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Critique de Aaliz


Aaliz
03 novembre 2014
Un des commentaires sur Amazon ( 1 étoile ) :
« Près de 1000 pages de tripotage intellectuel vaseux et stérile, un vide abyssal, un ennui profond. 30 euros et je ne sais pas encore si je conserverais "l'ouvrage" même pour caler un pied d'armoire, tant il m'a semblé calamiteux!!! A MOI Césaire, sauve moi de "ça". »
Réponse d'un lecteur à ce commentaire :
« Pas étonnant qu'un admirateur de Césaire (l'improbable), ne comprenne rien à Bolaño, la quête d'utilitarisme conduit, elle à l'abysse. »

Si ces commentaires m'ont interpellée c'est que je crois bien, moi aussi, n'avoir rien « compris » à Bolaño. On m'avait « vendu » 2666 comme un chef d'oeuvre et les qualificatifs élogieux ne manquent pas lorsqu'on lit la plupart des avis : roman-monde, roman total, roman fou etc etc…
Vous l'avez compris, je ne partage pas l'enthousiasme et l'extase générale suscités par ce roman. J'en attendais probablement trop, autre chose en tout cas c'est certain. Non, en fait le problème c'est que j'en attendais tout simplement quelque chose, rien de précis mais au moins quelque chose et que, finalement, il ne s'est rien passé, je n'ai rien retiré de ma lecture.
C'est pourquoi j'ai voulu vous faire part des deux commentaires amazon ci-dessus.
« La quête d'utilitarisme conduit, elle à l'abysse. »
Ayant lu ces mots, je me suis dit que j'étais une lectrice « utilitariste », j'attends obligatoirement quelque chose de mes lectures, j'ai besoin qu'elles me soient « utiles », que j'en retire un enseignement, une réflexion, des informations, la beauté des mots voire même simplement un beau moment de rêve et de détente. Mais je ne conçois vraiment pas la lecture comme une activité stérile, lire pour lire, sans rien attendre en retour.

2666 ne m'a rien apporté, vraiment rien. le style n'a rien d'exceptionnel, la construction est on ne peut plus frustrante ( peut-être dû au fait que le roman est inachevé …), je n'ai rien appris, je n'ai pas été invitée à la réflexion ( ou alors je n'ai pas vu l'invitation car d'autres apparemment l'ont vue). L'auteur multiplie les genres au sein d'un même roman, c'est bien mais ça n'a rien d'inédit, bref je ne comprends pas l'engouement général …

2666 se compose de 5 parties destinées d'abord à être publiées séparément, cette décision initiale de l'auteur, qui se savait malade, visait à assurer l'avenir économique de sa famille. Après sa mort, par souci de respecter l'oeuvre dans sa globalité, les éditeurs ont choisi de passer outre la volonté de l'auteur et de publier ainsi les cinq parties ensemble.

La première partie m'a franchement déroutée, je me suis même demandée si mon exemplaire n'avait pas été victime d'une erreur d'impression. L'action se déroule en Europe, on suit les péripéties amoureuses d'un quatuor d'universitaires tous fascinés par l'oeuvre d'un mystérieux écrivain allemand. Leur quête les conduit jusqu'au Mexique, à Santa Teresa, où les meurtres en série de jeunes femmes terrorisent la population.
Les deux parties suivantes s'attachent chacune à un personnage précis. D'abord, un mexicain dont l'auteur nous retrace la vie, père célibataire vivant dans la crainte que sa fille ne soit victime du tueur en série. Ensuite, un jeune journaliste américain est chargé de couvrir un match de boxe au Mexique. Il entend parler des meurtres, un sujet en or pour un journaliste comme lui.
La quatrième partie retrace dans le détail toutes les circonstances de chaque meurtre perpétré à Santa Teresa. Ce sont des dizaines et des dizaines de meurtres qui s'enchaînent sans interruption. Cette partie m'a beaucoup impressionnée car on aurait pu craindre la lassitude à force de répétition mais pas du tout. On est littéralement plongé en plein roman noir. La partie précédente avait commencé à éveiller ma curiosité et mon intérêt, je dois avouer que cette partie-ci n'a fait que les accroître considérablement.
Je pensais donc apprendre enfin le fin mot de l'histoire ( au bout de 1000 pages !) dans la dernière partie, celle consacrée à ce mystérieux écrivain. Après donc le roman noir, on se retrouve en plein récit de guerre. J'ai bien aimé cette partie où le tableau commence à s'éclaircir.

