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sur 531 notes
« Ecotopia » est un classique de la littérature écologique, une utopie écrite en 1975, qui m'a donné quelques frayeurs au départ : si l'écologie m'intéresse au plus haut point, j'aime lire sur ce sujet des romans car c'est, pour moi, la meilleure porte d'entrée pour l'aborder. J'alterne parfois avec des essais plus pointus mais le roman reste ma priorité pour que derrière des mots, parfois galvaudés ou ressassés telles des ritournelles, il y ait des sentiments, un éveil, un ébranlement. le roman a en effet cet immense avantage de convoquer non seulement la raison mais de faire appel également au coeur. Or, ce livre a un ton tellement pédagogique et dogmatique que j'ai bien cru tenir entre mes mains un essai déguisé, voire un pamphlet politique par moment. En réalité c'est bien plus que ça. Certes la découverte de l'économie et de la société de ce pays insolite, dans tous ses détails, fait penser à une fine observation sociologique. Mais c'est également l'histoire d'une rencontre, de la métamorphose d'un homme et une histoire d'amour.

Car oui Ecotopia est un pays. Trois Etats de la côte ouest des Etats-Unis (la Californie, l'Oregon et l'Etat de Washington) décident de faire Sécession, de s'isoler et de bâtir une société écologique radicale baptisée Ecotopia. Vingt ans après, la timide reprise des liaisons diplomatiques, entre les Etats-Unis et Ecotopia, autorise la visite d'un journaliste américain dans ce pays. Sa mission pendant plusieurs semaines consiste à explorer le mode de vie écotopien sous toutes ses formes, à pointer d'éventuels problèmes et à admettre ses réussites. Il est curieux mais sceptique et plein de préjugés pour ce pays dirigé par une femme. le livre alterne ses points de vue personnels et ses articles qu'il envoie au fur et à mesure à son journal.

Tout est passé en revue : le recyclage, la minimisation des déchets, l'agriculture sans pesticide, l'absence de voiture, l'égalité entre les hommes et les femmes, la famille élargie, le contrôle démographique, les 22 heures de travail hebdomadaires, la fiscalité, l'absence d'esprit de compétition, le rapport à la nature et notamment le rapport sacré à la forêt, le rapport aux technologies, l'autogestion des ouvriers…Il y a un parti pris évident de la part de l'auteur, on adhère en totalité, partiellement ou pas du tout, mais dans tous les cas c'est bien un modèle économique en rupture totale avec le modèle capitaliste qui est décrit et qui résonne avec certaines solutions que nous tentons de mettre en place aujourd'hui, que ce soit celles visant à faire des déchets de certaines industries les matières premières d'autres, que ce soit les principes de l'écoconception, les tentatives de sobriété, le retour à une consommation locale…

« L'Écotopien désireux d'acheter une importante quantité de bois, par exemple pour construire une maison, doit travailler plusieurs mois dans un camp forestier : planter des arbres, entretenir la terre et dans l'idéal mettre en branle le processus de croissance végétale qui permettra un jour de remplacer le bois qu'il achète. (C'est une belle idée, très poétique mais assez absurde, même si les gens prennent ainsi conscience des ressources forestières dont ils bénéficient.) »

« de manière mystérieuse, les Écotopiens ne se sentent pas « séparés » de leur technologie. Leur attitude rappelle un peu celle des Indiens : le cheval, le tipi, l'arc et les flèches sont tous sortis, comme les êtres humains, du sein de la nature, et ils entretiennent avec elle un lien organique ».

Arrivé en simple observateur dubitatif, notre américain devient partie prenante enthousiaste, partisan et amant engagé dans la construction d'un monde meilleur. Il vit une véritable transformation et son histoire d'amour passionnée avec une écotopienne va le placer devant un dilemme : choisir entre deux mondes.

