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Critique de si-bemol


Autobiographie ou autofiction, Guy Boley rend ici hommage à son père auquel le lie un amour fusionnel : « Dans nos doigts fusiformes liés et alanguis reposait quelque chose comme Dieu, ou l'idée qu'on s'en fait, c'est-à-dire notre amour, son amour paternel et mon amour filial. »

170 pages de respect, de tendresse et d'amour pour ce père dont Guy Boley nous raconte le parcours de vie, atypique et mouvementé, tour à tour – ou tout ensemble – forgeron, boxeur, acrobate et vaguement acteur, orphelin de père élevé à la dure, qui n'a connu que « l'école au rabais » et très tôt l'apprentissage, mais amoureux depuis l'enfance des livres et des mots : « Il faut l'imaginer, mon père ce héros, roi du monde et boxeur, assis dans la cuisine, les doigts encore gourds de tous les martèlements, les mains encore pleines d'escarbilles et de foudre, ouvrir son dictionnaire, son « Larousse illustré », et recopier des mots, au hasard de leurs formes, de leurs sonorités, de leur place dans les lignes, de leurs bizarreries ou de leur orthographe. Ou ne pas recopier et simplement tomber sur l'un deux dont il se demande comment il parviendrait, dans son quotidien, à le tordre sous sa langue pour construire avec lui des phrases aussi belles et volubiles que les fers emmêlés qu'il façonne dans son atelier sans même se demander comment il faut s'y prendre tant la chose va de soi quand ses mains lui racontent le chemin. »

Un homme habité de rêves secrets, d'ambitions contrariées par le destin et par la vie et qui transparaissent dans un petit carnet d'écolier que son fils retrouve après sa mort. Une découverte, un choc pour ce fils qui comprend que du père tant aimé, tant admiré pourtant il ne connaissait rien, ou pas grand-chose, et surtout pas l'essentiel : « J'ignorais que mon père avait des rêves si grands. Toujours on sous-estime les gens qu'on aime trop, ou ceux qu'on aurait dû aimer davantage. » Et le portrait, la vérité intime, secrète et émouvante de ce père méconnu de lui, le fils, comme de tous, c'est à nous que l'offre Guy Boley au travers de ces pages, en guise de « devoir de mémoire » filial et bouleversant : « Il me faut désormais le recoudre, ce passé déchiré, assembler pièce par pièce le manteau d'Arlequin, puis frapper les trois coups pour que le rideau s'ouvre et que sur les tréteaux, glorieux et souverain, apparaisse cet homme que je pourrai sacrer : mon père ce héros. Mon roi d'éternité. »

Un livre beau et fort, infiniment respectueux et digne, que j'ai beaucoup aimé.
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