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Après la mort accidentelle de leur père, les trois soeurs Gerta, Truda et Ilda sont élevées par leur seule mère Rozela, dans leur maison d'un village de Cachoubie, en Pologne. Alors qu'aux épreuves de la guerre succède la terreur stalinienne, toutes quatre acquièrent l'habitude de se débrouiller, vaille que vaille. Viendront mariages et enfants, joies et malheurs : rien ne les empêchera jamais de faire bloc, en véritables piliers de la famille…


Commençant par sa piquante scène finale, puis alternant les points de vue de chacune des quatre héroïnes en une myriade de brefs épisodes illustrant leur quotidien sur un demi-siècle, le récit décrit un cycle complet de saisons, en même temps qu'il accumule grands et menus faits de vie comme autant de couches de sédiments ou de cernes d'un arbre, pour restituer l'existence de ces femmes dans la Pologne d'après-guerre et des quelques décennies suivantes. Ces quatre fils de vie s'entrelacent ainsi pour former la même trame linéaire : celle de femmes appliquées ensemble à faire face à l'adversité sans faiblir et en ne comptant d'abord que sur elles-mêmes, les défaillances des hommes – entre surmortalité, inconstance et lâcheté – les ayant habituées à ne les voir endosser que des rôles satellites.


Rien n'est facile pour Rozela et ses filles, mais jamais aucune ne songerait même à se plaindre ou à baisser les bras. A vrai dire, Rozela ne survit aux atrocités subies pendant la guerre qu'en enfouissant les traumatismes au plus secret d'elle-même, et en se jetant corps perdu, tout sentiment bridé, dans la mêlée d'une existence où tout se conquiert de haute lutte, et à condition de savoir faire feu de tout bois. Dans cette Pologne tombée dans le giron soviétique, assurer les fondamentaux de l'existence est une lutte de tous les instants, et c'est au moyen d'une débrouillardise, d'une capacité d'adaptation et d'une endurance de tous les instants que les femmes de la trempe de Rozela assurent le quotidien en tâchant de compenser l'usure ou l'absence de leurs hommes. Cela ne se fait pas sans une certaine forme de brutalité : l'on n'a guère le loisir de s'attendrir, ni de s'appesantir sur soi-même. L'éducation se fait à la dure, et si une solidarité sans faille les unit, l'action chez elles tient lieu de sentiment.


Par nécessité impitoyablement coriaces, à commencer avec elles-mêmes, les quatre femmes de ce récit cachent en leur tréfonds une humanité des plus attachantes. Leur audace et leur inventivité multiplient les épisodes dont l'évidente authenticité ou, parfois, l'allure de légendes familiales, entretiennent l'impression d'une chronique fidèle à ce que l'auteur aurait pu recueillir de la vie de ses mère, tantes et grand-mère. Tantôt dramatiques, tantôt cocasses, ce sont mille détails de l'existence de ces femmes qui parviennent dans ces pages à nous les rendre particulièrement proches et vivantes. Et, en fin de livre, l'on revit cette fois avec tendresse et amusement, la scène initiale qui avait tant piqué notre curiosité de lecteur.


Cette chronique familiale, qui, au travers des menus faits de leur quotidien, parvient avec tant de naturel à faire revivre deux générations de femmes pendant la période communiste de la Pologne, s'avère un témoignage historique que son objectivité et son authenticité, autant que son écriture vive et pleine d'humour, rendent tout à fait passionnant. Coup de coeur.


Merci à Babelio et aux éditions Noir sur Blanc pour cette excellente découverte.

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Les coeurs endurcis ne ressemble guère aux quelques sagas familiales que j'ai pu lire jusqu'à présent. Pas de place pour les crises passionnelles, les trahisons, les débordements d'affection. Martyna Bunda raconte le quotidien ordinaire d'une paysanne de Cachoubie et de ses trois filles, de la grande pauvreté des années 30 à la République populaire de Pologne des années 70 .

