dossier Désilets à un agent étranger. On avait estimé en haut lieu que les agents québécois étaient susceptibles de faire preuve de complaisance à l’endroit d’un héros national. L’agent trouvait cette allégation injustifiée, voire carrément insultante, mais il savait qu’il était inutile d’expliquer à ses collègues montréalais que la décision s’était prise au-dessus de sa tête, que personnellement il aurait préféré demeurer en Scanie. Les gens de Montréal savaient déjà tout cela, seulement l’agent incarnait cette décision. L’on s’en tiendrait à son égard à la politesse la plus élémentaire. Cela lui convenait parfaitement.
Un milliardaire qui pontifie se fiche de votre opinion. Il joue à la balle au mur avec ses idées, et vous êtes le mur.
L’agent avait profité des quelques minutes qu’avait duré le trajet entre Göteborg et Kristiansand pour survoler son ordre de mission. Il estimait qu’il pourrait être de retour à Ängelholm avant le coucher du soleil, malgré les cinq heures de décalage. Faire ses politesses aux gens du bureau de Montréal, soumettre la premika de Théodore Désilets au questionnaire de Czerkawski et prendre son empreinte neuronale, manger un morceau, bâcler son rapport et le faire approuver par Augustin. Cela serait serré, mais c’était jouable.