Finalement, je me suis quand même plutôt ennuyée durant les ¾ du livre. J'en suis ressortie frustrée car bien qu'il y ait un fin fil conducteur entre les parties, on ne retrouve plus du tout les personnages d'une partie à l'autre, je m'attendais à ce qu'il y ait un lien, des explications mais je suis restée avec mes questions. A la fin, on a bien une idée de l'identité du coupable mais rien n'est affirmé et le fait que le roman soit inachevé se fait bien sentir.

Concernant la série d'assassinats, elle est inspirée de faits réels. Pour connaître l'histoire, je vous conseille le film « Les oubliées de Juarez » avec Antonio Banderas et Jenifer Lopez. Ayant déjà vu le film avant cette lecture, vous comprenez que le sujet du roman de Bolaño n'avait rien d'original pour moi.

Je crois que c'est Joachim qui avait souligné l'influence de Gabriel Garcia Marquez chez Bolaño et c'est vrai, je l'ai remarquée de temps à autre. La dernière partie m'a aussi beaucoup rappelé Kaputt de Malaparte dont il faudra que je vous parle prochainement alors que la toute première partie nous plonge plutôt dans une ambiance digne des auteurs européens tels Zweig, Musil, Marai … Je reconnais donc le talent de Bolaño d'avoir su aussi habilement manier les genres.

C'est terrible, c'est limite si je ne m'excuse pas de ne pas avoir aimé. Alors certains diront que je n'y connais rien en littérature ( et dans ce cas qu'on m'explique ce que signifie « s'y connaître en littérature » ), que je suis une inculte et que je suis dénuée de toute intelligence etc … ( j'y ai eu droit lors de l'affaire « plug anal de MacCarthy »). Mais voilà, c'est comme ça, je me suis ennuyée, je n'ai rien appris, je suis très déçue et je ne dois pas avoir la même définition du « chef d'oeuvre » que la plupart des gens. J'ai mentionné Kaputt tout à l'heure, eh bien Kaputt pour moi EST un chef d'oeuvre.




Addendum :

Je me suis rendue compte que je reprochais aux avis élogieux de ne pas être précis concernant les raisons de leur "orgasme littéraire" mais que mon avis tombait dans le même travers.
Je vais donc essayer d'être plus explicite.
Je dis dans le corps de mon article que les différentes parties du roman sont finalement très peu liées entre elles. A vrai dire, j'ai même carrément eu l'impression qu'on sautait parfois du coq à l'âne. Je n'ai vraiment pas compris pourquoi Bolaño avait procédé ainsi et ce qu'il cherchait à montrer. J'ai cru comprendre, en lisant d'autres articles, que 2666 est dans son ensemble un roman sur le Mal, je veux bien mais je ne vois en quoi c'est le cas concernant notamment les trois premières parties. A moins de considérer le Mal sous son acceptation religieuse et d'y inclure donc les plans à trois, les sports de combat etc ...
Ce que je reproche également à ce roman c'est de vouloir apparemment toucher à plein de choses sans les approfondir. Je fais partie des lecteurs qui aiment lorsqu'un auteur décortique et analyse à fond son sujet. Ce n'est pas du tout le cas ici et j'ai d'ailleurs du mal à déterminer quel est le sujet, l'objectif, la raison d'être de ce roman. J'ai une sensation de superficialité, de survol alors que j'aime plutôt la profondeur.
Enfin dernier point, j'ai une grande prédilection pour les romans coups de poing et les romans surprises. C'est d'ailleurs le critère principal de ma propre définition du chef d'oeuvre. Et ici, j'ai attendu et attendu en vain la "surprise", ce moment où tu te dis " Waouh !". Ce roman a pour moi manqué de force, de panache, je l'ai trouvé terne et sans relief. Je suis restée en dehors. Je n'ai pas ressenti d'atmosphère particulière.
Voilà donc essentiellement pourquoi 2666 n'est, selon moi, pas un chef d'oeuvre.
Lien : http://cherrylivres.blogspot..
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