« Ecotopia » est une utopie porteuse d'espoirs sur les réponses à apporter au problème écologique d'une troublante actualité. Alors que les concepts de l'économie circulaire se diffusent de plus en plus, nous constatons que toutes ces idées étaient comprises et maitrisées dans les années 70. Cette utopie lumineuse vient en contrepoint, parmi mes lectures, à la dystopie du sublime Symphonie atomique d'Etienne Cunge paru le mois dernier. Lorsque le premier propose un idéal et fait rêver, le second nous offre à voir les conséquences du réchauffement climatique dans 50 ans, pour nous qui sommes peut-être à un point de non retour dans cette période que nous traversons, nouvelle ère géologique durant laquelle nous sommes en train de détruire notre écosystème, ère qualifiée parfois d'Anthropocène et démarrée à l'aube du 19eme siècle avec la Première Révolution Industrielle et l'extraction des énergies fossiles. Il faut dire que ces deux livres n'ont pas été écrits à la même période. A l'utopie possible des années 70 a-t-on atteint un point de non-retour tel que nous voyons fleurir à foison les dystopies ?

Ce livre a été écrit en effet en 1975. Posons le contexte. Nous sommes après le premier choc pétrolier des années 1973/1974 qui a sonné les États-Unis, à tel point que Carter voudra faire entrer les États-Unis dans une nouvelle ère, l'ère des énergies renouvelables. le président, qui sent le vent gronder dans la société où les mouvements écologistes se font entendre, fera même poser des panneaux solaires sur le toit de la maison blanche. Nous sommes également après le rapport Meadows de 1972, le rapport commandé par le club de Rome, portant sur les limites de la croissance. Il présentait 13 scénarios concluant, si rien n'était fait, à la mort ou au déclin de la société industrielle du fait de la pollution, de l'extraction des énergies fossiles, de la croissance démographiques, de la baisse de la biodiversité. Les années 80 et le retour des politiques libérales avec Reagan et Thatcher auront raison de cette prise de conscience et tueront dans l'oeil cet éveil écologique qui aurait pu tout changer. le livre d'Ernest Callenbach prend ses racines dans ce contexte économique et politique. le changement est alors possible, écrire une utopie semble être une évidence. Proposer et faire rêver pour oser la rupture…

J'ai aimé assister à la transformation du journaliste. J'ai adoré voir à quel point les choix écologiques, économiques et politiques ont des impacts sur les personnes, sur leur rapport à la vie, aux autres, à la sexualité, à la nature.

« En Écotopia, hommes et femmes ont cette aisance naturelle propre aux animaux. Au Cove, ils restent longtemps allongés et détendus, pelotonnés par terre ou sur un canapé, étendus au soleil sur de petits tapis ou des nattes, presque comme des chats. Ils s'étirent, changent de position, font de mystérieux exercices proches du yoga, et semblent jouir avec intensité de leur corps ».

Ecotopia n'est pas une lecture que nous pouvons qualifier d'agréable. Elle est exigeante, elle nécessite parfois de prendre du recul par rapport aux solutions proposées, elle reste éclairante, surprenante aussi lorsque l'on pense que ce livre a été écrit dans les années 70. Troublante à découvrir à l'aune de ce que nous vivons, en cette fin de COP26 dénuée d'actions collectives concrètes. Un classique nécessaire. Un indispensable pour ne pas se résigner.

