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Critique de Dinoscope


Publié pour la première fois en 1975, ce roman nous invite à découvrir le devenir de trois anciens états américains – la Californie, l'Oregon et l'état de Washington -, après avoir fait sécession avec le reste des États-Unis d'Amérique pour fonder une société fondée sur l'écologie radicale.
Après vingt-années passées dans l'ignorance mutuelle et absolue, l'une de l'autre, et alors même que l'Écotopia s'inscrit dans le grand concert des nations, les États-Unis obtiennent, après d'intenses tractations diplomatiques, d'y envoyer, pour six semaines, un « émissaire » en la personne de William Weston, journaliste pour le Times-Post.

« Spécialiste incontesté des relations internationales », William Weston a donc « pour mission d'explorer le mode de vie écotopien sous toutes ses formes, à rechercher la vérité qui se cache derrière les rumeurs, à décrire en détail le fonctionnement concret de cette société nouvelle, à pointer ces problèmes et, le cas échéant, à admettre ses réussites. »
Cela nous amène à la particularité de la narration de ce roman qui alterne les notes personnelles du journaliste et ses articles. Une double narration qui a fortement contribué à attiser ma curiosité pour cet ouvrage dans la mesure où je l'envisageais pour une histoire que je coucherai sans doute sur le papier une fois acquis mes droits à la retraite.
Ernest Callenbach, lui-même journaliste, ambitionne de nous présenter « non pas la description littéraire d'un monde parfait, mais celle d'un monde perfectible qui serait néanmoins sur la bonne voie », dixit Brice Matthieussent, en préface de l'ouvrage dont il est le traducteur.
Et force est de constater qu'Ernest Callenbach parvient parfaitement à nous partager son projet de société – avec parfois une approche visionnaire qui n'a rien à envier à celle de Jules Verne -, sans passer sous silence les imperfections et contradictions de cette société qui a autant de préjugés sur les États-Unis que ces derniers en ont sur elle. Malgré tout, l'ensemble pêche par réalisme car l'auteur se montre finalement assez peu dissert sur les difficultés rencontrées lors de l'émergence de cette société radicalement différente, en à peine 20 ans. J'aimerai partager cet optimisme, mais sans doute en apprenons-nous davantage sur cette révolution écologiste dans le prequel, Écotopia Emerging, publié en 1981. En cela, Écotopia parviendra difficilement à convaincre au-delà du cercle des convaincus de la décroissance.
Je trouve d'ailleurs qu'Ernest Callenbach prête trop facilement le flanc aux critiques des mouvements pour la décroissance, en donnant du peuple écotopien, une vision relativement arriérée, que ce soit en s'appesantissant sur leur vie sexuelle fortement libérée, ou par ce passage, page 141, où William Weston se ravise de prendre ses hôtes en photo : "Pour les écotopiens, ai-je appris par la suite, la photographie relève de la magie noire, comme si l'on essayait de geler le temps, de tricher avec la biologie, de s'opposer au changement et à la mort."

Si Écotopia parvient à nous intriguer et à interpeller par la richesse des articles de William Weston, le roman déçoit cependant par le récit personnel du journaliste/narrateur. Au contact de cette société radicalement différente de ce qu'il connaît à New-York, ce père divorcé, débarqué sans véritable a priori, va tomber sous le charme de la fougueuse Marissa et, avec elle, d'Écotopia. Sans adhérer totalement au projet écotopien, il finira par s'y sentir chez lui : si cette évolution est logique et prévisible au regard de l'ambition quasi pamphlétaire du roman, il n'en demeure pas moins que l'ensemble peine à convaincre et se ponctue par un final ridicule. Contrairement au projet de société qu'il décrit, Ernest Callenbach donne l'impression de ne pas savoir quoi faire de son personnage principal et, effectivement, il n'en fait pas bon usage, tous les enjeux liés à sa position d'émissaire officieux et à sa vocation de journaliste étant étouffés au profit de l'exploration de ses seuls émotions.
Un voyage en Écotopia qui vaut le détour, même si j'aurais aimé le passer en bien meilleure compagnie.
Lien : https://www.dinoscope.photo/..
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