Faut que t'arrêtes avec tes bouquins. Ils t'empêchent de voir le monde comme il est.
Un foyer, ce n'est pas là où on vit, mais là où on aimerait bien mourir.
Nous avons dû faire face à des épidémies de malaria, de variole, de fièvre jaune et de choléra. Et l'an dernier, la grippe espagnole a emporté tant de nos concitoyens… Les marais qui nous entourent abritent des alligators, des ours, des pumas et des coyotes, des serpents venimeux et des araignées… sans parler des républicains !
- Ida, je te présente Cocaïne Buddy. (…)
- Alors quoi de neuf ? demanda Lewis.
- Rien de neuf, c'est le Blanc, le boss, c'est le Noir qui bosse.
Alors on aime les nègres ?
Les mots avaient été dits d'une voix douce, avec une froideur moqueuse. Le ton de quelqu'un qui se sentait supérieur, comme s'il donnait enfin libre cours à une rancune tenace ou jouait les redresseurs de torts. Michael ne saisit pas tout de suite ce qu'il avait entendu et il lui fallut encore un temps supplémentaire avant de comprendre que cela s'adressait à lui. Ce fut comme si une colère retenue explosait soudain en lui. Il tourna la tête d'un coup et examina la file de policiers devant lui, lançant à chacun un regard furieux en espérant trouver le coupable. Mais les policiers restaient tous impassibles, ou alors ils etaient en pleine conversation. Les regards partaient dans toutes les directions sauf vers lui. Il pensa a la facon dont ils allaient se comporter une fois dehors : ils rigoleraient en se tapant sur l'epaule, tout contents d'eux-memes. Cela ne fit qu'augmenter sa colère, une colère rentrée pleine de frustration, un courroux impuissant dont il ne pouvait rien faire. Il aurait voulu défendre son épouse mais ses ennemis étaient invisibles, comme des tireurs embusqués, hors de sa portée.
-Tu sais, on a un proverbe en Haïti : Complot plis fort passe ouanga.
(...)
-Ca veut dire : "le complot est plus fort que la sorcellerie."
Tout finit par changer. Il paraît que le monde progresse. Des fois, j'en suis pas si sûr.
De ce qu'il savait de la nature humaine, il ne fallait pas grand-chose pour qu'une foule effrayée devienne violente.
Il resterait un homme sans foyer. Parce qu'un foyer, ce n'est pas là où on vit, mais là où on aimerait bien mourir.
Cette aventure leur avait rappelé la haine qui existait dans cette ville et dont les gens comme eux étaient souvent les victimes. Une telle piqûre de rappel avait quelque chose de démoralisant, mais ils savaient de toute manière , après des années passées dans ce système de malveillance organisée, que cela ne servait à rien de s'attarder sur le venin d'autrui.