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Depuis l'arrivée du covid 19 une phrase revient en boucle « après la pandémie rien ne sera comme avant ».
Quel avenir voulons-nous vraiment ? Quand nos hommes politiques nous servent du réchauffé, par paresse intellectuelle, manque d'audace et surtout peur de déplaire aux lobbies qui font la pluie et le beau temps.
Peut-être avez-vous lu “ l'utopie ” de Thomas More un récit publié en 1516,un rêve d'égalité bien avant le siècle des lumières.
Ecotopia d'Ernest Callenbach est un roman écrit dans les années soixante dix, l'époque du premier choc pétrolier, le fameux slogan “ en France on a pas de pétrole mais on a des idées ”
Eco du grec oikos ( la maison ou le foyer)
Topia du grec topos ( le lieu).
Ce roman raconte comment trois états américains la Californie,l'Oregon et l'état de Washington firent sécessions et créèrent une société nouvelle.
Vingt ans après le journaliste William Weston est envoyé en reportage sur cette “ terra incognita ” .
Ecotopia a tourné le dos aux énergies fossiles, les trains et les transports en commun sont électriques, adieu la voiture polluante et les embouteillages, l'énergie solaire et autre géothermie ont remplacé les chaudières . Une gestion des eaux et forêts intelligente, une agriculture sans pesticides résultat zéro pollution.
Une auto gestion des entreprises, les multinationales et leurs dividendes n'existent plus, le consumérisme est de l'histoire ancienne, la semaine de travail est de vingt heures et les grands centres urbains ont laissé la place à des communautés autonomes...
Voilà un programme qui hérisserait le poil des ultras libéraux et des 1%des plus riches qui dirigent la planète.
J'avoue avoir été séduit par Ecotopia, une société humaniste.
1975 - 2020, plus de quarante ans se sont écoulés et où en sommes-nous ?.
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Alors qu'ils ont fait sécession vingt ans auparavant, la Californie, l'Oregon et L'État de Washington, ouvrent pour la première fois ses frontières à un journaliste américain. C'est donc par les yeux de William Weston avec des articles, des notes, un journal, que nous découvrons Écotopia, axée tout particulièrement sur l'écologie et le bien-être humain.
Cette nouvelle société est très différente de ce qu'il connait. Au départ sceptique et prêt à mettre le doigt sur le moindre point négatif, il perçoit aussi ses atouts, finalement plus nombreux qu'il n'imaginait.
Surtout descriptif sur tous ses aspects, le récit prend un tour romanesque avec une histoire passionnelle entre William et une Écotopienne.

Publié en 1975, cette utopie écologique était annonciatrice des changements devenus aujourd'hui indispensables à la survie de presque toutes les formes de vie sur notre planète.

