Ce feuilleton, avant d'y participer, je ne le regardais pas. Comme tous les professionnels du métier je pensais "c'est nul". Et puis, la pression de l'argent, l'obligation de payer le loyer, les vêtements des enfants, les fournitures scolaires, la nourriture, la voiture, et surtout faire mon métier d'acteur, obéir à ce besoin vital, ce besoin physique de jouer, un jour sans jouer est un jour inutile qui tombe dans l'oubli : j'ai sauté le pas. Je me suis jeté à corps perdu dans ce rôle comme si c'était le personnage le plus complexe d'un film d'Hitchcock, de Scorsese ou de Truffaut.
La réalité de sa propre mort se matérialise souvent le jour de la disparition de ses parents. Il paraît que c'est classique.
La "reconnaissance", pour que ça marche, il faut être deux. Celui qui reconnaît et celui qui est reconnu. Si l'un des protagonistes ne joue pas le jeu, c'est foutu.
Depuis trente ans que je fais ce métier, je nage à la surface d'un océan de "non", avec de temps en temps un "oui" auquel je me raccroche, un "oui" qui me permet de reprendre mon souffle avant de repartir pour une traversée angoissante, une longue série de refus dont je ne distingue pas la destination.
Une seule préoccupation nous anime. "Avoir envie que l'autre ait envie de moi" : obsession de l'acteur d'aujourd'hui.