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Critique de PedroPanRabbit



Si l'incipit n'est pas sans évoquer "Les chroniques de Narnia" (dans le contexte historique) ou même "le Magicien d'Oz" (dans la quête du personnage principal), c'est essentiellement dans le terreau des contes et légendes ancestraux que puise J.Connolly pour raconter son histoire, même s'il déguise les éléments qu'il réutilise à son compte. En effet, parmi les personnages que croisera David au cours de son périple, il est rare qu'on fasse directement le lien avec l'oeuvre dans laquelle l'auteur est allé chercher son inspiration : les contours se dessinent progressivement, tandis qu'on découvre leur histoire et qu'on réalise en même temps que dans ce monde, la noirceur intrinsèque des contes semble primer. Ainsi, le garde-forestier n'est autre que le célèbre bûcheron du Petit Chaperon Rouge, histoire d'ailleurs bien différente du conte que l'on connait et dans laquelle la seconde lecture érotique semble avoir gangréné la suite de la célèbre histoire (comment, sinon, croyez-vous que sont nés les fameux hommes-loups?). Il en va ainsi des nombreuses autres références de ce livres, entre clins d'oeils allusifs et détournements appuyés ; parmi celles moins connues du lectorat francophone, l'écuyer Roland est par exemple issu d'un poème anglais de Robert Browning ("Le chevalier Roland vint à la tour sombre"), lui-même inspiré du "Roi Lear" de Shakespeare, la tour sombre étant ici recoupée avec la forteresse aux épines d'une certaine princesse endormie. Plus d'une fois l'ombre d'Angela Carter plane sur ce roman...

Même lorsqu'il ose quelques incursions dans l'humour, l'auteur n'entache pas l'atmosphère sombre et complexe qu'il distille du début à la fin. Il en va ainsi des sept nains que David croise sur son chemin, tous devenus communistes et un tantinet meurtrier face à une Blanche-Neige (le seul personnage issu de l'univers des contes clairement nommé) devenue on ne peut plus envahissante. Ces quelques personnages farfelus ne font finalement que rajouter à l'étrange étrangeté de ce pays, oppressant autant par la folie douce des uns que par les tendances meurtrière des autres. En cela, l'auteur ne nous épargne rien : le pauvre David est soumis à des frayeurs qui nous font frissonner et à des situations parfois dérangeantes, sans jamais que l'on tombe dans le trop ou la caricature, car peur et horreur font bel et bien partie de toute quête initiatique qui se respecte.

Et c'est bien de cela qu'il s'agit : que l'on parle du deuil que David doit faire, de sa lutte contre les loups, de l'acceptation du changement ou de la complexité du monde des adultes où toute pensée magique est inutile, le livre des choses perdues apparait finalement comme un brillant roman initiatique qui fait pour cela la part belle aux symboles et aux métaphores. En passant par un personnage d'enfant sans jamais oublier qu'il s'adresse à des adultes, J.Connolly fait appel à l'enfant qui sommeil en nous et à l'importance de toujours lui laisser une place pour mieux affronter les étapes de la vie.

En bref : Véritable hommage aux contes ancestraux, "Le livre des choses perdues" est un roman initiatique d'une grande maturité, à réserver à un public averti. L'auteur puise en effet dans la noirceur des contes pour symboliser le deuil, l'acceptation et les embûches qui peuvent se rencontrer sur un chemin de vie, le tout étant raconter avec maestria. Dérangeant et fascinant à la fois, ce roman peuplé de personnages archétypaux entre en forte résonance avec l'imaginaire du lecteur pour un effet inoubliable. Un livre qui a mérité ses nombreux prix littéraires.
Lien : http://books-tea-pie.blogspo..
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