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Critique de mesrives


Il y a quelques temps déjà je quittais les Grandes plaines, ces terres rebelles colonisées dès la seconde moitié du 19ème siècle par les pionniers européens venus par trains entiers s'installer dans le Middle West. Ils ont du louer à n'en pas douter les immigrants ukrainiens, des Mennomites, qui introduirent à cette époque une variété de blé d'hiver résistant au froid … car au-delà du centième méridien ou à ses approches les terres de l'espérance avaient aussi un goût d'enfer .

Mais aujourd'hui encore je reste ancrée sur ces terres du Nébraska avec Mon Antonia de Willa Cather. Je ne peux oublier la vision de ces plaines infinies, ondoyantes et rougeoyantes, âpres et vierges que l'auteure a su peindre, des tableaux magnifiant les grands espaces aux immenses prairies couvertes d'herbes rouges parfois zébrées de traînées jaunes, les tournesols semés sur leur passage par les Mormons mais où indiens et bisons ne sont déjà plus qu'un souvenir.
Mon Antonia, une histoire d'amitié, d'amour inconditionnel mais aussi l'histoire d'un pan de la colonisation de l'Amérique, un hommage aux pionniers, à ces fermiers des Grandes Plaines, à leur labeur, leur solidarité et leur capacité d'adaptation.

Oui, j'ai aimé cette rencontre ou plutôt ces rencontres.
Rencontre avec Jim Burden, le narrateur, orphelin, à peine âgé de 10 ans, venu de Virginie rejoindre la ferme de ses grands parents proche de Black Hawk, bourgade du Nébraska. Découvrir à travers son regard ce Nouveau Monde dur et vide en compagnie de sa grande amie, Antonia Shimerda ou Tony, la jeune fille de Bohême, fille d'immigrés tchèques, de quatre ans son aînée, comme lui en exil. Epier leurs escapades automnales pour explorer un terrain de jeu inconnu, sans limites, en observant minutieusement leur nouvel environnement. Et bien sûr suivre le destin de cette jeune femme solaire au mental d'acier malgré les nombreuses turpitudes de la vie.

Rencontre avec les différentes communautés d'immigrants européens, Allemands, Scandinaves, Français, Russes, Tchèques qui devaient surmonter la barrière linguistique, en découvrant leur quotidien, des conditions de vie souvent rudimentaires au début de leur installation, leur acharnement à vaincre les épreuves quelles soient météorologiques (blizzard, canicule, tornade) ou économiques (endettement) et leurs efforts parfois transformés en exploit.
J'ai aimé partager la vie des amies d'Antonia, ces autres jeunes femmes volontaires, indépendantes, aux caractères bien trempés et aux trajectoires différentes, gravitant autour de notre héroïne, qui se sont affranchies des codes d'une société étriquée. Des portraits très réalistes.

Et pour finir rencontre avec une auteure, Willa Cather, admiratrice de l'un de ses contemporains, Gustave Flaubert, qui avec son écriture m' a réellement enveloppée d'ondes bienveillantes et réconfortantes à travers des vagues successives d'émotions et de sensations en sublimant entre autre la communion de deux âmes devant un paysage à couper le souffle.

Ecrit en 1918, Mon Antonia est une oeuvre avec une facette nature writing, un classique de la littérature américaine mais pour moi une vraie découverte. Née en 1873 en Virginie dans une famille de fermiers, Willa Cather, est partie elle-même enfant vers les Grandes Plaines du Nébraska pour Red Cloud. Une oeuvre donc gorgée de sa propre expérience et enrichie par les nombreux souvenirs et les histoires de son entourage. Dans l'introduction de Mon Antonia, l'auteure déclare s'être inspirée des confidences de James Burden, un ami d'enfance, qui notait sur un carnet toutes les réminescences de cette époque là, instants partagés avec Tony, son Antonia.

Marie-Claude Perrin-Chenour qui la qualifie d'écrivaine de la Frontière dit à propos de son style que « D'une certaine façon, c'est Mark Twain écrivant comme Henry James ».
Willa Cather a obtenu le Prix Pulitzer en 1923.

Un roman féminin et dans un sens féministe mais un roman aussi spirituel et poétique.
Un coup de coeur inattendue. Une belle surprise

Adapté au cinéma en 1995 par Joseph Sargent j'aurai bien imaginé pour ma part une version de Mon Antonia par Terrence Malick. Il est toujours bon de rêver...
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