AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de abfabetcie


« Discrète et lumineuse », telle est l'image d'Isabelle Carré, l'actrice connue et reconnue. Et pourtant, derrière cette façade se cache une femme fragile au for intérieur plus que troublé. « On ne devrait écrire des livres que pour y dire des choses qu'on n'oserait confier à personne » disait Cioran.
Mais tout ce secret, c'est aussi ce qui est sa source d'inspiration en tant qu'actrice, vocation qu'elle découvre au sortir d'un passage douloureux. Ce sera le « cadre » dont elle rêve, celui qui lui permettra de contenir pour mieux les extérioriser tous les débordements inévitables de sa souffrance, de ses blessures, de son déséquilibre. Elle s'invente depuis toujours des histoires pour se protéger de la réalité, elle a un imaginaire débordant pour combler les défaillances. le théâtre et le cinéma lui permettront de vivre mille vies, d'être mille personnages. La réalité lui semble alors est plus acceptable parce qu'elle est transposée.
Dans ce récit romancé, elle livre certaines clés mais seulement la partie émergée de l'iceberg, et c'est très émouvant. Une enfance et une adolescence dans une famille hors normes, un peu déglinguée, une mère sur le fil du rasoir, un père qui se cherche et qui mettra des années à avouer et assumer son homosexualité. Il n'y a pas d'unité ni de chronologie dans ce récit, ce qui le rend parfois inégal, chaotique et difficile à appréhender mais il est indéniablement profondément sincère et troublant. Cette histoire est également très romancée, comme elle dit elle-même à la fin du livre. « J'ai préféré l'imaginer, ainsi que je l'ai fait tout au long de ce récit, comme nous le faisons sans cesse avec nos souvenirs, nous accrochant à eux, à quelques faits concrets, solides, incontestables pour combler ensuite les trous, des pans entiers de notre histoire, les chapitres qui se sont effacés, ceux que nous avons pris soin d'enfouir, et les féconder de notre imaginaire. Je n'ai questionné personne, j'ai seulement raconté ce que je savais, et le reste je l'ai inventé. » Toute cette histoire personnelle et familiale est racontée à travers le prisme du regard et du recul de l'adulte qu'elle est devenue. Elle finit par oublier le « Je » pour laisser place à un récit où ses personnages (ses frères, sa mère, son père) deviennent de vrais personnages de roman.
Une très belle plume, un premier roman tout en pudeur, prometteur qui laisse présager qu'elle a encore beaucoup de choses à dire… Un roman qui distille comme un doux parfum qui laisse des traces. Les mots « rêve » et « rêver » sont sans doute les mots qui reviennent le plus souvent dans ce roman. Rêver sa vie plutôt que la vivre quand on n'y trouve pas sa place…
Commenter  J’apprécie          50



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}