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Critique de Yaena


Attention les amis, pénétrer dans L'observatoire n'est pas une mince affaire. Vous ne serez pas bien accueilli parce que ses habitants ne sont pas des gens sociables. Ils ont d'autres préoccupations. Dévoués corps et âmes à leurs souffrances ils n'ont pas de place pour une vraie vie alors pour un nouvel habitant encore moins.
Chez Edward CAREY on ne fait pas dans les relations sociales cordiales et polies. On fait dans la vérité crue jusqu'à l'os. Celle qui dérange et qui démange. Une vérité urticante !
Ses personnages sont pétris de souffrances, en dehors du monde, en dehors du temps et pourtant ils ont quelque chose de tellement représentatifs des dérives de notre monde.

L'observatoire c'est un huis clos. le personnage central est Francis ORME. Un drôle de bonhomme égocentrique qui porte tout le temps des gants blancs qui a la lèvre inférieure enflée et qui collectionne. Quoi ? L'amour. Des objets aimés. Il entasse dans uns quête effrénée d'amour tout en repoussant continuellement les autres au nom de la sacro sainte solitude. Il l'aime cette solitude. du moins il en est persuadé. Elle a quelque chose de rassurant. Tout comme il aime son travail qui consiste à se transformer en statut inanimée.
Francis vit avec ses parents eux aussi sont des objets vivants. Ils respirent, c'est comme ça qu'on sait que ce ne sont pas des objet. Mais pour le reste, le doute est permis.

Mais Francis n'est pas le seul pensionnaire de L'observatoire il y a Peter BUGG qui n'est que tristesse, amertume, remords et regrets ; le Portier qui chuinte à longueur de journées, La femme chien alias numéro 20, qui n'est plus vraiment elle même et Claire HIGG qui vit sa vie par procuration devant son poste de télévision (merci JJG je n'aurai pas pu trouver plus parlant). Tout ce petit monde habite L'observatoire et attend que le temps passe en évitant soigneusement de vivre jusqu'à ce qu'une petite nouvelle fasse son apparition : Anna TAP. de la nouveauté ! Quelle horreur et en plus elle essaie de communiquer et de sociabiliser ! le diable en personne.

Francis aura beau essayer par tous les moyens de la faire fuir, c'est trop tard le ver est dans le fruit et Anna a ouvert la boîte de Pandore ou plutôt devrais-je dire la malle aux souvenirs. le lecteur découvre alors le passé des personnages et leur présent prend une autre dimension. Tout le monde s'y met mais les souvenirs sont dangereux ils vous rappellent que vous avez une vie et que la vivre est possible. L'immobilisme est tellement plus confortable. Faire comme la tortue : rentrer dans sa carapace et attendre patiemment que la vie passe. Attendre en dehors du monde. En dehors du temps. Peu à peu les secrets se dévoilent et les vies se croisent. de lourds secrets, des actes manqués, des doutes, des vies suspendues, et beaucoup de souffrances.

Mais L'observatoire ce n'est pas que des personnages c'est surtout une ambiance. On la sent, elle vibre sous les mots. C'est une ambiance gothique, comme un vieux conte trouvé dans un grimoire. Il y a quelque chose de mélancolique. C'est une tristesse douce amère qui se répand au fil des pages. Un univers à la Tim BURTON, à la Lewis CAROLL. Il y a une cruauté enfantine dans ces lignes mais aussi un désenchantement que seul l'age adulte apporte. C'est farfelu, décalé sans être absurde. Edward CAREY en parfait funambule des mots propose un dosage parfait qui rend ses livres si uniques.

En lisant L'observatoire je me suis rendu compte que tout était déjà là : le rapport particulier aux objets que l'on retrouve dans la trilogie des Ferrailleurs, l'immobilité, la cire, et la connaissance du corps humain que l'on retrouve dans Petite… Il y a une cohérence et un univers que l'on retrouve dans chacun de ses livres. Sans oublier l'écriture émouvante et sobre qui là encore a gardé quelque chose de l'enfance. Une trace d'innocence et de vérité.

Une lecture suspendue, hors du temps, qui fait du bien.
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