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Critique de SerGarlan


Je ne suis pas un habitué du format recueil de nouvelles, ceci expliquant sûrement que j'ai lu Célestopol plus lentement qu'un roman standard (genre le Village smile ), mais j'en ressors ravi. J'avais aimé le Village malgré quelques tics de jeunesse (petits soucis de rythme parfois, méchant qui en fait des caisses) et je trouve qu'Emmanuel Chastellière s'est amélioré dans son style. L'écriture format nouvelle apparaît ici concise, efficace, avec ce qu'il faut de poésie et d'imaginaire quand même.

Cette exploration de la cité lunaire via le regard de multiples protagonistes permet de saisir au mieux son atmosphère rétro-futuriste empreinte d'âme slave. On a l'impression d'y être, de se promener avec les protagonistes le long des canaux de Sélénium, de gravir le beffroi de Saint Basile, ou même d'aller parfois en escapade à l'extérieur du dôme. Dépaysement assuré (et big up au splendide artwork de Marc Simonetti). Mais effectivement, Célestopol, c'est aussi le destin croisé d'âmes blessées, à la dérive, à commencer par ce duc Nikolaï méprisé par la tsarine, rejeté par ses proches, qui tente dans son exil lunaire d'exister par-delà tous ceux qui le méprisent / le rabaissent. En ressort un personnage mystérieux et fascinant, parfois un peu caricatural aussi (réaction très cruelle dans "les Jardins de la Lune"), que l'on aime détester mais avec lequel on entre souvent en empathie.

Des personnages touchants, il y en a des caisses, comme ce viticulteur qui s'enferme dans le mensonge, ces frères ennemis amoureux d'une même femme que les événements acculent au drame, ce voleur épris d'une belle violoncelliste française (magnifique scène sur la glace au passage), ces automate humanisés, ici un fugitif voulant admirer l'intérieur du dôme, là une esclave sexuelle éprise d'une cliente, là encore un "médium" ballotté par la tragédie. D'autres personnages sont attachants : Anton le journaliste désabusé, Clémence l'historienne têtue, Igor le contremaitre bourru et indépendant... et bien sûr le truculent duo Arnrun et Wotjek, la cow girl islandaise et l'ours parlant ayant droit au beau rôle dans deux nouvelles, un caméo dans une autre et aussi une petite BD pour ceux qui ont précommandé le livre. En espérant voir ce duo débonnaire et comique tenir le haut de l'affiche lors d'un prochain roman ?

Je n'ai pas vraiment de reproches à faire à ce recueil hormis il est vrai quelques imperfections formelles (couvertures cartonnée fragile, quelques coquilles de ci de là) et, évidemment, quelques nouvelles en deçà des autres (pour ma part : Oderint Dum Metuant trop prévisible - je sais que cet avis ne sera pas partagé, La chambre d'ambre trop anecdotique, la danse des libellules un peu tirée par les cheveux dans sa conclusion, les jardins de la lune trop succincte). Quelques fins sont un peu abruptes, il faut aimer "rester sur sa faim". Fly me to the moon est autosuffisante et antérieure aux autres nouvelles, ça se sent mais je ne vois pas comment la placer autrement dans ce recueil. Pour le reste honnêtement on navigue entre le vraiment très bon et l'excellent, et je ne peux que vous recommander particulièrement Face cachée, Dans la brume, le boudoir des âmes, Fly me et Tempus fugit qui sont vraiment superbes... pour plein de raisons différentes.

Bravo à Emmanuel Chastellière, ça ne présage que du meilleur pour ses prochains projets.
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