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Critique de Nastasia-B


À quoi s'attendre avec un titre pareil ? J'imaginais avant cette lecture une forme de mise en abîme, du théâtre dans le théâtre, sous couleur d'une grosse farce pas forcément hyper drôle. Je n'avais jamais rien lu auparavant de Cyrano de Bergerac et, la curiosité aidant, j'ai voulu savoir.
Je me suis alors rendue compte en cheminant dans cette pièce que le terme " joué " signifiait plutôt " trompé " que " mis en scène ". Puis, à l'extrême fin du cinquième acte, alors que je ne l'attendais plus, la mise en abîme pressentie a finalement montré le bout de son nez, timidement, par la fente du rideau.
Bon, je vais être franche, cette pièce m'a un peu barbée, voire beaucoup barbée et pourtant — pourtant ! — ne m'en déplaise, je lui trouve aussi de très grandes qualités. C'est confus ce que je vous dis, n'est-ce pas ? Oui, je trouve aussi. Il me faut clarifier tout ça.
Acte 1 : une pièce ennuyeuse.
Oui, cette comédie est barbante car Cyrano de Bergerac écrit le pire baroque qui soit avec une pléthore de déclinaisons sur un même thème, avec un mélange de termes ronflants et de latin entremêlés qui lasse énormément à la longue. Des tournures ampoulées à gogo, des références antiques et absconses à foison, bref, du lourd, du bien indigeste et au final, une impression d'ennui, due non pas à l'intrigue ni au manque de rythme mais à l'épaisseur visqueuse du langage employé.
Acte 2 : une pièce lumineuse prélude à des chefs-d'oeuvres majeurs.
Alors quoi ? Qu'y a-t-il au fond de cette mélasse qui puisse impressionner les siècles et produire une descendance florissante ?
Eh bien, mes chers, cette pièce n'est ni plus ni moins que le modèle de l'une des plus fameuses comédies de Molière, j'ai nommé Les Fourberies de Scapin. C'est presque indécent de voir à quel point Molière a pompé cette pièce pour façonner la sienne. le " que diable allait-il faire dans cette galère ? ", le personnage même de Scapin, copie exacte du Corbineli de ce Pédant Joué ainsi qu'une foule d'autres points.
Mais ce n'est pas tout. Il y a dans le Pédant Joué certaines saillies, certaines joutes verbales absolument savoureuses et qui ont immanquablement inspiré Edmond Rostand pour l'écriture, voire le scénario, de son célébrissime Cyrano de Bergerac. Tout y est en germe, on y trouve déjà la réplique du nez qui le précède d'un quart d'heure et la grandiloquence du personnage de Cyrano se retrouve chez beaucoup des personnages de la pièce, notamment Granger et Châteaufort, mais pas seulement. On devine Roxane en Genevote, Christian en Granger le Jeune, le comte de Guiche en La Tremblaye, etc.
Donc, voyez, ce n'est pas tous les jours qu'on a le sentiment de lire un mélange de Fourberies de Scapin et de Cyrano de Bregerac.
Qu'en est-il de l'histoire ? Granger est universitaire, un pédant, qui en oublie parfois de parler français tant les termes latins lui dégoulinent de la bouche. Il est père d'un charmant jeune homme, Granger le jeune, et d'une charmante jeune fille, Manon. Un certain nombre de prétendants désirent s'accoupler à ladite Manon.
De son côté, Granger s'est amouraché de Genevote, laquelle Genevote a donné son suffrage au fils, qui lui aussi voterait bien pour elle, s'il avait quelques écus en poche et le consentement paternel.
Ainsi, père et fils convoitent le même coeur et s'en trouvent bel et bien rivaux sur ce plan. Voilà pourquoi le père charge le fils d'une mission bidon en la lointaine Venise ayant pour seul but de l'éloigner de sa tendre aimée.
Les plans du père eussent été parfait sans le recours aux talents de roublardise de Corbineli, valet de Granger le jeune qui imagine une efficace machination pour rouler le vieux... et que diable allait-il faire dans cette galère !
Je ne vous en dis pas plus sur un scénario que je risquerais de trop fortement déflorer si j'en évoquais davantage.
En somme, une comédie intéressante d'un point de vue ontogénique sur deux pièces maîtresse du répertoire français, mais pas franchement captivante à lire de par l'exagération des fioritures verbales.
Mais bien entendu, ceci n'est qu'un avis et le mieux sera toujours que vous vous fassiez le vôtre par vous-même.
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