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Critique de AMR_La_Pirate


C'est dans le cadre des 68 premières Fois que je découvre ce premier roman d'isabelle Carré, Les Rêveurs
C'est une histoire familiale, celle de l'auteure ; c'est donc autobiographique avec une narration à la première personne. Chaque famille a ses " chambres interdites " ainsi que le cite une épigraphe de Louis Aragon, ses difficultés de communication, ses zones d'ombres, ses secrets... L'écriture est souvent catharsis pour s'approprier ses doutes, ses peurs, ses erreurs, sa culpabilité, son besoin de reconnaissance...

L'écriture d'Isabelle Carré est fluide, agréable, mais discontinue ; les parties s'enchainent avec des longueurs différentes, des titres, des absences de titre, des coupures… Il me manque un rythme, un je ne sais quoi que je n'arrive pas à définir qui fait que je n'accroche pas… Pourtant, en général, je suis plutôt séduite par les portraits de femmes, les évolutions sociétales, les introspections, les recherches identitaires, la situation des homosexuels et leurs difficultés pour vivre leur orientation au grand jour à différentes époques, les relations mère-fille, parents-enfants…
J'ai attendu que ma lecture fasse sens, qu'un déclic se produise, qu'un personnage me fasse signe ; j'ai noté des passages, celui du kilt, celui du père qui se teint en blond, qui prend des bains interminables et s'enferme avec ses copains pour peindre dans son atelier… Je sentais venir le noeud thématique, ou du moins, l'une des problématiques. J'ai relevé des couleurs, rouge de l'appartement, blanc de l'hôpital… J'ai recherché des repères temporels dans ce roman qui s'étend sur plus de quarante ans de vie rêvée, de ressentis et d'émotions… Mais cela ne fonctionnait toujours pas. Il a fallu atteindre les dernières pages pour que l'auteure revendique ce " désordre ", ce " manque d'unité ", cet empilement " à la façon des matriochkas ".

Je continuais à lire, persuadée que tout cela serait à remanier ; mais comment remanier sa lecture ? Arrivée à la scène brutale et surréaliste de l'aveu du père à ses enfants qui nous est donnée à lire à la moitié du roman, quand " toute l'histoire défile à nouveau dans [la] tête de la narratrice ", je me suis dit que cette phrase ferait un bon début… Ce que j'aurais voulu lire, c'est ce qui a pu rapprocher, à un moment donné, la jeune fille-mère et le garçon homosexuel, c'est-à-dire une absence de liberté et un rejet familial, un besoin viscéral d'exister comme ils étaient, en étant acceptés en tant que tel… C'est aussi le traitement du " décalage ", de " l'instant qui suit " la mise en lumière de la sexualité paternelle qui aurait pu être original et intéressant, ainsi que le rejet du communautarisme dans lequel tous les homos et lesbiennes ne se reconnaissent pas. Il ne faut pas oublier qu'une partie de l'action se situe au début des années SIDA, pas vraiment le meilleur moment pour faire son coming-out…
Dans Les Rêveurs, la narration s'articule aussi autour de la recherche du père biologique du frère aîné de l'auteure, thème annoncé dès les premières pages, mais développé bien tard, comme dans l'urgence, juste avant la fin. Dire qu'il me faut arriver aux deux tiers du livre pour enfin être intriguée, pour comprendre le sens du titre ! Comment se construire dans une famille où chacun rêve de vivre une autre vie, désire l'inaccessible ?

En conclusion, ce fut pour moi une lecture laborieuse, difficile… qui ne m'a pas touchée malgré la somme des ingrédients qui pouvaient le faire. Il m'a manqué une forme d'autodérision, un zeste d'humour, quelques sourires… Je me suis sentie voyeuse et gênée face à une blessure intime…
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