Là où tombe la pluie de
Catherine Chanter. Tout m'inspirait dans ce livre: le titre, le nom de l'auteur, la couverture avec cette tentaculaire plante verte sur fond sombre. Et l'intrigue bien sûr. Me voilà partie en Angleterre avec ma première lecture de l'année et une histoire qui s'annonce des plus singulières. Haut les coeurs!
Tout commence en prison. Nous voilà bien pour attaquer 2017. Puis retour après dérogation judiciaire exceptionnelle non pas aux sources mais à la Source. Un peu déroutant mais pourquoi pas. Ce n'est pas le premier roman que je lis où la narration commence par la fin pour revenir via flash-backs vers les prémices du développement. Et en effet,
Là où tombe la pluie alterne entre les époques, au demeurant pas si éloignées l'une de l'autre. On s'y retrouve assez vite et la narratrice resserre petit à petit le lien qui unifiera l'ensemble.
Le début chronologique de l'intrigue part d'un ras - le - bol de deux Londoniens lassés de la pollution, du vacarme urbain et de certains démêlés de Monsieur avec la police (tiens, tiens...) qui le laissent innocenté mais comme exsangue.
Le couple souhaite se lancer dans une vie de fermiers sur une petite exploitation éloignée de tout attroupement humain. Ils trouvent leur vision idyllique à la Source, cottage entourée de terres arables et boisées. Et surtout, comme son nom l'indique, d'une source d'eau prolifique créant un vrai paradis d'herbe verte et de gras pâturages. Rien de particulièrement extraordinaire pour l'Angleterre me direz-vous! Que nenni, répondrai-je. Car ce qui semble débuter comme un remake du film Une hirondelle a fait le printemps, s'apparente rapidement à un climat de désastre écologique. En effet, une terrible sécheresse sévit sur tout le Royaume-Uni depuis déjà plus d'un an et on sent une société tendue par les mesures restrictives mises en place.
Et de la tension, ce n'est pas ce qui ca manquer pour nos deux aventuriers du temps (météo) perdu! Une pluie presque divine arrose leur propriété, maintenant leurs plantations dans une luxuriante aberrante aux yeux des habitants du village le plus proche. Ceux-ci tirent la langue, mettent la clé sous la porte voire se suicident faute de pouvoir s'en sortir. S'ensuit un ostracisme terrible qui emprisonne la narratrice et son mari dans les limites de leurs terres. La tension se fait également de plus en plus dense entre eux deux. La fille de la narratrice, plus ou moins ex-junkie mère d'un adorable petit Lucien de 5 ans, en rajoute un surcroît en s'invitant sans prévenir avec une sorte de communauté hippie. Et en laissant pénétrer sur les terres un groupe mystico-religieux constitué de quatre femmes adorant la Rose de Jéricho. Elles viennent attirées par l'oeil intérieur de leur chef, femme charismatique à la longue chevelure auburn. Elle annonce l'avènement d'un Troisième Testament dans lequel la femme disposera de la Terre, en l'occurrence, la Source. Sa philosophie croise aux frontières du christianisme et du New Age, avec des émanations de paganisme qui n'est pas sans rappeler les mystères liés à Avalon.
D'abord plus que critique et sceptique, la narratrice finit par adhérer corps et âme, trouvant paix et sérénité en compagnie de ces femmes, dans l'exaltation des rituels et des prières, jusqu'à devenir La Rose de Jéricho, l'Élue parmi les élues, qui annoncera la bonne parole via le site Internet du groupe.
Couple qui bat de l'aile, ambiance catastrophiste avec mesures d'exception mises en place par l'État, secte, envie confinant à la haine des externes au domaine, tout tombe dans la spirale jusqu'à cristalliser le drame qu'on sait dès le premier chapitre être survenu.
Entre son confinement en résidence surveillée après arrestation et réminiscences de ce qui s'est réellement passé, la narratrice démêle l'écheveau afin de connaître la vérité, combinant cette recherche avec la cohabitation obligatoire de trois gardes.
Bref, autant d'éléments en présence pour une histoire intrigante, captivante et qu'on penserait totalement immersive. Et c'est là où, pour ma part, le bât a blessé. Je garde un souvenir somme toute mitigé de cette lecture. Loin de moi l'idée de dire m'y être ennuyée. J'ai suivi la narration avec attention pour repérer les indices me paraissant important. J'ai eu envie de connaître la vérité bien sûr. Néanmoins ce ne fut pas avec un enthousiasme débordant. L'écriture est de qualité, les éléments bien amenés. Manque... Je ne sais pas, peut-être un peu plus d'empathie pour la narratrice. Avis très subjectif, Je l'avoue. Je me suis surtout sentie mal à l'aise vis à vis de l'ordre de la Rose de Jéricho par méfiance envers ce genre de secte qui m'apparaît très vite comme malsain.
Une lecture qui reste en dépit de mes quelques objections (au final peu conséquentes) intéressante. Il s'agit, je crois, du premier roman de
Catherine Chanter. Un tour de force d'avoir su mélanger dans un même roman des éléments de catastrophe écologique, de recherches spirituelles et d'enquête criminelle. Bravo et à voir le prochain opus.