Alfred Courmes

"J'ai peint les sujets que j'avais envie de peindre sur le moment. Si j'ai un jour une idée de tableau, je la note dans un coin, puis je la reprends. J'y pense la nuit, au fur et à mesure de mes rêves, dans la rue au hasard de mes rencontres et puis quand l'idée s'est cristallisée dans ses formes, je me lance dans sa réalisation. Le sujet qui s'est imposé à moi ainsi m'amuse. Il confronte la civilisation judéo-chrétienne, la civilisation grecque, dont nous sommes tous tributaires, aux réalités de la vie quotidienne. De cette confrontation surgissent des ensembles et des rencontres qui me créent la nécessité d'en faire un tableau qui raconte une histoire."

Courmes, ce peintre rare, a l'invention cyniquement perverse et nous fait rire d'événements qui devraient être effrayants. Songez à l'apparition terrible sur une plage de messieurs dignes, habillés au temps du haut-de-forme par la Belle Jardinière, d'une sirène pourvue de seins abondants et gantée comme Rita ou toute pin-up qui se respecte. Derrière cette sirène au goût du jour : le troublant marin-triton en maillot rayé qui, tout à l'heure, va consulter sa montre pour savoir si la séance de pose va se terminer bientôt. C'est minutieusement peint sans couleur. Le dessin est joyeusement serré comme un corps dans un corset.

Peintre populaire de la durée, peintre de l'histoire qui tombe entre nos mains comme un otage, Alfred Courmes parvient, dans ses derniers tableaux, à une telle juxtaposition de gravité candide et d'hilarité contenue, que l'obscurité de notre temps semble après cela moins épaisse.

Le monde de Courmes est aussi étrange que le monde de Salvador Dali.