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Critique de glegat


Si la vie n'a pas de sens, elle est donc absurde. Comment assumer cette absurdité ? Camus pose la question de manière abrupte dès les premières lignes « Il n'y a qu'un problème philosophique vraiment sérieux : c'est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d'être vécue, c'est répondre à la question fondamentale de la philosophie. »

Ce départ tonitruant interpelle et donne vraiment envie de connaître la suite du texte. le titre de l'ouvrage est aussi excellent. On connaît tous Sisyphe, ce personnage mythologique condamné à pousser éternellement une pierre au sommet d'une montagne, d'où elle retombe immédiatement. Cette métaphore nous parle parce qu'elle illustre parfaitement les efforts inutiles de l'homme pour accomplir une tâche qui n'a aucun sens. Métro, boulot, dodo et après ?

Comment Camus va-t-il répondre à la question du suicide ? Il faudrait d'abord expliquer en quoi la vie est absurde. Au regard de cette thématique, Camus commente la position de plusieurs philosophes : Heidegger, Kierkegaard, Chestov, Jaspers, Shopenhauer, Husserl. Cette partie de l'ouvrage n'est pas la plus limpide. Ensuite il illustre son propos en développement deux exemples, le premier autour de la notion de « l'homme absurde » regroupant le don juanisme, le comédien et le conquérant. Ces trois archétypes ont en commun le fait de « ne rien faire pour l'éternel ». Don Juan multiplie les conquêtes sans rien obtenir de satisfaisant et se retrouve dans la position de Sisyphe. le comédien passe à côté du réel et le conquérant se sacrifie pour une cause qui n'apporte pas de réponse au sens de la vie. le deuxième exemple est celui de la création artistique, encore une fois celle-ci n'est pas explicative du monde elle est un reflet de la vie librement façonné par un artiste pour divertir le public. En réalité il est difficile de résumer ce livre qui n'est pas facile à lire et je serais bien incapable d'en faire une analyse précise.

Réfléchir sur le sens de la vie et son éventuelle absurdité est évidemment essentiel. Mais si absurdité il y a, celle-ci me semble cantonnée à des faits, des situations, des comportements. Il serait dangereux et surtout inexact de généraliser. Quant au suicide, c'est justement cet acte qui me semble absurde puisqu'il nous prive définitivement de trouver un sens à la vie. Camus semble parvenir à ce type de conclusion puisqu'il préconise de se révolter plutôt que de se suicider. Il faut s'insurger contre l'injustice et l'absurdité de la condition humaine. La liberté et la dignité de l'homme sont dans cet esprit de révolte. Même si la vie est sans signification elle vaut toujours la peine d'être vécue, c'est aux hommes eux-mêmes de donner sens à la vie. Camus conclut son ouvrage par ces mots : « La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un coeur d'homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux ».

Ce livre est très célèbre et fait partie du cycle de l'absurde avec « L'étranger » et la pièce « Caligula ». J'ai apprécié "L'étranger" et j'aime beaucoup les idées et le parcours de Camus, j'avais donc très envie de lire cet essai, mais j'avoue avoir été un peu déçu. L'auteur qui est issue d'un milieu modeste et qui a vécu dans la simplicité ne semble pas s'adresser ici au plus large public. Il donne l'impression de vouloir parler aux intellectuels et de justifier son propos à grand renfort de considération philosophique complexe qui aurait pu sans doute être exprimée de manière plus abordable. D'ailleurs la plupart des synthèses et analyses que j'ai pu lire à propos de cet ouvrage se contentent au final de souligner les premières et les dernières lignes du texte et de rappeler la signification du mythe de Sisyphe. La métaphore est bien trouvée et le mérite de ce livre est surtout de nous inciter à la réflexion sur ce thème ce qui n'est pas rien.

Au moins dans la forme, Camus est sans doute meilleur romancier que philosophe, il a d'ailleurs toujours affirmé qu'il n'était pas philosophe. Dans ses carnets on trouve cette suggestion : « On ne pense que par images. Si tu veux être philosophe, écris des romans. »

— « Le mythe de Sisyphe », Albert Camus, Folio essais (2018), 187 pages.
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