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Critique de SophieLesBasBleus


Un poème de René Char en épigraphe et c'est déjà, pour moi, une complicité instaurée avec le roman à venir ! Complicité qui n'a cessé de se confirmer tout au long de ma lecture de ce joli premier roman.
La vie semble bien douce dans ce petit port de l'Atlantique au mitan des années 60. Tous les habitants se connaissent, se saluent, se parlent, au bistro ou à la sortie de la messe. Pour Joseph, le narrateur, le village est une extension du cocon familial dans lequel il grandit, blotti dans l'amour de ses parents. Les jours s'écoulent semblables les uns au autres dans la familiarité des lieux, des personnes et des petits évènements quotidiens. Nulle question à se poser : plus tard, Joseph sera marin-pêcheur, comme son père, son idole, son héros et la vie continuera comme ça... tranquille... sans accrocs...
Mais vient le temps de la pêche intensive qui nécessite de plus gros bateaux qui nécessitent de plus gros crédits qui nécessitent une pêche de plus en plus intensive. Joseph assiste en spectateur à cet engrenage fatal et absurde, car son père a choisi de garder son ancien bateau et son mode de pêche traditionnel. La disparition dramatique de ses parents projette le jeune garçon de l'adolescence à l'âge adulte, d'une vie au tracé défini aux troubles d'un avenir incertain. La trajectoire de Joseph s'infléchit alors que parallèlement la modernité transforme insidieusement le village et ses habitants. Dès lors l'éventail des possibles se restreint pour qui ne veut pas se soumettre...
J'ai trouvé beaucoup de charme à cette histoire racontée avec une simplicité innocente qui n'exclut aucunement la lucidité. Joseph semble se laisser porter par les évènements sans avoir prise sur eux, mais ce n'est que l'apparence d'un personnage fondamentalement bon et accommodant qui finalement, sans brutalité, ne transige ni sur ses rêves, ni sur ses exigences. le naufragé du titre peut correspondre à ce personnage qui ne parvient pas, (mais qui ne souhaite probablement pas non plus) à participer à une vie sociale et économique aux antipodes de celle qu'il a connue dans son enfance. Mais le naufrage peut aussi renvoyer à celui d'un monde dont le souvenir ne semble plus subsister que dans la mémoire des anciens et dans celle de Joseph.
La clarté de l'écriture déroule le fil des années et témoigne des changements qui bouleversent progressivement le village et, au-delà de ce territoire circonscrit, le monde. François Colcanap évite les écueils du passéisme et du cynisme pour nous livrer un constat désenchanté et lumineux sur une période qui a vu se transformer profondément les structures de la société.
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