Tout se déroule comme si l'auteure était à la fenêtre et observait ce qui se passe. Il n'y a aucun point culminant aucun événement au centre de cette histoire, avec une belle assurance l'auteure polonaise laisse glisser le temps au rythme des saisons autour de nos héroïnes qui le sont que par le regard que porte Martyna Bunda sur elles. Elle chuchote quelques secrets familiaux, les traumatismes de la fin de la guerre et d'autres blessures mais la connivence avec le lecteur ou la lectrice s'arrête là. Elle ne fouille pas les tiroirs pour sonder le fond des âmes de ces femmes qui, portées par la force de leur courage et de leur détermination, ne s'abandonnent guère au commerce des confidences.
Mais on ne retrouve pas pour autant les codes associés au roman rural français : pas de fatalisme appuyé, ni de violence latente, ni encore d'une peinture grise et mutique des personnages. Ici le tragique n'est ni surjoué, ni glorifié parce que l'essentiel est ailleurs, le roman raconte autre chose. Il montre tout ce qui fait l'existence sans que l'on s'en aperçoive : en croisant les récits à quatre voix, en faisant entrechoquer des instantanés qui entrent en résonance les uns avec les autres, Les coeurs endurcis montre comme les vies de ces femmes sont si tissées, si constituées entre elles, malgré les ressentiments occasionnels et les tempéraments contrastés. Face aux mauvaises langues qui voient en la mère une bâtarde, face aux hommes sources de malheurs, et face aux appels de la ville à l'égard des filles qui se soldent par des déceptions, il reste la solidarité ou la sororité selon la nouvelle expression consacrée. le récit met en évidence des liens si forts entre elles qu'ils ne laissent guère de place au monde extérieur, la réalité communiste même si elle moins présente dans le monde rural se devine seulement du coin de l'oeil à travers quelques anecdotes.

Malgré quelques invraisemblances, je me suis passionnée pour ce roman. Non qu'il soit remarquable d'un point de vue littéraire mais il y a un élan qui accompagne chacun des personnages féminins qui éloigne tout sentiment de misérabilisme. Il a par ailleurs réussi à se frayer un chemin dans mon esprit allant jusqu'à susciter des réminiscences familiales. J'y ai vu ma grand-mère polonaise, jeune veuve, aussi, qui a dû élever ses filles seule avec la même abnégation et la même volonté de fer que Rozela dans une maison qui a également servi de refuge pour chacune de ses filles. Rien que pour ça, je remercie Babélio et les Éditions Noir sur Blanc pour cette masse critique privilégiée.
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C'est peu de dire que l'histoire récente de la Pologne n'a pas été un long fleuve tranquille. Champ de bataille où s'affrontent à partir de 1939 l'Allemagne nazie et l'URSS, elle n'est libérée du joug de l'une que pour tomber dans les tenailles communistes de l'autre à la fin de la guerre.
Dans un tel contexte, la population locale ne vit pas, elle survit. C'est le cas de Rozela et ses trois filles Gerta, Truda et Ilda. A partir de la mort de son mari dans les années 30, Rozela les a élevées seule, dans un petit village de Cachoubie, une province polonaise. Elles ne peuvent compter que sur elles-mêmes, et certainement pas sur les hommes : après la guerre, les filles de Rozela auront bien des maris ou des amants, mais ceux-ci se distingueront davantage par leur manque d'épaisseur, leur faiblesse ou leur lâcheté que par leur courage et leur solidité. Et donc, puisqu'il le faut bien, c'est Rozela et ses filles qui le seront, courageuses et solides, pour traverser chacune à sa manière les épreuves que la vie leur infligera généreusement : hivers glaciaux, manque d'argent, de nourriture, terreur stalinienne et tracas causés par la bureaucratie soviétique, elles se démèneront, ensemble ou séparément, pour vivre décemment. Elles connaîtront des moments de fragilité, d'hystérie ou de désespoir, mais elles ne cesseront jamais de lutter. Sauf peut-être Rozela, quand les traumatismes subis pendant la guerre remonteront à la surface à la fin de sa vie et auront raison de sa... raison.

