Homélies de Jean Chrysostome sur l'incompréhensibilité de Dieu

"Les concepts créent des idoles de Dieu, le saisissement ou l'émerveillement seuls en pressentent quelque chose" (Grégoire de Nysse, cité p. 52).

« Ô abîme de la richesse, de la sagesse et de la connaissance de Dieu ! Que ses jugements sont insondables ! »
Il (Paul) ne dit pas « incompréhensibles », mais insondables ».
S’il est impossible de les sonder, il l’est bien davantage encore de les comprendre.
(page 73)

Ce qu’on ignore, ce n’est pas l’existence de Dieu, sa Présence, mais son Essence.
Jean « sait la vérité mais non pas toute », il sait que Dieu est, il ne sait pas qui Il est.
« Nous ne savons pas ce qu’est Dieu, mais nous savons qu’Il est.
Nous ne savons pas ce qu’est la sagesse de Dieu mais nous savons que Dieu est sage.
(page 54)

Jean est avant tout un homme de prière ; pour lui comme pour Évagre, « est théologien non pas celui qui spécule mais celui qui prie », et c’est dans la prière qu’il s’éveille au paradoxe du Réel, infiniment proche et toujours inaccessible.
C’est dans cette antinomie qu’il doit se tenir : réfuter toute prétention à la connaissance et affirmer la possibilité de l’expérience.
(page 53)

Il est digne et juste de te chanter, de te bénir, de te louer, de te rendre grâce et de t’adorer partout où se manifeste ta Présence.
Car Tu es Dieu inexprimable, incompréhensible, invisible, inaccessible, Être qui n’est pas du Temps (Éternel), Toi et ton Fils unique et ton Esprit Saint.
(page 52)

Si l’homme paraît supérieur à l’argile et plus beau qu’elle, cette différence ne tient pas à une inégalité de nature, mais à l’habileté de l’ouvrier, car tu ne te distingues en rien de l’argile.
(page 95)

Mais il arrive aussi que le « Tout Autre, Précisément ici » soit précisément ici non comme ce qui nous remplit, nous comble puis nous déborde, mais comme ce qui précisément ici nous « manque ». Là où on s’attendait à l’Être, à l’Être plein : Rien.
Alors, non seulement la terre manque à nos pas, le Sens manque à notre esprit, la parole manque à notre souffle, l’Être manque à notre appel, l’Être manque… Dieu n’est pas absent, Il est l’Absence.
(page 44)

Le numineux
Le point de départ de la réflexion et de la théologie de Jean Chrysostome dans ses homélies Sur l’incompréhensibilité de Dieu est une expérience. Cette expérience pourrait être qualifiée de « numineuse ». Rudolf Otto parle du numineux comme étant l’expérience fondatrice de toute religion et la définit comme « Présence au Mystère », Mysterium tremendum et fascinans, à la fois terrifiant et attirant. Dans le même mouvement on se sent attiré et repoussé. Il s’agit de l’appréhension d’une réalité dont la grandeur est absolument disproportionnée avec les limites de l’homme et le jette alors dans une sorte de « stupeur ».
(page 40)

La mansuétude enseignée par le Christ
Tu es serviteur du Dieu de paix : lui qui chassait les démons et répandait d’innombrables bienfaits, quand on le traita de démoniaque, il ne foudroya pas ses insulteurs, ne les écrasa pas, ne fit pas brûler leur langue si impudente et insensée, bien qu’il en eût le pouvoir ; il se contenta de repousser l’accusation en disant : « Non, je ne suis pas possédé du démon, mais j’honore celui qui m’a envoyé. »
(page 79)

Car le Seigneur est généreux, Il reçoit le dernier comme le premier, Il admet au repos l’ouvrier de la onzième heure comme celui qui a travaillé dès la première heure. Il fait grâce au dernier et Il chérit le premier ; Il donne à celui-ci et Il accorde à celui-là ; Il reçoit l’œuvre et Il accueille l’intention ; Il honore le travail et Il loue le bon repos.
(présentation - page 32)