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Critique de loup0


loup0
01 décembre 2019
Aussitôt reçu, je me suis plongée dedans.
Puis au bout de quatre pages Parcoursup est comparé à la déportation des juifs... J'ai refermé le bouquin.


"Elle se doutait que Manon voudrait savoir mais elle n'a pas envie de répondre. Pas la vérité en tout cas. Qu'elle ne veut pas savoir, que regarder reviendrait à accepter qu'une machine, qu'un vulgaire algorithme, ait décidé de sa vie à sa place. Qu'elle a pesée, soupesée, triée ; qu'elle le sait, qu'elle s'en accommode.
Une idée atroce. Il y a longtemps, des gens ont été triés. L'image des trains de 1942, les longues files, les quais. La vie. a mort. Sur un seul geste, d'un seul homme. "


Retour à ma lecture et quelques pages plus tard c'est à la métaphore d'un viol collectif qu'il est fait allusion :


"Son portable vibre, elle le sort.
Sur l'écran, sa mère la félicite.
«Bravo ma chérie, tu es prise partout.»
Elle sait déjà. Elle a dû fouiner, trouver ses mots de passe.
Ne pas répondre. Se retenir de vomir. «Prise partout». On dirait un viol. Une tournante au fond d'une cave."


Parfois c'est dur de prendre du recul et de se dire que c'est le personnage qui parle aussi outrageant soient ses propos... En tout cas, tout ça m'a rendu dès le départ le personnage de Louise plutôt antipathique et malheureusement je n'ai jamais réussi à me rapprocher d'elle même si j'ai touchée par son histoire car j'y ai trouvé une part de moi-même.


Louise donc, est en terminale et est une élève brillante. Dans quelques jours le bac. Mais avant ça les réponses de Parcoursup vont tomber. Acceptée ici, sur liste d'attente ailleurs, peu lui importe vraiment. L'idée qu'on décide à sa place la répugne. Entre une meilleure amie qui la tire d'un côté et une mère étouffante qui la pousse de l'autre comment tracer son propre chemin ?


On suit alors le cheminement de l'adolescente le long de ces quelques semaines charnières de sa vie, et on se rend compte rapidement qu'au final Parcoursup n'est qu'un élément des questionnements de Louise et que son mal est beaucoup plus profond. C'est simplement l'élément déclencheur qui lui fait prendre conscience qu'elle peut véritablement prendre une part active dans sa propre vie au lieu de continuer a en être un témoin passif et d'accepter que les autres lui dictent sa voie.


Il m'a fallu aller chercher très loin dans mes souvenirs pour me remémorer mon état d'esprit en dernière année de lycée. A l'époque on s'inscrivait sur minitel (hello les dinosaures !) et comme personne n'en avait à la maison, on faisait ça directement au lycée donc impossible de revenir en arrière. On avait trois choix à formuler, et avec la sectorisation on était affectés dans les universités ou écoles les plus proches de chez nous.
Faire des études supérieures c'était la voie normale. On ne se posait même pas la question. Personnellement si je pouvais revenir en arrière, je ferais les choses complètement différemment. A 17-18 ans il y en a qui ont la chance d'avoir des envies, des rêves, des projets, ... d'autres non. Et c'était mon cas. Pour être honnête le commentaire de Witchblade posté un peu plus haut m'a un peu fait mal au coeur (d'ailleurs après l'avoir lu j'ai à peine osé jeter un oeil aux autres tellement il m'a remué...) . Parce que j'ai pendant longtemps été cette personne qui ne savait absolument pas quoi faire de sa vie et qui poussée par sa mère a choisi une voie qui ne lui convenait pas forcément, parce qu'au moins ça me permettait d'être quelque part. On n'a pas tous la même force de caractère, on n'a pas tous le déclic, et parfois ça prend énormément avant de trouver sa voie, d'admettre qu'on a fait des erreurs / perdu du temps, et tout simplement réussir à se mettre un coup de pied dans le derrière.

C'est aussi pour ça que j'aurais aimé que Louise ait un profil un peu plus passe-partout et que la fin prenne une autre direction. le fait d'être une élève brillante, de venir d'un milieu aisé et de pouvoir prendre le large avec l'argent de maman-papa est une exception pas une norme et c'est plutôt difficile de s'identifier à elle.


Ce roman a fait remonter pas mal de souvenirs en moi. Pas toujours bons. Mais au moins ça prouve que quelque part il m'a touché.
En tout cas il est bien différents de tout ce que j'ai pu lire de Marine Carteron jusqu'alors. Quand on m'a proposé de le recevoir j'ai dit oui tout de suite, mais je ne m'attendais pas du tout à une histoire si ancrée dans la réalité et l'actualité.

Désorientée fait partie d'une nouvelle collection des éditions Casterman "ici // maintenant" - des romans qui regardent le monde en face - , dirigée par Vincent Villeminot. J'avais déjà repéré "L'année des pierres" de Rachel Corenblit et je suivrai attentivement les nouvelles publications.




Masse critique privilégiée - Octobre 2019
Merci à Babelio et aux éditions Casterman
(Désolée pour le retard...)
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