Ce roman m'a été envoyé par Accro Editions, maison fondée par son auteur
Philippe Brandes dans le cadre d'un Masse Critique. On y suit l'apprentissage d'un jeune architecte, Alexandre, dans son apprentissage dans le Bruxelles intellectuel soixante-huitard, ses déboires amoureux et ses voyages autour du monde. Je n'aurais pas atteint cette dernière partie annoncée par le synopsis puisque le roman a fini par m'écoeurer.
Si le portrait d'une époque, d'une ville, d'un bouillonnement intellectuel est plaisant, si les débats autour de différentes approches de l'urbanisme et de l'architecture sont passionnants,
En ce qui concerne Alexandre a fini par me révulser par sa misogynie. Au cours de sa vie, Alexandre rencontrera de nombreuses femmes qui ne seront vues que comme des partenaires sexuelles aussitôt rencontrées, aussitôt jetées comme des mouchoirs en papier. Autant de femmes dont on ne s'intéresse que peu aux aspirations et aux talents, au profit d'un protagoniste lâche et antipathique.
Philippe Brandes n'hésitera pas à qualifier plusieurs de celles-ci de "castratrices" sans second degré aucun, ou à dépeindre un acte qui relève pénalement du viol sans en dire le nom - d'un ton parfaitement badin si ce n'est fantasmé.
Alexandre procède à un cunnilingus sur une partenaire encore endormie. Si la législation autour du consentement a évolué depuis les années 70, il est admis depuis dans le pénal belge depuis les années 80 que "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne qui n'y consent pas, constitue le crime de viol. Il n'y a pas consentement notamment lorsque l'acte a été imposé par violence, contrainte ou ruse, ou a été rendu possible en raison d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale de la victime." Et depuis la vague #MeToo qui a commencé en 2018, on ne peut plus prétendre qu'une personne endormie, même un.e amant.e régulièr.e, peut consentir. Ce roman est paru en 2022. Ce n'est qu'une phrase banale dans le roman. Mais ça veut tout dire.
On pourrait s'attendre d'un roman contemporain rétrospectif qu'il ait du recul sur
les années qu'il dépeint et sur leurs mentalités comme ont pu le faire Serge Joncour ou
Annie Ernaux (pour ne citer que mes dernières lectures bien que leur roman n'aient rien à voir avec l'architecture), pas qu'il en adopte les clichés rétrogrades. J'irai satisfaire mon intérêt pour Bruxelles, l'urbanisme et la pensée soixante-huitarde ailleurs.