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Critique de Santarini


J'ai toujours cherché à savoir ce qui se pouvait bien se trouver dans les coulisses de ce monde physique dans lequel nous vivons, de cet Univers fait de matière et d'énergie (… et de « vide » !) Où même simplement s'il y avait des coulisses... J'ai fureté partout, du côté des religions, des spiritualités, des philosophies... J'ai certes trouvé quelques indices, mais bien sûr, jamais de preuves. Croire ne me satisfait pas, que ce soit en l'existence ou en la non-existence d'un "au-delà" (un au-delà du monde de la matière et de l'énergie). Je cherche à savoir, à comprendre, même si je me doute que ce processus itératif n'est jamais terminé.
C'est dans cet état d'esprit que j'ai entrepris le lecture de ce livre de Jean-Claude Carrière. Et j'ai été déçu ! Très déçu…
Comme tant d'autres avant lui, l'auteur aborde le grand mystère de l'existence. Il tente d'apporter sa pierre à ce débat millénaire. Mais, malheureusement, sa contribution est un tissu de préjugés. Jean-Claude Carrière apparaît comme absolument certain que rien ne succède à la mort du corps physique, que la vie se termine par le « néant », que la conscience meurt, comme le corps. Je trouve cette attitude bizarre : comment peut-on être certain ? du début à le fin, il considère cette hypothèse comme une évidence qu'il martèle à tout propos. Pas le moindre doute ne l'effleure. Pas même la plus infime parcelle de ce doute qui est pourtant le principal moteur de la recherche scientifique et donc de la plupart des découvertes. Pas la moindre curiosité de l'inconnu, cette si précieuse curiosité qui a motivé tant d'études et conduit à tant de compréhension.
Voici quelques exemples, parmi une multitude, des affirmations péremptoires qui parsèment tout l'ouvrage, comme des « actes de foi » à réciter patiemment (peut-être pour bien s'en convaincre) :
« Après notre mort, nous aurons oublié tout cela, nos distractions, nos périls, nos attentes et nos inquiétudes de chaque jour. D'ailleurs nous aurons tout oublié. Même l'oubli ».
« … même si nous savons tous, répétons-le, avec une certitude souvent masquée mais véritablement très profonde, qu'il n'y aura pas d'autre vie après la vie ».
« Morts, nous n'aurons rien à regretter, rien à espérer, puisque nous ne penserons, nous ne sentirons plus ».
« Dans le néant, c'est sûr, nous n'aurons plus peur, nous ne tremblerons plus et nous ne verrons plus de beautés. Nous ne verrons rien ».
« Je n'ai et je n'aurai jamais qu'une vie, j'en suis sûr, celle qui se déroule en ce moment sur notre planète, et qui s'achèvera bientôt ».
Certes les religions n'apportent aucune réponse crédible à nos interrogations existentielles et Jean-Claude Carrière le rappelle clairement et avec brio. Mais lui non plus ! Cette sorte de religion du "néant" qu'il professe ne me convainc pas plus que les autres religions dont il stigmatise, à juste titre et souvent avec verve, les incohérences, les absurdités infondées et les impostures. Elle n'apporte pas plus de réponse qu'un dieu, un ange ou un diable de n'importe quelle religion.
Pour prendre un autre exemple, les absurdités de l'alchimie ne disaient rien sur l'éventuelle authenticité de la chimie qui n'existait pas encore et qui, elle, allait proposer quelques preuves. Faute de preuves, l'athéisme professé par Jean-Claude Carrière est, lui aussi, une croyance stérile, comme toutes les croyances, qu'elles appartiennent, entre autres, à une religion, au scientisme ou à une philosophie.
La forme est élégante, la performance littéraire brillante et souvent agrémentée d'humour. L'ouvrage est bien écrit, bien documenté, érudit, parfois même poétique. Mais le fond me laisse la forte impression d'un grand vide : je n'y trouve rien de nouveau, rien qui puisse étayer la position catégorique de l'auteur.
Cette attitude de négation en l'absence d'examen sérieux et en l'absence de réflexion est profondément antiscientifique, mais elle est aussi déraisonnable du simple point de vue du bon sens. Elle témoigne, en tout cas, d'un manque incroyable d'humilité, de cette indispensable humilité qui est la caractéristique essentielle du vrai scientifique, mais aussi de tout être humain raisonnable.
Quand on ne sait pas (et en l'occurrence personne ne sait...), il faut, me semble-t-il, avoir la modestie (et le bon sens) de dire "je ne sais pas". Et surtout, il faut chercher, chercher encore, chercher toujours... Au lieu de s'enfermer dans des certitudes, certes élégantes mais stériles !
Comment un habitant de la Rome antique, par exemple, aurait-il pu être certain que les communications quasi instantanées à grande distance ne pouvaient pas exister ? Aurait-il été raisonnable en niant l'existence des ondes électromagnétiques, simplement parce qu'il ne pouvait pas les imaginer ?
Jean-Claude Carrière postule en permanence l'existence d'un néant dans lequel on sombrerait après la mort. Mais le néant n'existe pas ! Puisqu'il existe quelque chose (au lieu de rien, pourtant plus simple que quelque chose…)... Et je me demande même s'il pourrait exister ! En tout cas nous n'en savons rien, ni vous ni moi ni Jean-Claude Carrière. Alors un peu de modestie, SVP, d'une modestie raisonnable sinon scientifique. Croire n'est pas savoir...
Ce livre de Jean-Claude Carrière présente avec force un bel exemple, un véritable archétype de l'attitude du croyant convaincu que je dénonce dans mon livre intitulé "Croire ou savoir" en l'opposant à celle de l'agnostique...
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