J'ai eu du mal à entrer dans ce roman et à m'intéresser à ses personnages. La narration alterne les points de vue des quatre héroïnes, et au début, j'ai trouvé l'ensemble un peu décousu, je n'arrivais pas à mettre de l'ordre dans les différentes versions des mêmes anecdotes. Les personnages ne m'apparaissaient pas particulièrement sympathiques mais au contraire plutôt dénués de sensibilité, ne laissant la place qu'à la colère, le ressentiment, le fantasque. Des coeurs endurcis desquels s'échappe parfois une pression trop forte. Puis à partir de la moitié du roman, sans que je comprenne bien pourquoi, peut-être un geste doux par ci, un mot plus tendre par là, j'ai trouvé ces quatre femmes de plus en plus touchantes, attendrissantes, mais forçant toujours le respect par leur courage et leur ténacité.
A travers ces chroniques de la vie quotidienne, ce roman énergique dresse le portrait de deux générations de femmes attachantes, dans le contexte historique trouble et troublé de la Pologne. Un roman tragi-comique qui rend hommage à ces femmes coriaces, victimes de la guerre et des (de certains) hommes.

En partenariat avec les Editions Noir sur Blanc via Netgalley.
#LesCoeursendurcis #NetGalleyFrance
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« Les Coeurs endurcis », c'est avant tout le destin d'une mère et ses trois filles qui vont devenir des femmes.
Cette saga familiale se déroule en Cachoubie, une province polonaise. Tout débute dans les années trente avec Rozela la mère. Ses trois filles, Gerta, Truda et Ilda, elle doit les élever seule après la mort de son mari. Outre ces quatre femmes, l'histoire tourne autour de la maison que Rozela a construite tout au bout du village de la Colline-aux-Vierges.
« C'était l'année 1932, l'hiver. Les murs n'avaient pas encore connu la chaleur. La maison était solide »
Puis la guerre est arrivée avec son lot de malheur, invasion de soldats allemands, puis russes et Rozela qui avant tout a protégé ses filles n'a pu se soustraire à la violence des hommes. Une trace de sang, incrustée dans le plancher en témoigne. Ce terreau d'horreur, de pauvreté et d'incertitudes va modeler les caractères de ces femmes pour lesquelles la vie doit se vivre coûte que coûte. Il faut s'endurcir et museler son coeur.
« Fille naturelle d'une fille naturelle, condamnée à vivre dans un sentiment perpétuel de honte, Rozela gardait la tête haute et enseignait la même chose à ses filles. Noble. Quoique paysanne. Courageuse. Quoique femme. »
De tempéraments différents, les trois filles se battent contre l'adversité. L'ainée, Gerta, la plus raisonnable, se souvient lorsqu'elle était cachée dans la cave et qu'elle entendait les soldats marcher au-dessus de sa tête. Elle admire sa mère, si forte, et l'aide au mieux avec les poules et les cochons.
Truda est l'amoureuse et la rêveuse. Son fiancé est rejeté par sa mère parce qu'il est allemand, elle jette alors son dévolu sur Jan le gitan. Il l'épousera mais elle continuera à demander à son ancien fiancé de lui envoyer de Berlin d'élégantes chaussures à talon.
Des trois soeurs, Ilda la fantasque est la plus rebelle. Vêtu d'une combinaison en cuir, elle conduit un side-car trouvé dans un fossé et se moque du qu'en dira-t-on. Elle aura une liaison avec un sculpteur marié. Il lui offrira des robes couteuses, elle sera son modèle pour une statue gigantesque.
Chacune des soeurs subira des tempêtes, des épreuves, des déceptions. Il y aura aussi des moments heureux, la vie quoi ! Elles connaitront les tromperies et la jalousie des hommes, elles mettront des enfants au monde. Gerta aura trois filles, Truda, deux fils, le sien et l'enfant illégitime de Jan qu'elle élèvera comme le sien lorsque son mari sera incarcéré.
A chaque gros temps, la maison de la Colline-aux-Vierges devient le port calme où se réfugier. Et si parfois les soeurs et leur mère peuvent se montrer impitoyables entre elles, elles finissent toujours par se retrouver grâce à ce lien très fort qui les unit.
La construction très originale du roman nous fait traverser la vie de ces quatre femmes selon les saisons et les évènements qui jalonnent leurs vies. Cela débute par un enterrement et se clôt par la mort de Rozela. L'histoire est découpée en courts chapitres, chacun débutant par le prénom de l'une des quatre femmes, créant un récit dense comme les fils de couleurs différentes qui, une fois tissés, forment une toile serrée, inébranlable comme la solidarité entre ces femmes.
Malgré l'époque troublée, émaillée de drames, le récit n'est pas larmoyant. Il y a une incroyable énergie dans l'écriture de Martyna Bunda et on se laisse emporter par les aventures à la fois tourmentées et drôles de ces « pasionarias » de la solidarité féminine.
Je remercie les éditions Noir sur Blanc et Masse critique de Babelio pour la découverte de ce roman captivant.
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Le roman débute sur une scène qui se passe en 1975, avec un étrange enterrement : trois soeurs accompagnant un cercueil, celui de Tadeusz Gelbert, sculpteur de son état qui fut le compagnon de l'une d'elles, Ilda, mais ne s'est jamais réellement séparé de son « épouse aimante », présente elle-aussi, scène qui nous permet de faire la connaissance de cette famille que l'on va suivre au gré des ans et de l'Histoire.

