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Critique de Wazlib


N'y allons pas par quatre chemins, ma lecture du roman de Gavin Chait fut une catastrophe. Mais commençons par quelques constatations nécessaires avant d'enfoncer le clou.
Tout d'abord, je remercie une fois encore Babelio et les éditions du Bélial' qui m'ont gracieusement permis de lire ce livre gratuitement, en l'échange d'une critique argumentée. Ensuite, j'aimerais renouveler encore l'admiration que je porte aux éditions du Bélial', qui ont su au fur et à mesure des années s'imposer comme un éditeur d'imaginaire incroyable. On relèvera par exemple leur collection de novellas, "Une Heure-Lumière", qui est juste prodigieuse.
Ensuite, la critique peut paraitre sévère, mais cela n'enlèvera jamais les qualités du livre, et j'irais même jusqu'à appuyer cette évidence: il est fort probable que ce type de roman ne soit tout simplement pas vraiment de mon goût, ce qui est, vous l'aurez compris, tout sauf un critère universel.

Que s'est-il donc passé? Je vous le donne en mille: ce terrible ennemi de la lecture est venu me saisir à la gorge... L'ennui!
Tout commençait plutôt bien, avec un univers à la déliquescence très incarnée et bien décrite. le roman se situe entre le space-op et le post-apocalyptique: on est effectivement sur une Terre agonisante, polluée au maximum et peuplée d'Etats-puissances dirigés par des hordes armées; de laquelle de rares chanceux ont fui pour des cités orbitales. Et notre roman s'ancre donc dans une région du Nigéria, où la tradition côtoie la technologie. Car loin de suivre un peuple accablée, les héros d'Ewuru s'avèrent très judicieux lorsqu'il s'agit d'éviter la violence omniprésente et d'espérer l'avenir. Leur vie bascule cependant lorsqu'un vaisseau s'échoue aux alentours de leur village, avec à son bord un individu plutôt original et qui se révèlera plein de surprises...
Enfin, plein de surprises, on s'entend!

Si l'histoire semble alléchante sur le papier, elle ne l'est pas, mais alors pas du tout dans l'exécution. La faute, surtout, à un rythme narratif très inégal du début à la fin. le récit ne sachant pas très bien où se situer, on alterne entre de purs moments de science-fiction, d'action, et de contes. Et c'est très mal ordonné: si la tradition orale, et visiblement bien documentée, des conteurs Nigérien est au centre du roman, cela casse toute sa dynamique. Pire, même les envolées sf ou "blockbuster" (prenez le terme à la légère, bien sûr) du roman sont assez ratées puisque le manque d'équilibre se répand également sur les personnages principaux. Je parle évidemment de Samara, sorte de défenseur de cité orbitale symbiotisé, qui est tout simplement... Surpuissant. Et en découle le terrible syndrome du Superman, sauf qu'ici, vous pouvez la chercher longtemps la kryptonite.

On a donc un récit en dos d'âne et aux enjeux vite dévastés par un casting très inégal. Et même lorsque le récit passe la seconde, sur quelques scènes "dramatiques", le soufflé retombe bien vite tant c'est vite expédié, et noyé dans la foulée par un conte plein de symbolisme et de lenteur.
J'aime l'idée d'avoir étudié l'Afrique, et notamment Calabar, pour en avoir ressorti des mécanismes narratifs ainsi que certains thèmes, mais ça n'a franchement pas sa place ici, ou en tous cas, pas aussi abondamment.
Les sujets abordés, éminemment politiques et actuels, sont dispensés sur tellement de pages, et tellement répétés, que leur finesse apparente devient vite un boulet pour le lecteur qui semble lire un roman anthropologique ou sociologique déguisé en une sf déjà lue des millions de fois...

Je ne peux m'empêcher la comparaison avec "Qui a peur de la mort?" de Nnedi Okorafor, qui lui aussi situait son récit en Afrique et s'attachait à allier la tradition avec un élément "imaginaire", qui était pour le coup bien plus du ressort merveilleux. Et si le roman ne m'avait pas non plus vraiment emballé, il était tout de même beaucoup plus judicieux sur ses abords politiques et sa façon de traiter l'imaginaire africain. Et surtout, il était bien plus passionnant à lire.

Je tiens tout de même à souligner la complexité du monde que Gavin Chait a dessiné, et à ne pas enlever certains passages très réussis du roman, comme le passage de Samara à la prison orbitale Tartarus. Son écriture est de la même manière plutôt raffinée, mais difficile de véritablement l'apprécier dans son entièreté tant le fond soporifique vient plomber toute tentative de fouetter le lecteur.

Alors, me voilà bien navré. J'aimerais franchement lire une critique positive de ce livre, au moins pour souligner certains aspects que j'ai trouvé détestables et me confirmer que oui, c'était bien une affaire de "goûts et de couleurs". Ce qui est malheureusement certain, c'est que je ne continuerai pas l'expérience avec le deuxième tome déjà sorti dans la langue de Shakespeare, "Our Memory like Dust".
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