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Citations sur La Terre que nous foulons (9)

Il me revient en mémoire une scène à laquelle j'ai assisté, enfant. Une fille chante une romance des faubourgs à sa vieille mère.
(...) Cet air si souvent repris sous les porches de la ville conquise revient maintenant à ses oreilles, tellement longtemps après, et elle ne peut retenir ses larmes. Les outils nous lient à la terre, les mélodies se gravent dans les recoins les plus cachés de l'esprit et du coeur. Ils nichent dans les profondeurs, comme le souvenir des odeurs. Au long de la vie, alors que nous furetons dans le garde-manger, déjà âgés, il arrive parfois qu'un parfum nous revienne, et les souvenirs de ces temps anciens, primitifs, reverdissent. La mélodie fait pleurer la vieille femme. La douleur qui nous unit. Qui a perdu un enfant, les a tous perdus.
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Nous sommes en août, le châssis de la fenêtre à guillotine est complètement relevé et une brise parfumée et chaude berce les voilages. Elle les fait danser si joliment qu'à cette période de l'année, pendant mes insomnies, je m'adosse contre la tête de lit et je m'émerveille de les voir ondoyer telles de délicates bannières. J'aspire les senteurs apportées par la brise qui déplace de temps à autre les parfums suspendus de la chambre. Ils arrivent par vague, comme la mer dépose sur le rivage les débris d'un bateau naufragé. Au printemps, les pétales blancs des orangers en fleurs embaument, surtout au crépuscule. L'arbre envoie immanquablement un signe avant-coureur plusieurs jours auparavant. Soudain, au cours de journées encore fraîches, un filament fugace prévient que quelque part alentour la vie a été conviée à sa renaissance.
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A mon sens, c'est au pied des cultures que sa vie a commencé à chavirer. Il prend une poignée de terre, la porte à son nez, la hume les yeux presque clos comme s'il dégustait un vin. Je reconnais cette expression à la fois concentrée et grisée. Je cherche moi-aussi dans mes pots de fleurs des arômes vaporeux, des restes de bois décomposés, des veines minérales. Mesures d'une mélodie secrète qui me parlent de l'humidité, de la consistance ou de la structure de la terre.
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C'est un homme âgé, mais parfaitement capable de travailler. Il s'est présenté ici, chez nous, muré dans son hermétisme obstiné et il a eu ce que les mendiants, qui auraient perdu toute dignité s'ils en avaient, obtiennent : être nourris par une autre main. Cette main, c'est la mienne. Je la regarde et je n'arrive pas à comprendre comment tout cela a pu arriver. Comment moi, imperturbable jusqu'alors, j'en suis venue à déposer chaque jour devant lui une assiette de bonne nourriture. Moi qui me distrais en tricotant son histoire durant la nuit. Moi qui non seulement le nourris mais le protège. Moi qui ai toujours cru qu'il ne devait pas y avoir de place parmi nous pour les mendiants, les faibles et les lâches. Si nous avons acquis une place hégémonique dans l'histoire, c'est parce que nous avons su expulser les faibles. Un drapeau suffisamment grand pour héberger les peuples du monde. Un seul Dieu véritable.
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La honte est un sentiment répugnant qui me ramène toujours à l'enfance, au jour où mon père m'a prise sur le fait, ses estampes pornographiques entre les mains.
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Ils boivent sans autre objectif que l'ébriété. Aucune sociabilité dans leurs réunions, seulement de l'alcool affreusement mal distillé qu'ils avalent comme de l'eau.
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Un fusil. Qui ne m'a servi qu'à abattre des oies et des faisans, presque toujours incités à l'envol par de bruyants rabatteurs. Je me demande quel genre d'alcool boivent ces gens. Pourquoi se montrent-ils si amorphes ? Où est leur dignité ?
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Ce sont nos hommes qui doivent s'occuper de ces gens. Ce sont eux qui savent quand ils doivent tirer et pourquoi. Nous, les femmes, nous les avons simplement suivis jusqu'ici. À des milliers de kilomètres de la patrie, dans ce coin de Sud exotique dont nous avons fait notre lieu de retraite, paisible et pittoresque.
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Je le prends par le coude et il se laisse accompagner ici ou là, à petits pas, comme un chiot docile. La maladie l'a réduit à la plus petite expression de ce qu'il a été. Un homme qui a commandé des divisions, qui a disposé de la vie d'autres hommes, qui a assiégé des villes et poignardé des ennemis et des insoumis. Je me demande si ses anciens adversaires, par lui asservis et convertis en sujets de Sa Majesté, conservent la colère qui les habitait sans aucun doute au moment de rendre les armes devant lui, l'homme dans l'ombre duquel j'ai vécu et dont l'ombre est à présent tout ce que je respire. Son esprit fonctionne de façon discontinue, et il peut passer deux semaines sans dire un mot, la tête pendante, incapable même de se lever seul et faisant sous lui, ou se mettre soudainement à tout régenter.
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