AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Malahide75


Et boum et boum.
Wilco, penché à sa fenêtre, regarde passer Apothéose, une fille de sa classe, sur laquelle il a flashé.
Et boum et boum.
Ce n'est pas son nom, Apothéose. Mais Wilco trouve que ça lui va bien, tout en montant sur son bureau pour la suivre des yeux le plus longtemps possible.
Et boum et boum.
Va-t-elle le voir ? Va-t-elle se retourner ?
Et boum et boum.
Est-ce le bruit de son coeur ?
Non. C'est celui de son corps qui tombe sur le balcon d'en-dessous, puis sur le sol. Cinq étages plus bas.
Gisant à l'hôpital, incapable de bouger, de parler, de manger, de respirer seul, Wilco subit le monde qui l'entoure : ses parents, les médecins, sa soeur, le peu de famille qui lui rend visible.
Sa seule liberté, tout ce qui lui reste, c'est son imagination.
Que se passe-t-il en dehors ? Que fait son meilleur ami Wadim ? Que fait Apothéose ?Viendront-ils le voir ? Pensent-ils à lui ?

La littérature jeunesse est souvent assez neutre, manichéenne, et morale. Les gentils gagnent généralement, les méchants sont justement punis... Pas de grand choc frontal avec les vicissitudes et les inégalités intrinsèques de la vie. Bien sûr, il y a des épreuves à surmonter, mais justement, elles sont surmontées. Bref, la littérature jeunesse finit globalement bien.
Quelle surprise et quel choc donc à la lecture de ce « Proxima du Centaure » ! Car ici, pas de retournement de situation de dernière minute, pas d'intervention magique pour changer le destin de Wilco, pas d'erreur de diagnostic médical ni de miracle...
Wilco est foutu.
Passée cette information, sur laquelle ni Claire Castillon ni Wilco ne s'attardent de trop, que reste-t-il ? L'imagination du jeune homme, qui vit par procuration et imagination la vie du dehors, et sa famille et leur espoir tenu que tout cela va s'arranger.
Le lecteur est donc mis sérieusement à mal ! Car évidemment, ni les espoirs des parents, ni les rêves de Wilco ne prennent consistance. Enfermé dans son corps, Wilco est désespérément seul.
Allégorie de l'état d'adolescence ? Où l'ado, bloqué dans un corps qui le trahit, n'arrive plus à communiquer avec ses proches et mise tout sur ses amis ?
Un rappel de l'auteure que, non, il n'y a pas qu'aux adultes qu'il arrive de très gros coups durs ?
Mise en exergue de ce moment de vie où rien ne compte plus que l'amitié, les premiers vrais émois amoureux et le regard de ses comparses ?
J'hésite sur le message de ce roman. Un mélange de tout cela sans doute.
Du haut de mon statut d'adulte, j'ai surtout lu ceci : Dans les moments vraiment critiques, ce qu'il te reste, c'est la famille.

Que la brièveté apparente de ce roman ne trompe pas : cette lecture fait l'effet d'un tsunami, tant il brasse profond les sentiments, les rêves, les espoirs et les obsessions que nous avons tous eu à un moment ou un autre de notre vie. Et parce que l'état de Wilco n'est pas l'objet de pleurnicheries, la fin inexorable n'en est que plus violente.

Une lecture forte, qui tranche avec justesse avec la production gentillette actuelle.
Bravo à Claire Castillon de sa confiance envers les jeunes lecteurs : oui, ils sont tout à fait prêts à lire cette histoire !
Et bravo de ce coup de pied au derrière aux parents : non, vos ados ne sont plus des petits enfants, et oui, ils sont tout à fait prêts à lire cette histoire...
Commenter  J’apprécie          50



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}