Merci à Babelio et aux éditions Gallimard. Vous excuserez mon manque d'inspiration pour cette critique… alors que je démarrais cette lecture avec enthousiasme, une longue pause Covid s'est imposée à moi et je ne suis toujours pas au meilleur de ma forme.
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En 1975 Ernest Callenbach publie son roman qu'il qualifie de " semi_ utopie" car en Ecotopie tout n'est pas parfait mais la voie pour la perfection est engagée...est ce mon humeur maussade en ce début d'année face à un monde qui se transforme en dystopie ? Mais j'ai envie d'affirmer qu'Ecotopia frise la perfection et je demande mon visa immédiatement pour m'y réfugier !
Dans ce roman, l'auteur nous décrit une société constituée de l'Oregon,la Californie et l'état de Washington. Elle s'est volontairement coupée du reste du monde pour fonder une organisation sociale radicalement écologiste. L'harmonie entre l'homme et la nature est la priorité absolue mais ceci a modifié le rapport des gens entre eux dont celui des femmes et des hommes de façon flagrante pour instaurer un mode de vie opposé au système capitaliste. William Weston, journaliste américain est envoyé en mission en Ecotopia afin qu'il rédige un article qui confirmera sans aucun doute la régression et la sauvagerie de ce peuple. Ce Candide des temps modernes va cependant découvrir progressivement un monde bien plus parfait que celui dont il vient. En journaliste charismatique il va observer et d'écrire tous les pans de cette société : son système éducatif,son système de santé,sa presse, l'organisation du travail,les relations familiales etc.... soucieux de conserver un regard critique il va pourtant se rendre à l'évidence que la vie est bien plus belle,plus vraie et plus sensée à Ecotopia... l'histoire d'amour qu'il va vivre de façon inattendue et de plus en plus forte avec Marissa va amplifier sa prise de conscience d'une autre façon de vivre son rapport à l'autre et à son environnement. On assiste à une véritable renaissance.
Ce roman pourrait être placé entre les mains de nos meilleurs écologistes car le projet de société qui y est décrit est d'une actualité stupéfiante !
J'ai peut-être trouvé quelques longueurs à certains moments mais le message de ce roman est riche d'enseignements...
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Vous voulez écouter la radio ? Installez donc une roue à aubes sur le ruisseau en bas de chez vous, elle vous fournira l'électricité nécessaire.
Dans le pays d'Écotopia, la société de consommation et les métropoles ont disparu, les sources d'énergie sont renouvelables, les constructions sont en bois. Les mots-clés sont : écologie, autogestion, simplicité.
S-F ? Anticipation ? Dystopie ? Utopie ? Politique-fiction ?
Difficile de classer Écotopia.
C'est un roman, mais il est écrit sous la forme d'un journal intime, ponctué d'articles rédigés par le narrateur, qui est journaliste.
Les États de Californie, d'Oregon et de Washington ont fait sécession, et quitté les États-Unis avec lesquels ils n'ont plus aucun contact. William Weston est le premier journaliste américain à pouvoir visiter cette nouvelle nation d'Écotopia, totalement organisée dans le respect des ressources de la Terre.
Weston y arrive avec tous ses préjugés d'Américain bon teint, s'attendant à voir une population revenue à "l'âge de pierre". Mais peu à peu au cours de son voyage, sa pensée bascule vers une approbation, voire une adhésion aux principes écotopiens.
Ses articles constituent donc une sorte de petite encyclopédie d'Écotopia (démographie, transports, éducation…), tandis que son journal explicite son revirement.
Paru en 1975, ce roman avait alors le mérite d'attirer l'attention sur des problématiques écolo (aujourd'hui du simple bon sens), ce qui a bâti sa réputation de livre-culte.
Par exemple il discute la notion de Produit National Brut, totem de l'économie libérale (Prenons la santé : plus la population est malade et consomme des médicaments, meilleur c'est pour le PNB.)
Mais en 2023, ce roman apparaît finalement bien timide, et encore tout imprégné de stéréotypes.
Égalité homme-femme, oui, mais seuls les hommes pratiquent les "jeux de guerre".
Sobriété énergétique, oui, mais avec des sèche-linge.
Abolition des préjugés, certes, mais les Noirs choisissent de vivre à part des Blancs...
Tel quel, il a toutefois eu le mérite d'éveiller les consciences à la décroissance, et puis reconnaissons que ça se lit avec plaisir, ces "aventures de Willie chez les hippies"… !
Le traducteur Brice Matthieussent fait du boulot sérieux d'habitude, aussi est-ce difficile de savoir si toutes ces fautes de français ("nous nous sommes étreignés") révèlent un anglais relâché, ou bien une traduction bâclée.
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Cela fait plusieurs décennies maintenant que la mode est à la dystopie, et on ne compte plus le nombre de romans imaginant un futur plus ou moins proche déprimant, fait de guerres, de désastres écologiques ou de l'avènement de nouveaux totalitarismes. Les utopies, sans doute moins vendeuses car limitées en ressorts dramatiques, sont beaucoup plus rares, au point que celle proposée ici par Ernest Callenbach remonte à 1975. Contrairement à « American war », dont je vous parlais il y a peu et qui racontait la session du Sud des États-Unis et la guerre interminable qui en avait résulté, « Ecotopia » imagine que ce sont les états de la côte ouest (en l'occurrence la Californie, l'Oregon et l'État de Washington) qui ont cette fois choisi de se désolidariser des autres pour former une entité indépendante, le tout sans bain de sang. En dépit des nombreuses difficultés nées de ce désir d'indépendance, la scission s'est donc opérée sans trop de dégâts et a abouti à la création d'une nouvelle nation qui, bien que voisine des États-Unis, a rapidement décidé de couper tout contact avec ses anciens concitoyens. C'est la raison pour laquelle, vingt ans après sa naissance, les Américains en savent si peu sur Écotopia, si ce n'est de folles rumeurs ou des fantasmes invérifiables en raison de la fermeture des frontières. Les choses sont néanmoins sur le point de changer puisque, pour la première fois, un journaliste américain a été invité à réaliser un reportage dans le pays afin de documenter le fonctionnement, la politique et le mode de vie des Écotopiens. Pétri d'arrogance et de certitudes, William Weston, le journaliste en question, ne va pas tarder à être chamboulé par son expérience dans cette nation pour le moins étrange car totalement en décalage avec la société américaine telle qu'il l'a connaît et l'idéalise. le roman alterne entre les articles fournis par le reporter au Times-Post et les notes plus personnelles prises par ce dernier dans un carnet, ce qui permet à l'auteur de rendre compte de l'évolution de la mentalité du protagoniste tout en lui laissant le loisir de détailler les spécificités propres à Écotopia.

