L’écho
(pour Albert Ayguesparse)
Le ciel est sans nuages
qui partage à voix égale
la nuit et le jour
J’y sais l’alphabet du corps
Pas une lettre ne manque
qui lentement se dévoile
ô sombre prophétie
dans une fulgurance bleue
Je vais dans la poussière d’été
qu’étoile un infini soleil
Et mon amour multiplié
se fige là dans un dernier sommeil
(d’après Paul Delvaux)
La perspective amoureuse
Nul besoin de clé
pour passer la porte des champs
Il suffit de deux corps enlacés
pour embraser le ciel
Le niveau de la mer
la colline étriquée aux vitres sales
Au point du jour l’observatoire
désert et silencieux
Sont les indices profonds
quand perdurent le désordre et l’absence
d’un état des lieux
contestable
(On entend sourdre la mer
dans la chambre envahie)
(d’après René Magritte)
La mémoire
La mémoire en moi saigne comme la vie
C’est ma liberté de répondre ainsi
entre le tangible et l’intangible
aux faims et aux soifs souveraines
Les yeux fermés sur le sommeil et sa blessure
par quelle faille alors prend corps mon rêve
Et libre est la parole qui expire
dans la question secrète aux lèvres roses
(d’après René Magritte)
Aux culminations le vent bleu
Incendiant ses images
À ta lèvre tremble
L’empreinte du désir
Il dit dans ses pertes
Ses détours, les relèvements
De l’ombre, ton épousée
Ta reine, ta souterraine
Clarté. Il dit, mon amour
Toutes les sources de l’homme
Le rêve du poète
Il surgit de l’amour et de l’ombre
aux coutures vives du jour
Il remonte aux plus vieux mythes
inscrits dans la pierre
Il est une taie aveugle
ou une note de musique
Pour que l’œil se tourne en dedans
(d’après Giorgio de Chirico)
L’entente jaillit
entre tant d’espaces dévastés
entre tant de nuits
Avec le sourd discours
des chiens de mer
des lampes naufrageuses
Tu portes le haut éclat
la coupe qui énonce
Blanche vigie du soir
qui élève
qui éclaire
Passer dans les fièvres
A la beauté d’une présence
Une seule faille retentit
Aimer conjugue l’incendie
Parler restitue
Le déroulement lent
D’un temps qui accorde
Des tumultes Surgit la clarté
Retrouvée