J'éprouvais une sensation étrange, il y avait la souffrance du manque de la famille que nous avions perdue, et en même temps ce bonheur merveilleux, inestimable : je découvrais enfin ma mère.
Chaque jour qui passe est une victoire sur le deuil, chaque jour qui passe me rapproche davantage de celui où l’on se retrouvera...
Le plus dur, pour nous qui sommes habités par cette indicible douleur, est de puiser en nous une raison de vivre, un but, une cause à défendre, pour soi ou pour autrui.
Simplement paraître normale est un effort au quotidien sans nom, mais je m’efforce, malgré cette douleur infinie qui pèse si lourdement sur mes épaules, à rester debout.
Partager. C'est ce que j'ai voulu faire en écrivant ce livre. Transmettre un peu de la force qui me reste pour vous aider, si je le peux, à avancer, vous qui souffrez comme je souffre.
Je l'aimais à la folie, ce père qui s'était volatilisé et qui était revenu. C'était un homme infiniment généreux, mais extrêmement perturbé aussi, sensible, tendre, excessif et parfois violent. Mais pas avec moi, et jamais physiquement en tout cas.
Malgré tout, j'idolâtrais mon père. J'étais dans le déni pour beaucoup de choses et mon jeune âge me permettait de le visualiser comme une sorte de héros.
Je pense sincèrement que l'amour inconditionnel que nous portons à notre fille nous donne cette incroyable force de survie.
Le désir doit être le moteur essentiel de l’adoption : désir d’accueillir un enfant pour l’aimer, s’occuper de lui, lui transmettre une histoire familiale, des valeurs, lui donner le foyer qu’il n’a pas, l’accompagner dans son apprentissage de la vie, l’aider à grandir, l’aimer, le choyer, comme un enfant à qui on aurait donné naissance. Le lien entre enfants et parents est bien plus que le patrimoine génétique. Je suis persuadée, ayant vécu la maternité, qu’il est le même avec un enfant non biologique mais tout autant désiré.
Mon père, ce fou d'aventure qui n'avait jamais quitté le rivage, est enfin parti ainsi avec un petit clin d'œil.
La vie ainsi se brise sans que rien ni personne puissent le présager.