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Critique de Charybde2


Le "faux Paris" ébauché en 1918 pour l'aviation allemande : une précieuse leçon de philosophie.

Cet essai de Xavier Boissel, publié chez Inculte en 2012, s'inscrit dans cette mouvance informelle où l'on trouve aussi bien le Philippe Vasset de "Carte muette" ou de "Un livre blanc" que le Bruce Bégout de "Zéropolis" ou de "Lieu commun - le motel américain", ou encore, à l'étranger, le Iain Sinclair de "London Orbital" : celui d'une enquête ancrée dans la géographie de l'apparemment anodin ou marginal, pour y débusquer, le cas échéant, du signifiant particulièrement pertinent.

Enquêtant donc sur le "faux Paris", réseau avorté de simulacres grandeur nature préparé en trois emplacements de la ceinture parisienne pour leurrer les bombardiers allemands de 1918, projet révélé dans le journal "L'Illustration" en 1920, Xavier Boissel, accompagné du photographe Didier Vivien dont les prises de vue composent un étonnant cahier photo de 32 pages en fin de volume, signe ici une belle réussite, exhumant de ces champs oubliés et de ces maigres vestiges à la fois une précieuse interrogation sur la simultanéité d'une absence du sens recherché et d'une saturation du sens occurrent (des coïncidences, telles les présences d'une aire de ball-trap, d'un club sauvage de paintball ou d'un dictionnaire enfoui au bord d'un fossé, sont proprement vertigineuses), et d'une quête philosophique subtilement rageuse, qui note l'envahissement du quotidien des "petits" par des "soucis" qui usent, occupent, fatiguent et démobilisent.

Dans une approche du simulacre et du spectaculaire faux où nécessairement Baudrillard et Debord ne sont pas loin, Xavier Boissel nous rappelle avec un brio insidieux que philosopher, c'est toujours se préparer à agir, et que c'est aussi pour cela que celui qui tient le bon côté du manche n'aime guère, en général, le philosophe authentique (très loin, bien entendu, des "pensées du bien-digérer" d'un Luc Ferry ou d'autres imposteurs...).

Une lecture réjouissante et roborative.
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