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Critique de Khiad


Khiad
27 février 2018
Un petit mot sur la couverture qui m'avait fait m'arrêter sur ce livre et qui m'avait donné envie de m'intéresser au résumé. J'aime vraiment beaucoup : sombre, mais aussi mystérieuse. On se doute que ça ne parlera pas d'une histoire d'amour et de balades ensoleillées au parc.
Si j'avais un reproche à faire, ce serait sur le titre, enfin la police du titre : je déteste quand un titre ne commence pas par une majuscule. Voilà, c'est bête, mais c'est comme ça. lol

Concernant le style de l'auteur, j'ai vraiment beaucoup aimé ce que j'ai découvert. Il sait adapter sa plume au rythme de son récit. Au début, il y a beaucoup de phrases courtes, souvent incisives. On y sent l'urgence et la peur qui dévorent le protagoniste de l'intérieur. Puis, au fil des pages, cette urgence s'apaise et les phrases se font un peu plus longues. Un style vraiment très agréable et fluide, complètement maîtrisé, qui apporte un réel plus à cette histoire.

Au début du livre, même si le thème n'est pas le même, j'avais toujours cette chanson de Stomy Bugsy en tête : "Trop jeune pour mourir".

Au début, j'ai eu peur de m'ennuyer. Qu'allait bien pouvoir nous raconter l'auteur alors que son protagoniste purge une peine de prison pour un temps indéterminé ? Que pouvait bien apporter ce huis-clos ? Ce livre n'allait-il pas être trop redondant, trop monotone ? Et bien pas du tout. Parce qu'on entre dans l'univers carcéral (même s'il est en isolement) en même temps que dans la tête de Jeff. On vit avec lui ses peurs, ses espoirs, ses craintes, ses rébellions. On y parle de désespoir, de colère, de déni, d'enfermement, de dépendance, de manipulations, de souvenirs, de racisme, de brimades, de pouvoir, de libre arbitre...

Jefferson Petitbois, 17 ans, est considéré comme un monstre par ses semblables. Et il est vrai que ses crimes sont horribles (de nombreux meurtres et un viol), même s'il n'a pas l'air d'éprouver le moindre remord. le fait qu'il soit noir n'a sans doute pas, non plus, joué en sa faveur, malgré son jeune âge. La justice le condamne alors à la peine capitale : la mort.

Le jeune homme est alors conduit à la prison de Fresnes, où il va faire la connaissance de la "Louisette", petit surnom donné à celle qui a déjà pris tant de vies : la guillotine. Cette vision met Jeff dans tous ses états. Il ne connait pas la date de son exécution et c'est ça le plus difficile à gérer pour lui : l'attente. Elle engendre une peur profonde et viscérale qui fait que le moindre bruit le terrifie. Difficile d'être serein quand vous ignorez si ce jour n'est pas le dernier que vous vivez...

Mais nous sommes fin 1980, puis début 1981 et les élections présidentielles vont bientôt avoir lieu. L'un des candidats, François Mitterrand est pour l'abolition de la peine de mort. Alors commence une autre attente pour Jeff, un sursis tinté d'espoir. Mais lorsque la grâce présidentielle arrive faisant de lui de dernier condamné à mort français (gracié qui plus est !), il se rend compte d'autre chose : il va devoir passer le restant de sa vie en prison. Et la perpétuité, c'est long quand on n'a que 17 ans...

Le jeune homme, après avoir été gracié, va changer de prison (que l'auteur ne nomme pas) et aller quelque par au bord de l'océan Atlantique. Là, il va faire des rencontres, des bonnes comme des mauvaises, et chacune d'entre elle, une en particulier, puis une seconde, vont le faire replonger dans le passé.

Alors ne vous attendez pas à un récit linéaire à ce niveau. Jeff se souvient, certes, mais tout est morcelé et pas forcément dans l'ordre chronologique. Pas de soucis à avoir, on s'y repère finalement très bien. C'est ainsi que l'on finit par connaître un peu mieux l'adolescent (enfin à ce moment du récit il est déjà devenu un homme), ce qu'il a fait et qu'il l'y a conduit.

Bien que j'ai éprouvé de la compassion pour lui (il est si jeune et n'a pas eu une vie facile), j'ai aussi eu parfois envie de le baffer. C'est une chose de se dire que l'on n'a pas eu de chance dans la vie, c'en est une autre de dire que tout ce que l'on a fait de mal n'est pas de notre faute mais uniquement de celle des autres.

Une enfant abandonné à la naissance, noir, ballotté de familles d'accueil en familles d'accueil, sujet aux fugues et à la violence, rempli de tellement de colère et de ressentiments... Une ultime fugue, un geste de désespoir et voilà qu'il rencontre Max, personnage mystérieux et charismatique (omniprésent dans les pensées de Jeff) qui va devenir son mentor et lui faire goûter à l'Iboga, une drogue hallucinogène venue d'Afrique, qui lui procurera un sentiment de toute puissance et d'invulnérabilité. C'est là l'opportunité d'une nouvelle vie pour l'adolescent. Et c'est ce qu'il va avoir, mais à quel prix ?

Le côté psychologique de ce personnage est vraiment très bien amené et traité. On y voit son évolution, graduelle au fil des années. On le voit murir et évoluer, se questionner et chercher des réponses dans ce passé qui, finalement, continue de le hanter. Tout ça avec le sentiment d'oppression permanent que nous renvoie sa cellule de 10m², son heure de promenade quotidienne, sa douche par semaine...

Via un certain axe, j'ai retrouvé un peu de la ligne verte de Stephen King. Un clin d'oeil à la fois semblable et un peu différent. Mais, vous me direz, dans une prison il n'y a pas vraiment beaucoup de choix qui s'offraient à l'auteur à ce niveau...

Concernant la fin, je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre, mais j'en ai été très satisfaite. J'ai encore une question qui me trotte dans la tête, mais cette part de mystère ne me dérange pas outre mesure. Non, vraiment une fin comme je les aime. Dans un sens, on peut dire qu'elle est belle.

En résumé, j'ai plus qu'adoré cette lecture qui a frôlé le coup de coeur. C'est un thriller très addictif que j'ai vraiment peiné à lâcher. Cette lecture peut paraître très sombre et, par certains côtés elle l'est réellement (on y parle de meurtres, de viol, de drogue, d'humiliations, de manipulations, de dépendance...), mais on y parle aussi d'altruisme et d'amitié. Même si, comme moi, vous l'écouterez raconter son histoire sans le juger (ou pas), parfois avec empathie (ou non), mais sans pour autant lui pardonner ce qu'il a fait (je l'espère), je pense que vous serez touchés par l'histoire de ce jeune homme trop jeune pour mourir. Si vous décidez de sauter le pas, vous allez découvrir LA vérité. La vérité selon Jefferson Petitbois.

Maintenant que la plume de Christian Blanchard m'a bien emprisonnée (sans mauvais jeu de mots vu que c'est un terme qu'il aime à exploiter dans ses romans), j'irai sans doute voir ce que donnent ses précédents livres. Je pense que c'est un auteur à suivre. ^^
Lien : http://booksfeedmemore.eklab..
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