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Critique de c.brijs


Sous quel angle vous parler de ce titre sorti pour la première fois en 2004 et maintes et maintes fois  chroniqué par plusieurs générations de lecteurs ?

Plutôt que de vous servir un énième résumé et avis, je vous propose de vous énoncer mes dix raisons de le lire ou le relire :

1. Ce titre, comme les autres classiques de Pierre Bottero, a fait l'objet d'une toute nouvelle conception graphique.  Se déclinant en couleurs pastels, chaque titre reprend, sous cloche, un élément-symbole de l'histoire.  Comme la rose du Petit Prince, chaque univers est ainsi protégé et fin prêt à être passé à une nouvelle génération de lecteurs...  La surimpression en relief nous donne presque l'impression qu'on peut emporter cette petite part de l'auteur avec nous et qu'on peut en faire la collection dans nos propres cabinets des curiosités, nos bibliothèques. 

2. Plutôt que le récit en lui-même, sorte de revisite de l'amour courtois sur fond de bitume, c'est surtout la plume de Pierre Bottero qui séduit avant tout, par son efficacité poétique.  On y retrouve les prémisses de cette poésie marchombre qui a charmé tant de lecteurs. Même lorsqu'il décrit un décor aux antipodes du paradis, il y glisse ce brin de fantaisie que nous aimons tant :

"Une pluie fine et désagréable se mit à tomber alors que la nuit s'installait, achevant de donner à la cité une apparence sinistre.  le goudron gras luisait doucement, le béton exsudait l'angoisse, des poubelles renversées dégorgeaient leur contenu nauséabond.  Jusqu'à l'air qui était chargé d'une tristesse glauque presque palpable..."

3. Son récit alterne les points de vue.  Aux chapitres à la 3e personne qui relatent les événements en se centrant davantage sur l'un des deux héros, Tristan, répondent, en écho, les chapitres qui nous font entrer dans les pensées et ressentis de Clélia via les pages de son carnet.  Ce parti pris amène de la consistance à cette histoire d'amour qui se fraye progressivement, telle les fleurs de la couverture, un chemin à travers le béton et la tristesse de la cité.

4. Nos deux héros portent des prénoms hommages à la littérature romantique.  Tristan ne découvre que plus tard l'origine du prénom de Clélia, célèbre personnage de La Chartreuse de Parme de Stendhal.  Quant à cette dernière, lors de leur première rencontre, elle se moque gentiment de lui en lui indiquant : "Je suis désolée, Tristan.  raiment désolée.  Je ne suis pas ton élue, je m'appelle Clélia...".  Ce qu'il ne saisit pas non plus sur le moment !

5. de manière générale, ce récit rend hommage d'un bout à l'autre à l'amour des mots et de la littérature.

Clélia utilise un vocabulaire soutenu et imagé, à mille lieues du langage des cités, ce qui fait naitre pas mal de quiproquos entre Tristan et elle.  Au fil de l'histoire, elle lui partagera sa passion pour l'écriture et la lecture...  à la fois refuges et moyens d'émancipation. 

6.  Ma lecture a coïncidé avec le visionnage d'une série que je vous conseille : Snabba cash où s'entrechoquent les mondes impitoyables de la finance et des gangs des cités.   Même si le récit de Tour B2 mon amour est bien plus édulcoré et moins adulte (les personnages sont des adolescents), il n'a pas tant vieilli que cela.  Les ressorts à l'oeuvre  dans les bandes, le sacro saint code d'honneur, la difficulté pour ne pas dire l'impossibilité de s'en sortir, la rudesse qui y sévit mais aussi, paradoxalement, la tendresse qui peut unir ses membres qui se considèrent comme une famille est toujours d'actualité. Les codes de conduite entre jeunes ainsi que les règles tacites du collège que rapportent l'auteur, aussi...

7. A travers cette histoire, Pierre Bottero pose également la question de ce qui peut déterminer, qu'à un moment, on puisse reprendre en main les rênes de son destin : la rencontre avec une âme soeur ; celle d'un enseignant qui n'a de cesse de vous tirer vers le haut ; des adultes qui dépassent les incompréhensions, les reproches et cherchent des solutions... 

"- Je sais nager, c'est vrai, sauf que ça devient sacrément profond ces derniers temps...  Je fatigue un peu...  Parfois je rêve que je découvre une île où me reposer.  Une sorte d'île merveilleuse où il serait possible de..." 

8. Autre point central de ce récit, la pudeur autour des sentiments et des émois amoureux.  Sujets ô combien tabous entre jeunes.  Pierre Bottero circonscrit à merveille tout l'éclat et les difficultés qu'engendre un premier amour, un vrai, un grand...

"Désir.  Qui brûle.  Qui l'envahit.  le submerge.  Plus haut...  Silence."

9.  Même si la qualité et la profondeur des échanges entre Tristan et Clélia peuvent sembler trop beaux pour des adolescents, le lecteur ne peut que se laisser embarquer par leur justesse et leur poésie infinie.  Qu'est-ce qu'on aimerait avoir cette facilité de langage pour traduire aussi finement ses émotions et ses pensées, pour pouvoir faire mouche et prononcer les mots qui vont calmer les peines et les douleurs et donner des ailes...

10.  Un personnage-clé de l'histoire est un sycomore.  Clélia en a fait un ami, un confident.  Elle y accroche ses confidences qui s'effacent avec le temps et la pluie.  Une belle idée, à suivre...
Lien : https://lacoupeetleslevres.b..
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