Le roman de Guy Boley « A ma soeur et unique » publié chez Grasset nous raconte l'histoire d'un homme, Nietzsche, qui tente de transcender sa condition pour se consacrer à la réflexion, et nous plonge dans l'enfance et la vie d'adulte de ce héros de la pensée qui trouve malgré lui sa survie dans la folie car comme nous le dit Guy Boley dans ce podcast, quand on se cogne aux limites de l'entendement, c'est le néant qui revient parfois comme un boomerang.
Il s'agit aussi d'une histoire d'amour fraternelle qui finit mal, de blessures qui alourdissent le poids de l'existence, et de la littérature, de la philosophie, de la poésie, brandies comme les étendards du Salut.
Le roman de Guy Boley « A ma soeur et unique » publié chez Grasset a reçu le Prix des 2 Magots cette année, c'est le 5e livre de Guy Boley après « Fils du feu » publié chez Grasset en 2016, récompensé entre autres par le prix Françoise Sagan, le Grand Prix SGDL du premier roman. Il a écrit « Quand Dieu boxait en amateur » en 2018, paru chez le même éditeur et « Funambule majuscule : Lettre à Pierre Michon » suivie de « Réponse de Pierre Michon aux éditions Grasset en 2021 !
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Certes, j'aurais pu à ce moment-là commencer à penser que maman devenait folle. Mais pour un enfant, une mère n'est qu'amour.
L'église Saint-Martin des Chaprais est assez laide: il est préférable d'avoir la foi avant d'y entrer . (...) Elle n'a rien de commun avec ses somptueuses consoeurs gothiques qui élèvent l'âme, ses romanes qui la confinent, ses baroques qui la cisèlent. (p. 96)
Il l'aime, cette salle. C'est grâce à elle et à son indigence qu'il est devenu champion. C'est contre ça, aussi, qu'il s'est battu. Par fierté. Pour être au-dessus de cette misère, financière ou littéraire, maternelle ou orpheline, et se prouver à lui, et à tous ceux du club, que l'essentiel est en chacun, que le destin est comme un fer rougi à blanc que l'on peut plier sur l'enclume et auquel on peut donner la forme que l'on veut. (p. 117)
Seul l’art guérit les âmes. Seul l’art parvient à enlever à la vie l’absurdité qui la recouvre de son voile d’horreur et de sa vanité.[Nietzsche]
On ne choisit pas son enfance, on s’acclimate aux pièces du puzzle, on bricole son destin avec les outils qu’on a sous la main, …
Nul ne contredit l'abbé : personne dans le quartier, ne connaît Shakespeare. Ni aucun autre auteur de génie. Ni autre auteur tout court. C'est un quartier populaire, d'ouvriers et de cheminots, on y aime la boxe, l'opérette, le musette accordéon, on n'y lit quasiment pas, la culture est une affaire d'élégants , d'oiseux, d'aristocrates. Car lire est dangereux, ça instille dans les coeurs des mondes inaccessibles qui ne portent au fond d'eux qu'envies et frustrations; ça rend très malheureux quand on est gens de peu, de savoir qu'il existe, dans un ailleurs fictif, des vies sans rides, ni balafres, où les rires, l'argent, la paix, l'amour poussent aussi joliment que du gazon anglais. (p. 79)
(...) c'est ainsi que l'on devient un homme, un conquérant, un Attila en herbe : en reniant son passé, en écrasant autrui ; surtout s'il est petit ; surtout s'il nous renvoie l'image de ce que l'on fut naguère.
J'ignorais que mon père avait des rêves si grands. Toujours on sous-estime les gens qu'on aime trop, ou ceux qu'on aurait dû aimer davantage.
La société a des règles qu'il ne faut pas transgresser, surtout pas dans ce jeu codifié à l'extrême qu'est celui de la mort. Raison pour laquelle maman n'est pas devenue, par exemple, hystérique ou suicidée. Juste une douleur digne, calibrée.
Ce quartier fut toute sa vie, sa seule mappemonde, sa scène de théatre, son unique opéra.