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Critique de Kirzy


Sic parvis magna. « Des petites choses naît la grandeur ».
Tout peut sembler terriblement ordinaire et banal lorsqu'on lit les premiers chapitres du dernier roman de Tracy Chevalier. Tout n'est en fait que subtilité et récit en dentelle ne dévoilant l'habileté de sa construction qu'à fleur de mots, dans l'écrin de quelques phrases, deci delà, qui ravissent le coeur du lecteur, le mien en tout cas.

J'avais tout pour être conquise rien qu'avec la référence à Jane Austen, morte et enterrée à Winchester, dans la cathédrale, à 41 ans et sans enfant. le clin d'oeil à Jane Austen n'est pas gratuit, c'est même une évidence tant cette brodeuse de Winchester aurait pu être une de ses héroïnes transportée en 1932.

Violet a 38 ans, c'est une des 2 millions de «  femmes excédentaires », terrible expression qui désigne cette génération de femmes sans possibilité de se marier après l'hécatombe de la Première guerre mondiale. Dans une société où seul le mariage offre un statut, Violet, dont le fiancé est mort dans les tranchées, doit trouver sa voix, entre mépris pour la vieille fille qu'elle deviendra sans doute et suspicion pour cette femme seule qui pourrait constituer une menacer pour un ménage.

Lorsqu'on fait sa connaissance, elle vient de faire le choix de quitter, douloureux mais nécessaire, une mère insupportable et castratrice pour emménager à Winchester et travailler comme secrétaire, tant pis pour l'indigence dans lequel elle vit, tant pis pour sa douleur, elle est libre. le roman est l'histoire de sa renaissance à travers son émancipation, de son réveil pour se détacher du passé et revenir à la vie. Sa quête du bonheur est jalonnée de rencontres, de promesses qu'elle aura à saisir pour devenir celle qu'elle veut sans se soucier du regard des autres.

Ordinaires, oui, banals, sans aucun doute, sont les petits événements de la vie de Violet, mais l'écriture ciselée et juste de Tracy Chevalier vibre d'empathie pour son personnage, pour ses personnages, tous admirablement campés, que ce soit dans les portraits physiques, moraux ou leur évolution psychologique. Jane Austen n'est vraiment pas loin, avec la pointe d'humour qu'il faut pour relever le tout. Tracy Chevalier excelle à écrire sur ces personnages lambda qui se retrouvent comme accidentellement au centre d'une histoire.

Et quel magnifique portrait de femme, après celui de Griet la jeune fille à la perle ou de la chasseuse de fossiles Mary Anning ( Prodigieuses créatures ) ou Honor ( La Dernière fugitive ). Quelle audace aussi de faire reposer l'émancipation de Violet sur des univers aussi singuliers que celui de la broderie d'agenouilloirs religieux ou des sonneurs de cloches !

Le tempo s'accélère dans les cinquante dernières lignes et tous les petits détails parsemés dans les chapitres précédents prennent sens dans un urgence vitale emplie d'émotions qui fait du bien. Je déteste cette expression « feel good » accolée à certaines romans, mais là, c'est vraiment cela, mais sans neuneterie ni niaiserie, et avec intelligence et élégance. J'ai refermé ce roman heureuse.
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