« Écotopia » est un ouvrage à la fois très intéressant mais aussi très frustrant. Intéressant d'abord parce que, comme toute bonne utopie, il propose un modèle de société qui sort du cadre auquel on est tellement habitué qu'on ne le questionne plus guère. Et de ce point de vue, Ernest Callenbach ne manque pas d'imagination. Santé, éducation, architecture, interactions entre individus, rapports hommes/femmes, écologie… : l'auteur s'est donné la peine de détailler tous les aspects de cette société qui, bien qu'élaborée il y a près de cinquante ans, n'en demeure pas moins extrêmement moderne par bien des points. Certes, certains détails font sourire le lecteur par leur désuétude (le journaliste n'imagine pas, par exemple, les Occidentaux trier leurs déchets comme le font les Écotopiens, le procédé lui paraissant bien trop contraignant pour être approuvé par la population), mais dans l'ensemble les idées et objectifs mis en avant sont parfaitement d'actualité et continuent d'ailleurs d'être revendiqués par la gauche radicale. Concernant l'organisation du travail et l'économie, l'auteur n'hésite pas à parler réduction du temps de travail et auto-gestion des outils de production par les travailleurs eux-mêmes, remettant ainsi sacrément en cause le sacro-saint capitalisme auquel le protagoniste croit tellement. Les Écotopiens sont également radicalement écologistes et on cerne bien, déjà dans les années 1970, la crainte éprouvée par l'auteur de voir les habitudes de consommation des Occidentaux causer d'irrémédiables dégâts à la planète. L'occasion pour Ernest Callenbach de mettre en avant des mesures qui paraîtront désormais familières aux lecteurs (l'importance du recyclage, par exemple) mais aussi d'autres qui tardent à venir mais occupent une place de plus en plus importante dans le débat public (fin de l'agriculture intensive ; disparition des voitures individuels, entraînant ainsi la gratuité des transports en commun et le développement massif de ces derniers, notamment dans le secteur ferroviaire ; lutte contre l'obsolescente programmée…). Écotopia fonctionne également de manière bien plus démocratique grâce à une limitation du pouvoir exécutif et la mise en place de nombreux espaces de concertation ouverts à tous les citoyens. Là encore certaines idées continuent aujourd'hui encore de faire (lentement) leur chemin, qu'il s'agisse de durcir la législation visant à empêcher tout conflit d'intérêt (notamment dans le secteur de l'agrobusiness) ou encore la favorisation de l'indépendance des médias par le biais, notamment, de lois anti-concentration.

