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Critique de Eric75


Mike Blueberry, le plus connu des lieutenants nordistes de la bédé franco-belge est une fois de plus fait prisonnier par l'armée sudiste et doit être transféré dans un pénitencier. On ne compte plus les pénitenciers qui ont accueilli le lieutenant yankee depuis son entrée en scène en 1963, à peu près tous, à mon avis. On ne se souvient plus trop des circonstances de son arrestation ni pourquoi il se retrouve cette fois encore entre les mains des sudistes, car il s'écoule environ trois ans et demi entre les parutions de chaque album, un délai largement suffisant pour avoir tout oublié. Dans l'avant-dernier, intitulé Gettysburg, souvenez-vous, Blueberry s'était réfugié avec le sergent Peters dans la cave d'une cabane encerclée par les troupes confédérées, une belle occasion pour lui raconter son expérience personnelle de la célèbre bataille de Gettysburg, et de faire profiter le lecteur d'un flashback de bon aloi insérant ce moment historique un peu oublié dans la chronologie de la série. Ils se font choper à la fin de l'album comme deux rats sortant de leur trou à rats, alors que la bicoque est incendiée.

Dans ce nouvel album, nous retrouvons donc Mike et Peters à bord d'un train faisant route vers le pénitencier, le scénario étant extensible à l'infini, ils n'arriveront jamais à destination, ce sera pour une prochaine fois, car une bande de pillards prend d'assaut le convoi et met fin au voyage. Mike, Peters et un troisième larron parviennent à s'enfuir à bord de la locomotive. Après avoir échappé aux pillards, au déraillement, à l'écrasement par des blocs de rocher, à la noyade, à une demi-douzaine de morts certaines, ils seront accueillis par une communauté pacifiste et pastorale au sens religieux du terme dans un endroit isolé du monde nommé Paradise Valley. le nom idyllique de ce lieu contrôlé par le pasteur Edmund Wilcox cache bien entendu une réalité bien différente, où les ennuis ne vont pas tarder à recommencer.

Une fois encore, cet album profite du trait de crayon finement ciselé de Michel Blanc-Dumont, d'un scénario plein de bruits et de fureur signé François Corteggiani et d'une tonalité sépia due à la palette délicate de Jocelyne Etter-Charrance. Bien sûr dans cet album superbement dessiné, les mustangs caracolent toujours l'échine luisante de sueur et les naseaux couverts d'écume, les étincelles jaillissent des boggies des locomotives dans un son strident, les flots tumultueux des arroyos tourbillonnent au fond des canyons, les jeunes filles vertueuses dissimulent leurs corps de rêve sous des crinolines pudibondes, les colts et les fusils crachent leurs flammes sans répit, et les geysers de sang giclent des blessures aussi souvent que dans les films de Quentin Tarantino.

Tout cela a un goût de déjà-vu mais le plaisir de poursuivre cette épopée qui semble ne jamais vouloir se terminer et qui dure maintenant depuis quatre décennies (le premier tome de la Jeunesse de Blueberry, scénario de Jean-Michel Charlier et dessin de Jean Giraud, les créateurs du personnage, date de 1975) reste absolument intact grâce au respect absolu des lois du genre, comme celles énumérées plus haut.

Je me suis donc posé la question suivante : à partir de quand sonnera l'heure de la fin de la jeunesse de Blueberry ? Celle-ci doit assurer la jonction avec l'ouverture de l'album Fort Navajo (publié en 1965) qui démarre juste après la guerre de Sécession, donc en 1865. Or, l'histoire actuelle se situe en 1864 juste après la bataille de Chickamauga et quelques mois avant l'assassinat de Lincoln. Il nous reste peu de temps.

On pressent malgré tout dans ce vingt-et-unième album, après la parenthèse de Gettysbourg, le début d'un nouveau cycle, avec l'apparition d'un nouveau personnage féminin, la troublante Emily, qui à mon avis n'a pas encore dit son dernier mot. On lui souhaite une belle carrière dans la série, même si les personnages féminins de la Jeunesse – Harriet, qui réapparaît ici dans un cauchemar, Elisabeth, Soledad, Virginia Kidman ou même Eleonore Mitchell – doivent se résigner à faire pâle figure au côté de l'irremplaçable Chihuahua Pearl qui fera son apparition quelques années plus tard dans la vie de Blueberry, comme les aficionados le savent, à partir de l'album numéro 13 (de la série principale) publié en 1973.


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