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Citations sur Changer la vie ou changer le monde (2)

p. 102
Pour ne pas se dissoudre dans la fascination pour un milieu marginal et bohème, une vision libertaire de gauche doit proposer une solution aux problèmes sociaux au lieu de papillonner effrontément de slogan en slogan, conjurant la rationalité avec de la mauvaise poésie et des dessins vulgaires. La démocratie et l’anarchisme ne sont pas antithétiques ; la règle majoritaire et les décisions non consensuelles ne sont, de leur côté, nullement incompatibles avec une société libertaire.
Qu’aucune société ne puisse exister sans des structures institutionnelles c’est une évidence pour quiconque n’a pas été intoxiqué par Stirner et ses semblables. En refusant les institutions et la démocratie, l’anarchisme existentiel se coupe lui-même de la réalité sociale, rendant par là ses cris et sa rage inutiles : il n’est plus dès lors qu’une farce sous-culturelle à destination d’une jeunesse naïve et de consommateurs peuplant leur ennui de vêtements noirs et de posters à sensation. Prétendre que la démocratie et l’anarchisme sont incompatibles sous prétexte que la moindre entrave apportée aux désirs de la minorité, même « une minorité d’un seul », constitue une violation de l’autonomie personnelle, ce n’est pas plaider pour une société libre mais pour ce que Brown nomme une « collection d’individus » – en clair, un troupeau.
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p. 84-85
Tant nos ancêtres lointains que les indigènes existants auraient été incapables de survivre s’ils n’avaient pour tout guide que les idées « enchantées » dignes de Disneyland que leur imputent les actuels primitivistes. Les Européens n’ont certes pas permis aux indigènes de remédier à cette situation. Bien au contraire : les impérialistes ont honteusement exploité les natifs, se sont livrés sur eux à un véritable génocide, leur ont transmis des maladies sans remèdes, et les ont pillés sans vergogne. Contre un tel massacre, les conjurations animistes n’ont pas servi et ne pouvaient pas servir, comme l’a montré la tragédie de Wounded Knee en 1890, qui a apporté un démenti si douloureux au mythe des chemises fantômes imperméables aux balles.
Un point très important, c’est que la régression primitiviste chez les anarchistes existentiels a pour conséquence la négation des principales caractéristiques de l’homme en tant qu’espèce et de la potentialité émancipatrice que recèlent certains aspects de la civilisation euro-américaine. Les humains sont très différents des autres animaux en ce sens qu’ils font plus que simplement s’adapter au monde autour d’eux : ils innovent et créent un nouveau monde. Ce faisant, ils ne découvrent pas seulement leur pouvoir en tant qu’êtres humains, ils font aussi en sorte que le monde autour d’eux soit plus approprié à leur propre développement, tant sur le plan de l’individu que de l’espèce. En dépit de la déformation qu’une société aussi irrationnelle que la nôtre lui fait subir, la capacité à changer le monde fait partie de notre nature, c’est le résultat d’une évolution biologique – pas simplement le produit de la technique, de la rationalité et de la civilisation. Que des gens se prétendant anarchistes se fassent les avocats d’un primitivisme confinant à la bestialité, et qui est une exhortation à peine voilée à l’adaptation et à la passivité, c’est insulter des siècles de pensée, d’idéaux et de pratiques révolutionnaires et dénigrer les efforts mémorables entrepris par l’humanité pour se libérer de l’esprit cocardier, du mysticisme et de la superstition et pour changer le monde.
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