On entre ainsi dans cette famille étrange, composée de la mère Rozela et de ses trois filles : Gerta, Truda et Ilda, dans leur ferme « La colline-aux-Vierges » située dans le village de Dziewcza Gora.

Rozela, n'a pas eu une vie facile : son mari est mort accidentellement, dans les années trente et on l'a « indemnisée » en lui faisant construire sa maison, la première en « dur » du village. A la fin de la guerre, elle a été violée durant plusieurs jours par des soldats russes qui cherchaient de l'argent, brûlée au fer rouge, ce qui laissera une trace indélébile sur son abdomen. Elle refusera toute sa vie de parler de ce qui s'est passé ce jour-là, se contentant de tenir le fer à repasser à distance et interdire à quiconque de le toucher. Elle veut oublier cette horrible guerre, les nazis, puis les bolcheviks, et reprendre une vie normale.

Une des filles était à Berlin, travail forcé, qu'elle a fui avec un Allemand « résistant » Jakob » mais Rozela a refusé que sa fille épouse un nazi, alors qu'elle-même caché des gens en fuite dans sa cave (Juifs ou non) ce qui n'empêchera pas Truda d'entretenir des liens épistolaires avec lui.

La vie à la ferme n'est pas simple, on manque de tout, mais Jan, un milicien, amoureux de Truda, se débrouille pour leur apporter nourritures, poules, cochons, paons… et finit par l'épouser. Tout ira bien, naissance de leur petit garçon, Jan-Flamme qui multiplie les bêtises… Un jour, elle apprend qu'il a eu un autre fils et en voulant enquêter sur son passé elle attire l'attention de la milice sur lui et direction prison, torture, condamnation après un procès à charge on est à l'ère stalinienne…

Gerta, va épouser un horloger, quelque peu étrange aussi, Edward, le seconder au travail, tout en s'usant les yeux sur les nappes qu'elle brode et vend pour arrondir les fins de mois. de leur union naîtront trois filles.

Ilda, la petite dernière, fait la connaissance d'un sculpteur, avec lequel elle partagera sa vie malgré la présence plus ou moins rapprochée de sa première femme, dont il ne se séparera jamais. C'est Ilda qui gère la maison, puis la maladie, de Tadeusz, narcissique, manipulateur… et ils n'auront jamais d'enfants.

Les trois soeurs tentent, toutes les trois, de vivre leur vie de manière autonome, de travailler, chacune dans leur domaine, mais chaque fois qu'un problème surgit, c'est le retour à « La colline-aux-Vierges » qui sera maintes fois repeinte, réorganisée…

Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Une saga polonaise résolument féminine et féministe ! L'histoire d'une famille du XXème siècle, de mère en filles : 4 femmes et 4 saisons qui déroulent les années.

Après la mort accidentelle de son mari, Rozela élève seule ses trois filles : Gerta, Truda et Ilda. La guerre puis le stalinisme les oblige à ne pas laisser transparaître leurs sentiments, à s'endurcir pour ne pas faiblir et continuer à avancer dans la vie qui ne leur épargne rien !

