Citations sur Marcher à l'estime (31)
La Collection
La collection participe d'un autre mouvement que la collecte. Finis les bois et les ornières, les lisières, les plans d'eau, la belle passementerie des paysages, leurs tresses, leurs torsades, leurs galons.Finies les riches bordures des champs, la ganse des fossés où trouver, en marchant, le foisonnement des choses éparses. On passe du fortuit à ce qui va rester, à ce qui demeure chez soi, qui pour longtemps sera à l'abri.
( p.76)
J'aime les bricoleurs du dimanche, ceux qui travaillent la pierre et le bois pour échapper aux rattrapages systématiques. Il en est de très malins; ils ont bâti en dur leur monde à eux; on ne risque pas de le détourner. Ainsi Adolphe Julien Fouré, cet abbé de Rothéneuf en Bretagne qui construisit à la fin du siècle dernier, sur 500 mètres carrés de rochers de granit, son insolent enclos paroissial bien à lui, sa saga historiques des héros du pays.
( Le Temps qu'il fait, 1995, p.147)
Un café en ville aussi peut peut être un bateau où appareiller, ramer vers d'autres équipées .
(Le Temps qu'il fait, 1995, p.146)
La nature de l'art
Qu'en est-il de l'art brut de Gaston Chaissac ramassant la moindre planche pour la peindre ?
( Le Temps qu'il fait, 1993, réédition 1995, p.138)
Caillois et Baltrusaitis
Ses ouvrages (*de Caillois) sur les pierres restent inégalés, ils constituent une suite de véritables traités chromatiques.La poésie fuse au coeur d'une description aux accents amoureux. Il y a du Champolion en lui, dans son art de l'observation des insectes, des traces, de l'écriture perdue des cryptogrammes dessinés dans des troncs d'arbres.
(...)
J'ai eu de la chance, il y a vingt ans, de pouvoir voir une partie de ses collections exposées à Vichy.Ce fut une révélation. (...) Sous les yeux, sa collection donnait enfin de la dignité à cette idée saugrenue de tout ramasser. Il y avait là aussi des toiles, des lettres à des écrivains, toute la richesse d'une vie.Ce croisement des chemins entre l'histoire naturelle et la littérature m'apparaissait d'emblée au coeur de ce que je cherchais.
( Le Temps qu'il fait, 1993 / réédition 1995, p.119)
La Nature de l'art
L'art est ce rêve de désirs entiers où nous avons tous un jour imaginer nous baigner.(...)
L'art est là pour réaliser l'impossible.Il doit réenchanter la vie.
( Le Temps qu'il fait, réédition 1995, p.131)
La lumière est la grande réponse de la vie, la seule peut-être. La beauté est au prochain pas, au bout des jambes, offerte et changeante, iridescente, irradiante, splendide, fulgurante.Et curieusement toujours inédite.
( Le Temps qu'il fait, réédition 1995, p.13)
Le Land Art
En réaction aux galeries d'art où on piétine plus qu'on ne voit, les tenants du Land Art ont décidé très vite de tout mettre en oeuvre pour sortir de ces pas perdus, pariant sur l'étendue. Certaines de leurs réalisations furent de véritables bouleversements du paysage, hésitant entre sculpture et travaux publics.
( Le Temps qu'il fait, réédition 1995, p.139)
Construisons donc des châteaux de sable.Il en est de magnifiques, et l'on peut passer maître en de telles activités. La mer peut même, quand elle est apaisée, en épouser les remparts et les remblais.Elle joue aussi depuis toujours à ces reflux, un jeu de vie et de mirt perpétuant le Monde.
( Le Temps qu'il fait, réédition 1995, p.145)
Que le monde soit étonnant, certes.Je le croyais bizarre, et plus : inattendu, surprenant, insolite, excentrique, paradoxal, improbable, singulier, merveilleux, miraculeux, fauleux, unique et stupéfiant. Je ne crois pas en finir !
Lui non plus !
Il y aura toujours du gui sur l'arbre.La nature est un panier percé d'où nous naissons, mais combien d'entre nous s'en souviennent ? C'est pourquoi nous ne lui épargnons rien, trop pressés d'en piller les fruits.
( Le Temps qu'il fait, 1993, réédition 1995, p.145)