Le roman fourmille donc d'idées qui, en ce qui concerne la théorie, ne sont pas particulièrement novatrices, mais qu'il est passionnant ici de voir concrètement mise en oeuvre. Je suis un peu plus sceptique concernant les évolutions sociétales telles qu'évoquées par l'auteur. En effet, si certaines paraissent une fois encore d'actualité (l'égalité homme-femme, l'acceptation de l'homosexualité…), d'autres font souvent passer les Écotopiens pour de gentils hippys un peu toqués. Dans ce contexte, notre reporter cynique et sûr de lui fait évidement tâche, et une partie du charme du roman provient d'ailleurs de ce contraste entre un héros dans un premier temps assez antipathique et cette société où bienveillance et honnêteté sont les principaux mots d'ordre. Très agaçant dans un premier temps, Will se révèle finalement être un personnage attachant pour lequel on éprouve de plus en plus d'empathie à mesure que ses rencontres font vaciller ses certitudes. En dépit de ces qualités, le roman se révèle malheureusement décevant par certains aspects. le premier est, je le crains, propre au genre utopique lui-même : il ne s'y passe pas grand-chose. Les retournements de situation ou événements profondément marquants sont en effet extrêmement rares, le récit se limitant à la découverte par le protagoniste de cette nouvelle nation. Point. le mode de narration envisagé par l'auteur est également problématique car, si les prises de notes personnelles du journaliste font quelque peu avancer l'intrigue, les nombreux articles concernant Ecotopia et qui présentent chacun un aspect du pays (éducation, politique étrangère, rapport à la nature…) ne sont là que pour planter le décor et finissent par lasser. Enfin, on pourrait trouver un peu dommage que l'auteur accorde autant d'importance aux expériences sexuelles de son personnage au dépend d'autres pans de l'intrigue qu'il aurait été plus intéressant de développer.

Utopie datant des années 1970, « Écotopia » séduit par sa modernité et brosse le portrait d'une société idéale dans laquelle écologie, socialisme et féminisme règnent en maître. Bien que passionnant par les propositions qu'elle met en avant de manière très concrète, le roman souffre toutefois d'un mode de narration trop binaire et de l'absence de véritable intrigue propre à maintenir éveiller l'intérêt du lecteur. L'ouvrage reste cela dit idéal si vous en avez assez des récits pessimistes sur notre futur et êtes prêts à imaginer une société très éloignée de la notre et pourtant très proche de nombre de nos aspirations actuelles.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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Ecotopia, c'est un pays, formé par la côte ouest des États-Unis après leur sécession. Trois états qui ont décidé de choisir un avenir plus écologique et plus simple pour tous ses habitants. William Weston, journaliste américain arrive pour y séjourner et faire un reportage sur les conditions de vie dans ce pays fermé au reste du monde.
Le roman est un classique de l'utopie écologique. le narrateur du récit est Will, qui arrive avec ses préjugés d'américain consumériste persuadé du malheur qui s'est abattu sur la population obligée de vivre dans des conditions plus spartiates. Sauf que petit à petit, ses certitudes s'effondrent face à des habitants qui l'accueillent avec chaleur. le livre va bientôt fêter ses cinquante ans et il n'a pas pris une ride. Il présente un mode de vie simple, basé sur un retour à une consommation plus réfléchie et à une décroissance finalement bienvenue. Si on est dans la science fiction pure et que ce roman reste une utopie un peu idéaliste, le message est en adéquation parfaite avec certaines préoccupations bien actuelle. Et l'on se rend compte, surtout à quel point la situation du monde n'a pas vraiment été dans le bon sens depuis sa parution.
Les chapitres alternent les articles de Will sur la société écotopienne avec des extraits du journal qu'il tient. et si les articles sont intéressants, à la longue, le ton un peu donneur de leçon est fatigant. Pour les extraits de journal, on voit évoluer le journaliste dans sa vision du monde.
J'ai écouté ce roman, porté par la voix de François Hatt qui donne une intonation une peu hautaine et arrogant à ce personnage qui arrive comme en terrain conquis. J'ai vraiment apprécié cette interprétation, en parfaite adéquation avec le narrateur de l'histoire.
Une vraie découverte pour moi qui ne connaissais pas ce roman, même si le message porté m'est bien connu et, malheureusement toujours d'actualité.
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Le fond de ce roman est tout aussi étonnant que son contexte.

Imaginez une sorte d'antithèse de 1984, un livre qui met en lumière une utopie, alors que nous vivons actuellement dans un monde qui voit tout en sombre, à coups de récits post-apocalyptiques ou dystopiques.

