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Citations sur Les Mangeurs de nuit (145)

La femme en kimono est sa mère, Aika. Les parents de celle-ci l'avaient fait poser devant un photographe de Kyoto, afin d'envoyer son portrait à un inconnu de l'autre côté de l'océan Pacifique, au Canada."Il m'a trouvée belle" avait résumé Aika le jour où elle avait montré le cliché à sa fille. L'une des rares fois où elle s'était confiée sur sa vie d'avant. "Il a proposé de m'épouser, alors j'ai pris le bateau pour le rejoindre. Voilà comment j'ai rencontré ton père. " Comme des milliers d'autres Japonaises, au début du XXe siècle. On les appelait les picture brides. Les fiancées sur photo.
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- Tu sais ce que cela veut dire, Hannah Hoshiko ? Que les peuples qui ne partagent pas la même langue ne pensent pas de la même façon. Cela signifie aussi que les mots ont le pouvoir d'inventer le monde. N'est-ce pas merveilleux ? Souviens-toi toujours de cela mon enfant. Peu importe ce que la vie t'arrache : tu pourras toujours le lui reprendre avec les mots.
(p.66)
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Quelque part sur le canal, Colombie-Britannique
Octobre 1945
La brume ourlant l’horizon se colore timidement de rose lorsque Jack rejoint son chien Buck à l’avant du bateau. Son fidèle compagnon, un bâtard noir au sang de loup, apprécie autant que lui cette heure où l’obscurité règne pour quelques minutes encore. Ces instants où l’eau est un miroir paisible qu’aucun souffle ne brise. Il porte la tasse de café à ses lèvres. Caresse l’animal à ses pieds, tourné vers la forêt où les créatures de la nuit bruissent doucement. Ici bat le cœur du monde et le reste des hommes l’ignore.
(p.13)
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Pour les lucioles, c'est pareil. Ici elles sont gigantesques, si grandes qu'on les appelle les mangeurs de nuit. Après le coucher du soleil, les mangeurs de nuit grignotent l'obscurité de leurs bouches gourmandes, ce sont les points lumineux que l'on voit danser dans les bois. La journée, au lieu de se reposer sous l'écorce des arbres, comme nos hotarus, ils se désaltèrent de la brume de beauté. Tu n'es pas sans savoir que de toute belle chose portée sur notre terre, il émane un parfum de grâce dont les mangeurs de nuit sont particulièrement friands.
(p.38)
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La fièvre brûle dans ses yeux.
- Un crépitement, tu es sûre ? Ça ne serait pas plutôt un pétillement ?
- Si, ou alors un grésillement.
- Un grésillement ou un étincellement ?
- Non, un gazouillement. Ou peut-être un scintillement.
- Hum, c'est bien ce que je pensais. Ce sont les histoires.
- Comment ça ?
- J'en ai avalé bien trop d'un coup. Sais-tu qu'elles ressemblent à de petites fées ? Comme elles n'avaient plus de place dans mon estomac, elles se sont glissées jusqu'aux poumons. Et maintenant elles sont coincées. Le bruit que tu entends est le frottement de leurs ailes à l'intérieur de ma cage thoracique.
- Tu es malade à cause d'elles ?
- Un peu. Respirer avec des fées dans les poumons n’a rien de commode, tu imagines ? Mais je vais guérir. Tant que tu continueras à me raconter des histoires, j'irai bien.
(p.77-78)
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Écouter ? Au tout début, les deux garçons ne comprenaient pas de quoi elle parlait. Ils essayèrent encore et encore, sans succès, pendant des mois. Jusqu’au jour où ils n’eurent plus besoin de fermer les yeux pour sentir la forêt battre en eux comme un second cœur. Alors, ils entendirent les griffes de l’ours raclant l’écorce d’un épicéa centenaire. L’eau des glaciers dévalant les pierres mouchetées de lichen. Le plongeon du louveteau découvrant la rivière. Le combat entre deux mulots pour une pomme de pin. Le craquement discret de la branche réceptionnant le bond de l’écureuil. Le crépitement du bourgeon prêt à jaillir. Ces sons les emplirent. Les deux enfants vibraient. Ils étaient ancrés à la terre et libres comme le vent.
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(En parlant des histoires)
Il faut les sauver! Mais comment ?
En laissant les histoires entrer en soi. Sais-tu ce qui se passe alors? Elles te guérissent de l'intérieur, comme un médicament. Leurs ailes chatouillent un peu la première fois, mais on s'habitue. On accueille les histoires puis on les libére en les racontant,de façon à ce qu'elles réparent d'autres que soi.
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Hors du temps. Si loin des villes, des enjeux de pouvoir et d’argent, où les citadins sans racines se laissent bercer par l’illusion que tout s’achète, même le temps.
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Les peuples qui ne partagent pas la même langue ne pensent pas de la même façon. Cela signifie aussi que les mots ont le pouvoir d’inventer le monde.
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La pluie glisse sur les plumes des oiseaux, mais imbibe le pelage des ours ; elle frappe la surface de la sœur rivière, cavalcade sur les sentes de terre, comme une enfant furieuse avant de rire aux éclats dans les mares, de tournoyer farouchement dans les flaques opportunistes puis de s’en échapper. Sous le déluge, la plupart des mammifères poursuivent leur va-et-vient avec indifférence, s'abritent où ils peuvent, s'ébrouent ; les gouttelettes ainsi projetées rejoignent d'autres perles liquides, dessinant d'infimes rigoles sur le lichen, là où la vie microscopique de la forêt célèbre les torrents dont le ciel s'épanche.
Jack écoute l'eau frapper son propre corps devenu instrument. Le doux tumulte aquatique résonne dans sa boîte crânienne, dilate sa peau, râpe contre le cuir de sa veste. Les vibrations le parcourent comme des impulsions électriques, remontent ses muscles, l'apaisent. Il ne s'appartient plus complètement. Il n'a plus de passé, plus d'avenir : il est dans l'instant. L'air vibrionne autour de lui, saturé d'humidité et de chuintements. L'énergie de la pluie irrigue chaque créature de la forêt, révélant le réseau entre elles. Dans le grand orchestre de l'averse, Jack mesure l'intensité de ces liens. Leur profondeur. Un crissement le tire de ses réflexions. Un léger infléchissement dans le champ de la forêt. Un désaccord s'installe. À ses côtés, Astrée et Buck dressent les oreilles. Eux aussi ont remarqué quelque chose. Une présence mauvaise rôde. Sous les trombes d'eau, il est incapable de distinguer quoi que ce soit, mais tout en lui se tend. Les chiens sont sur le qui-vive. Comme leur maître, ils détestent ne pas savoir à quoi ils ont affaire. Ou à qui ? Jack se relève lorsqu'un cri à glacer les sangs perce non loin, surpassant le vacarme de l'eau.
(p.70-71)
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