Quelques hommes s'installent dans leur quotidien mais les événements, petits ou grands, les ramène en Cachoubie dans leur vieille maison auprès de leur mère, malgré ou grâce à leurs conflits et différences !

Des vies au quotidien avec les peines et les joies, racontées simplement et joliment, où des petites choses sont capables de prendre une grande place, jusqu'à nous faire rire ou pleurer !

Un livre magnifique malgré la laideur et les haines qui entourent ces femmes et qui se veut aussi un témoignage de ces époques troublées ! Pologne, terre d'Histoire et de conflits, toujours convoitée par des voisins avides et dont les femmes sont les éternels piliers ! Coup de coeur 💖

#LesCoeursendurcis #NetGalleyFrance

Challenge Multi-Défis 2022
Lecture Thématique février 2022 : Les petits livres
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Les coeurs endurcis raconte la vie de Rozela et de ses trois filles , Gerta , Truda et Ilda
.
Le roman débute dans les années 30 dans une ferme d'un petit village de Pologne en Cabouchie , aucune épreuves ne leur seront épargnées .
Il y a l'hiver avec ses températures terribles , le travail éprouvant à la ferme , la seconde guerre mondiale et l'époque stalinienne .
Rozela , la mère va subir les pires outrages par les soldats russes à la fin de la guerre , cette épreuve va rester enfuie pendant des années pour rejaillir dans ses vieux jours sous la forme d'une sorte de folie , heureusement, elle sera soignée par un médecin qui se rend compte qu'il s'agit d'une blessure ancienne , invisible car logée dans l'inconscient .
Rien ne sera épargné non plus aux trois filles , amours contrariées , mari arrêté par la milice …
Malgré tout , Rozela et ses trois filles traverseront
les nombreuses épreuves avec dignité , c'est un roman de femmes où les hommes ont une place secondaire , même si pour moi j'ai ressenti une grande empathie pour Jan dit le gitan et son histoire tragique
Un roman sur une époque tourmentée , où il y eut des déplacements gigantesques de personnes , où la vie chez les vaincus à Berlin deviendra bientôt plus facile qu'en Pologne .
Un beau roman aux personnages attachants qui malgré le titre Les coeurs endurcis ne perdront jamais leur humanité .
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Rozela et sa mère Otylia mènent une vie simple et retirée dans une vieille maison. La fille est une enfant illégitime, car son père n'a pas pu honorer son rôle, ni celui de mari d'ailleurs. Bien que stigmatisées par les voisins, elles portent la tête haute pour ne pas avoir honte, et Rozela a toujours des rubans tissés dans ses cheveux, comme il se doit. Devenue adulte, Rozela épouse Abram et donne naissance à trois filles : Gerta, Truda et Ilda.
C'est ainsi que commence la saga d'une génération de femmes extraordinaires qui s'unissent dans la solidarité pour faire face à l'adversité sur plusieurs décennies. Gerta, l'aînée, est toujours fiable, sensible à ce que disent les gens, travailleuse, débrouillarde, courageuse. Truda, est toujours au centre de l'attention et dégage un charme particulier et surtout, elle aime la vie. La plus jeune, Ilda, aime provoquer, rouler sur sa moto et faire ce qui lui plaît.
Nous découvrons les destins tumultueux de ces femmes sur fond d'événements importants : la Seconde Guerre mondiale et les années d'après-guerre qui s'avèrent terribles également. Outre les personnages féminins, il y a aussi des hommes dans le roman : maris, amants, fils, pères, leur présence est importante, car elle a un impact significatif sur la vie quotidienne des femmes, mais pas que...
La vie de Rozela et de ses trois filles n'est pas rose et elles ne s'entendent pas toujours, les quatre sont loin d'être une image idyllique. Les soeurs ont leur caractère, mais dans les moments les plus difficiles, elles sont capables de surmonter leurs préjugés et elles savent qu'elles pourront toujours compter sur un soutien et un amour mutuels.
le style est loin d'être sentimental, parfois froid, même brutal, bien qu'elle décrive des situations intimes, souvent douloureuse et cela m'a fait ressentir l'authenticité de l'histoire. J'ai été charmée par chacune des trois soeurs, malgré (ou peut-être à cause) du fait qu'elles sont loin d'être parfaites. L'histoire est tantôt amère, tantôt triste, tantôt pleine d'espoir, tantôt même heureuse, mais elle est surtout une sorte d'hommage aux femmes, à leur force, à leur capacité à s'unir dans les moments difficiles et à la solidarité.
"Les coeurs endurcis" est le premier roman de Martyna Bundy et elle fait déjà partie de ces auteurs dont j'attends avec impatience la sortie du prochain ouvrage. Coup de coeur!
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Une histoire à quatre voix, voix polonaises dans les années 30 d'abord, puis jusqu'aux années 70-80.
Une mère, veuve, Rozela, fille naturelle d'Otylia , célibataire, renvoyée du manoir où elle travaillait. Et ses trois filles : Gerda, l'aînée, qui va épouser Edward ; Truda, devenue l'épouse de Jan le Gitan et mère d'un Petit-Jan, après un affreux accouchement à domicile ; et enfin la plus fantasque, la plus rebelle, Ilda, combinaison de cuir et side-car, qui a longtemps joué à être un garçon. La voilà devenue mère nourricière du bébé Jan, délaissé par Truda. Elle qui n'a jamais eu d'enfant donne le sein, y compris à son compagnon, Tadeuscz Gelbert, sculpteur, marié et père de deux garçons, étrange personnage pleurard et exigeant, jaloux et tyrannique.