Ecotopia est bien aussi une réécriture de l'histoire, un monde parallèle au notre. Et qui aurait pu être le notre, si nous avions été plus proactifs et avions ouverts les yeux quand il le fallait. Est-il trop tard ?

Ce texte est une réédition. Il est sorti en 1975, il y a près de 50 ans… Bravo au passage à Folio qui démontre avec brio qu'un éditeur de livres de poche peut faire un vrai travail éditorial et ressortir des limbes des textes qui prennent encore plus de sens aujourd'hui.

Trois grands états de l'ouest américain, parmi les plus prospères, ont fait sécession et coupé totalement les ponts avec le reste des États-Unis. Pour construire une autre société, respectueuse de la planète et de ses habitants, freinant la course folle à la consommation de masse.

Vingt ans se sont passés, dans la douleur au début, dans une harmonie ensuite. Pour une première fois, un journaliste américain est autorisé à entrer dans Ecotopia. Avec tout son bagage sociétal et ses a priori.

A coup d'articles de presse (que le narrateur écrit au fur et à mesure), et de passages de son journal intime, le lecteur découvre ce monde chimérique (et pourtant loin d'être irréaliste).

Ernest Callenbach était un visionnaire. Il est mort en 2012, et toute sa vie il a dû constater combien il avait raison en voyant le gâchis au quotidien qui détruit la planète et les relations humaines.

Notre monde actuel est fait de scepticisme. Difficile encore de croire en l'avenir quand tout se délite, la planète en premier.

Oui, ce livre est clairement un cri écologiste. Mais sa forme le rend unique. Il se lit comme une fiction autant que comme un essai détourné sur ce qu'il est possible de faire si on change de mentalité, au niveau collectif comme individuel.

En 1975, Callenbach avait déjà tout vu, tout anticipé, tout compris et tout analysé. S'en est aussi bluffant qu'effrayant. Sa société utopique, il l'a réfléchie et dessinée dans les moindres détails, et ce livre est une manière ludique de la dépeindre sous toutes les coutures. Écologiquement, économiquement, humainement. Naturellement…

L'écrivain ne se contente pas de fabuler sur un monde chimérique, sa capacité d'imaginer l'avenir, les conséquences et les actes pouvant être menés est stupéfiante. Je suis né en 1968, et durant de longues années, je ne me suis jamais posé de telles questions, ni n'ai entendu la société les poser aussi clairement sur la place publique.

Alors oui, certaines descriptions prêtent à sourire parce que clairement datées (dans les années 70, difficile d'imaginer l'essor de l'informatique et d'internet), mais pour une grande partie des sujets, l'analyse est admirable.

Ce journaliste qui découvre Ecotopia, bourré de préjugés, est touchant dans son cheminement intellectuel et émotionnel. A travers ses écrits, il est passionnant de découvrir ce monde au plus près des citoyens.

N'imaginez pas lire une grande intrigue, ce n'est pas ce genre de texte, mais cette fiction sait mélanger passages analytiques et moments plus intimes.

Si vous voulez comprendre comment il est possible d'imaginer un monde sain, où l'on travaille 20 heures par semaine, où chacun est maître de ses décisions tout en oeuvrant pour le collectif, lisez Ecotopia.

