Elle se console quand même en se disant qu'un amour comme celui-là ne se trouve pas seulement dans les romans, voilà : il existe aussi dans les appartements.
Elle pense puis renonce à prendre des médicaments. Ma douleur ne m'orbitera pas autour, elle dit, elle me roulera dessus puis passera son chemin. Elle dit ma douleur, elle est ce qu'il lui reste, elle lui appartient.
Où s’en va ce que l’on ne dit pas ? Où est-ce que ça va se loger ? Est-ce que ça fait des petits, est-ce que ça fleurit, est-ce que ça pourrit ?
Le temps ramassé a, lui rappelle-t-il, son fond d’avantages : on n’a pas le temps de s’apitoyer sur nous-mêmes, de râler, d’être de mauvais poil, de n’avoir rien à se dire à table, de se lasser du corps de l’autre. On a toujours un paquet de choses à se raconter, et comme on a peu de temps devant nous, on en a encore du stock pour la fois d’après.
Comment tu te sens à mes côtés, elle lui demande. Toujours il lui rétorque un même discours, qui tient en un mot, deux syllabes : Trou-vé.
…son entourage n’est pas dupe de ce qui lui arrive. Et qu’encore une fois, quand ça ne va pas, elle répète ouais ça va ça va ça va, s’empêchant d’aller pleurer sous des jupes. Elle se dit parfois que ces choses-là qu’elle retient au-dedans d’elle et qui lui brûlent la bouche depuis un temps déjà finiront par la consumer de l’intérieur, de faire du monde sous sa peau une zone sinistrée.
Les histoires contrariées rendent plus inventifs que jamais.
Il demande ça va ? un peu fort, il parle toujours haut et fort, il est sourd de l’oreille gauche. Il ne s’excuse jamais mais se justifie toujours, disant ma surdité, elle me rend sonore.
Où s'en va ce que l'on ne dit pas? Où est-ce que ça va se loger? Est-ce que ça fait des petits, est-ce que ça fleurit, est-ce que ça pourrit?
Là, seulement, quand elle lit, elle parvient à être entière entièrement sans lui.