Nous sommes en Cachoubie, province polonaise du Nord, donnant sur la Mer baltique. Il y a eu les nazis et leurs horreurs, les libérateurs russes et leurs exactions : les hommes ne sont pas des modèles. Rozela - et combien d'autres - a dû subir leur violence et en être à tout jamais marquée. Elle semble dure avec ses filles parfois, mais quel avantage y aurait-il à leur apprendre la douceur ?

Sur fond historique communiste où les magasins sont vides et les logements introuvables, les trois filles vivent leur vie et celle de leur mère, devenue à-demi folle. On pourrait s'attendre à du pathos et à de la douleur à chaque page mais il n'en est rien. La passion slave habite chaque instant, passant du tragique au burlesque en un clin d'oeil. Une mère marquée au fer par les Russes, un époux emprisonné et torturé pour trahison d'État voisinent avec une jeune femme chevauchant un sanglier libidineux qui donnera naissance à une prétendue race de porc rare et hors de prix : le cochon à frange et voûte palatine noires ! Ailleurs, les paons se livrent à des luttes acharnées au point de perdre leurs plumes, des lapins en chaleur font un vacarme épouvantable dans les clapiers. Et l'on dépèce savamment les porcelets élevés avec amour. Nécessité fait loi.

Premier roman d'une auteure prometteuse, traduit du polonais, à suivre. Merci à Masse critique de Babelio et aux éditions Noir sur Blanc pour cette découverte.
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Ce n'est pas un roman facile à lire. Pas grand chose ne semble avoir été épargné à ces quatre héroïnes, dont nous découvrons le destin, au fil des années, après la seconde guerre mondiale. "Les coeurs endurcis", ce n'est pas tant que les quatre femmes sont devenues insensibles, c'est que les choses de la vie les a forcées à renfermer leurs sentiments, pour tenir le coup, quoi qu'il advienne.

Ce récit n'est pas linéaire, nous suivons une multitude de petits épisodes, mettant en scène l'une ou l'autre soeur, montrant les épreuves qu'elles ont traversées, surmontées, ou enfouies au plus profond d'elles-mêmes. Se confier ? Quasiment impossible. Puis, à quoi bon partager un fardeau ? Unies, elles le seront toujours, malgré des choix de vie différents : leurs liens seront toujours forts, quoi qu'il arrive.


Le roman ne sombre pas non plus dans le pathos. Les faits sont là, il est impossible de les changer. La nécessité de survivre, de trouver de quoi subsister, dans ce village cachoube, est déjà bien assez compliqué comme cela. Agir pour ses soeurs, c'est mieux que leur dire "je t'aime". 

Et les hommes ? J'ai presque envie de dire qu'ils ne font que passer, n'apportant pas aux femmes la force, le soutien dont elles auraient besoin.
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