Quand l'utopie nous fait prendre la réalité de notre société en pleine face, avec force arguments et humanisme, cela donne une lecture totalement atypique qui mérite qu'on s'y attarde. Ernest Callenbach était un visionnaire autant qu'un profond croyant en l'Homme. Loin d'être illuminée, sa vision mérite qu'on s'y attarde, près de cinquante ans après. Avant qu'il ne soit trop tard.
Lien : https://gruznamur.com/2021/0..
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L'Orégon, l'Etat de Washington et une partie de la Californie ont fait sécession des USA pour créer une société écologique et juste. Vingt ans après, les relations diplomatiques avec leur pays d'origine ne sont toujours pas rétablies, mais pour la première fois, un journaliste américain, William Weston se rend en Ecotopia pour faire un grand reportage d'investigation durant six semaines. Les rumeurs les plus folles courent sur cette terre comme le cannibalisme, il n'y croit pas mais désire découvrir le vie dans cette société. Il y va en étant tout à fait convaincu de la supériorité américaine. Les chapitres alternent les articles écrits par William, qui documentent tous les aspects de la vie du pays et ses expériences personnelles, consignées dans son carnet et non destinées à la publication. le pays a renoncé à la consommation à outrance, les magasins d'Etat n'ont qu'un assortiment réduit d'articles de très bonne qualité mais surtout utilitaires. le recyclage est érigé en quasi religion, tout doit pouvoir être réutilisé, les voitures individuelles sont interdites, sauf dans certaines zones rurales où les transports publics n'ont pas encore pu se développer comme prévu. Ailleurs le réseau de trains et de bus électriques est très dense. San Francisco est la capitale, mais la plus grande partie de la population vit dans des mini-villes de moins de dix mille habitants, ou à la campagne. le culte et la connaissance de la nature sont très développés, tout citoyen qui veut acheter du bois pour se construire une maison, doit d'abord aller travailler dans un camp forestier pour participer à l'entretien des forêts. le plastique ne se fabrique plus à partir du pétrole mais des végétaux. Ce qui étonne le plus William est que les Ecotopiens ne travaillent que vingt heures par semaine et sont dirigés par une femme, que le journaliste ne rencontrera qu'à la fin de son séjour. Il arrive avec des préjugés négatifs sur le pays, même s'il ne croit pas les pires rumeurs qui ont cours aux USA. Il apprécie vite la convivialité et la générosité des habitants, puis il rencontre Marissa lors de son enquête sur les camps forestiers, ils vivent une relation passionnée qui changera radicalement les idées et la vie de William.

Les idées exprimées dans cette utopie très en avance sur son temps (1975) sont très actuelles et devraient nous faire réfléchir par ces temps de réchauffement climatique. L'idée de réduire la durée du travail pour réduire le chômage revient à la mode, même si on ne songe pas à passer à la semaine de vingt heures. Ce livre a été écrit après le premier choc pétrolier, ce qui a entraîné une prise de conscience. Déjà à cette époque, on avait compris l'importance des énergies renouvelables et de l'économie circulaire, mais le néolibéralisme est revenu en force dans les années quatre vingt et on constate avec tristesse qu'on a très peu progressé dans ce domaine, malgré l'urgence climatique. D'autres aspects de l'Ecotopia restent très utopiques comme l'amour libre, les familles élargies et la vie communautaire, on sent que le mouvement hippie est passé par là, mais ça donne plus de charme à cette utopie qui a très bien vieilli.

Les articles de William ne sont pas dogmatiques et restent très faciles à comprendre, ce qui était le risque avec ce roman qui est aussi un essai déguisé. Les thèmes sont variés et on a grand plaisir à partager ses découvertes et encore plus son évolution personnelle, même s'il a eu bien de la peine à en tirer les conclusions qui s'imposent. William a une vision assez lamentable des femmes, il les voit surtout comme des objets sexuels et il vit ses fantasmes à fond. Marissa peine à lui faire comprendre ce qu'est l'amour véritable.

J'ai beaucoup aimé ce livre original, je regrette seulement qu'on ait fait si peu de progrès dans la réalité de notre société, alors que ces problématiques étaient déjà connues il y a un demi-siècle, j'ai aussi beaucoup aimé le côté « Californie Hippie ». Un grand merci à Netgalley et Audiolib pour cette belle découverte.

#Écotopia #NetGalleyFrance !
Lien : https://patpolar48361071.wor..
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Et si une société écologique voyait le jour? Et si le travail productif avait moins d'importance que le travail improductif? Et si les conflits pouvaient toujours se régler par le dialogue? Tout cela est possible en Écotopia. Vu depuis la France d'aujourd'hui, cela fait beaucoup de bien, nourrissant notre imaginaire d'une utopie concrète et nous rappelant qu'au fond, le pire n'est jamais certain.
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