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Critique de Sachenka


La semaine dernière, alors que j'étais à la bibliothèque, je me suis retrouvé devant les romans de Francisco Coloane et j'en ai emprunté deux : le dernier mousse puis le sillage de la baleine. Ils semblaient porter des mêmes thèmes, surtout la vie de marin dans les mers du sud, mais ça ne m'a pas dérangé. Finalement, même si c'est effectivement le cas, ils sont assez différents dans leur traitement. le premier était écrit dans un style un peu plus léger – quoique magnifique – autant accessible pour les jeunes que les moins jeunes. de son côté, le deuxième roman semble aborder des thèmes un plus matures et sérieux. L'univers décrit est le même mais raconté avec plus de détails et un vocabulaire plus précis et riche, peut-être pas à la porté des plus petits.

Le sillage de la baleine commence sur une ile excentrée du sud du Chili. Un pauvre adolescent, Pedro Nauto, fils naturel d'un père inconnu, perd sa mère et se retrouve orphelin. Passons rapidement sur son grand-père riche et égoïste. le garçon est travailleur et déterminé mais, avant de se lancer à l'aventure, il choisit d'honorer les engagements de sa mère. Il vit de petits métiers dans sa région natale, à aider à la récolte dans les champs, chez le meunier ou encore à pêcher les huîtres. J'ai trouvé cette partie un peu longue, j'ai eu parfois l'impression de lire un roman du terroir. C'est un peu de ma faute, je savais qu'il souhaitait s'engager sur un navire et j'avais hâte de le voir prendre le large. Heureusement, cette partie n'est pas exempte de bons moments, quelques uns romantique (ah, la belle Rosalia, j'aurais souhaité qu'elle soit plus présente, surtout dans la deuxième partie du roman !) et d'autres un peu plus mystérieux, frôlant le fantastique : les attroupements étranges des mouettes, les supposées apparitions du trauco (un gnome violeur), sans oublier ces histoires de sorciers et de sirènes puis, plus important encore, le Caleuche, une sorte de vaisseau fantôme. Ce folklore chilien, agrémenté de plein de termes espagnols de l'endroit, ajoutent des couches et de la richesse à cette histoire humaine.

Et Francisco Coloane trouve le moyen d'insérer ça et là quelques poèmes en espagnol. Je n'en comprenais que la moitié (il y a des traductions en bas de pages) mais c'était si joli, si agréable lire ! Décidément, je suis en train de tomber en amour avec la plume de cet auteur.

Avec la deuxième partie de son roman le sillage de baleine, on quitte la terre ferme pour un bateau, le Leviathan. Déjà, avec un nom pareil, symboliquement chargé avec cette référence au monstre marin biblique, le lecteur peut se demander dans quelle aventure le jeune Pedro s'est engagée. Avec lui, il découvre la vie de matelot, la chasse à la baleine. C'est rempli de détails intéressants sans la lourdeur qu'on retrouve parfois quand les auteurs tiennent à tout décire. Elle devait être rude, cette vie de marin, mais en même temps ô combien honnête et concrète. Il me semble que, à la fin d'une journée, j'en tirerai le sentiment du travail bien accompli. Et que dire de ce voyage dans les mers du sud, entre les ilots chiliens et l'Antarctique, sans oublier le détroit de Magellan, le cap Horn et les icebergs, à traquer les baleines et autres grands mamifères marins. Je m'imaginais avec eux, à « scruter la mer, froide et grise comme le ciel, mais d'une clarté scintillante qui réduisait la visibilité. La lumière australe s'étendait à l'infini entre les miroirs opaques de l'eau et du ciel. » (p. 183) Aussi, cette partie n'est pas exempte de mystères et de folklore, comme cette visite à un petit cimetière sur une île, où fut érigé un obélisque de marbre noir pour les treize hommes d'un baleinier coulé en 1912. Treize ! Les superstitions étaient encore tenaces.

Si Pedro Nauto est le protagoniste, d'autres personnages sont presque autant importants et marquant. Je pense à José Andrade, le plongeur d'huîtres, mais surtout au capitaine Albarran. Il ne chasse pas la baleine blanche mais c'est tout comme parce que, tout au long de ma lecture, je faisais des parallèles avec Achab. Il y a quelque chose de poétique dans cet homme lucide, qui a passé sa vie sur le pont d'un navire et qui voit venir la retraite parce que son oeil n'est plus aussi sûr (pour harponner). J'ai été sensible au tragique de sa situation.

Pour finir, il y a tellement d'autres éléments que j'aurais souhaité aborder (comme le secret sur l'identité de son père) mais je vais m'arrêter ici. Je termine en précisant que la fin, magistrale et ouverte, est très réussie. Je ne peux que vous encourager à lire le sillage de la baleine.
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